Chaque nouvelle annonce du nouveau gouvernement libéral, et en particulier le budget de 2025, vous fait regretter les années de Justin Trudeau? Il est important de noter que les politiques progressistes qu’il a adoptées, comme toute mesure visant à renforcer les droits des travailleuses et travailleurs ou à promouvoir une société plus équitable, ne relèvent pas seulement de la bonne volonté du gouvernement. Des victoires comme la loi anti-briseurs de grève, l’assurance médicaments et le régime de soins dentaires sont le fruit des luttes acharnées menées par les syndicats et leurs alliés. En tant que travailleuses et travailleurs, nous ne devons jamais tenir pour acquis que les gouvernements veilleront à nos intérêts.
Comme la majorité des gens est informée des décisions du gouvernement par l’entremise des médias ou des réseaux sociaux, les luttes et la mobilisation ayant mené à l’adoption de politiques progressistes restent souvent dans l’ombre. C’est en partie parce que les gouvernements aiment s’attribuer le mérite des mesures progressistes, quelles qu’elles soient. Par exemple, dans son budget, Mark Carney se félicite de programmes déployés par le gouvernement Trudeau comme l’assurance médicaments, le régime de soins dentaires et le système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Toutefois, compte-t-il augmenter leur financement ou élargir ces programmes essentiels pour qu’ils remplissent pleinement leur mission? Non.
Ces programmes ont certes été mis en place par le gouvernement libéral de Trudeau, mais uniquement grâce à l’influence du NPD. Cette influence n’est pas le fruit du hasard : elle découle d’années de militantisme et de mobilisation d’organisations de la société civile et du mouvement syndical, qui forment le cœur même du NPD.
La plupart des décisions du gouvernement sont influencées par différents groupes et organismes qui défendent leurs intérêts et poussent leurs priorités politiques, souvent au détriment du bien commun. Par exemple, Mark Carney a rencontré Goldy Hyder, le PDG du Conseil canadien des affaires, quelques jours à peine après son élection. Le Conseil canadien des affaires représente les PDG de 170 des plus grandes sociétés du pays. Son conseil d’administration est composé de milliardaires comme Galen Weston (anciennement à la tête de Loblaw), de PDG du secteur des énergies fossiles et de dirigeant(e)s des grandes banques.
Le Conseil canadien des affaires a joué un rôle majeur dans l’élaboration des politiques économiques dans les années 1980 et 1990, notamment en préconisant un programme favorable au milieu des affaires, qui influence encore aujourd’hui les priorités du gouvernement. Avant les années 1980, la situation était différente : le mouvement syndical était davantage consulté dans l’élaboration des politiques industrielles et du travail. Ce rôle ne nous avait pas été offert : il avait été obtenu grâce au militantisme et à la vigueur du mouvement syndical.
Ce militantisme et cette vitalité connaissent actuellement un net regain. Depuis cinq ans, un nouveau sentiment d’urgence anime les membres du SCFP et les syndicalistes partout au pays. Un exemple récent : la mobilisation massive de nos membres chez Air Canada qui ont refusé que le gouvernement bafoue leur droit à la négociation collective en invoquant l’article 107 du Code canadien du travail pour mettre un terme à leur grève.
Chaque jour, partout au pays, les membres du SCFP s’unissent et forcent les gouvernements à reconnaître leur pouvoir. Les sections locales du secteur municipal, comme le SCFP 830 en grève pendant plus de 100 jours à Charlottetown, Î.-P.-É., défendent les services d’eau potable. En éducation, les membres se battent d’un bout à l’autre du pays pour la qualité du réseau public. Notamment, en Saskatchewan, des sections locales se coordonnent pour mener des négociations sectorielles, tandis qu’en Alberta, d’autres ont tenu tête à la première ministre Danielle Smith. Les exemples abondent. Dans chaque secteur et partout au pays, les membres du SCFP font entendre leurs voix.
Il est indéniable que certains groupes, particulièrement ceux qui représentent les riches et puissants, ont un accès privilégié au gouvernement et aux élu(e)s. Mais ce n’est pas une raison pour se résigner! Mark Carney ne veut peut-être pas écouter les travailleuses et travailleurs, mais les 800 000 membres du SCFP ne lui laisseront pas d’autre choix.

