Le gouvernement fédéral a annoncé que la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) sera un acteur clé de son plan de relance économique post-COVID. Les élus municipaux reçoivent déjà des propositions pour d’importants projets d’infrastructure qui seraient conçus et financés par l’entremise de la BIC. Est-ce vraiment la seule option qui s’offre à eux ? Et est-ce la meilleure option ?
La BIC a le mandat d’attirer de l’investissement privé dans les projets d’infrastructure publique. Ainsi, les projets développés par l’entremise de la banque devront générer des revenus. Cela veut dire que des frais aux usagers, des droits ou des péages seront imposés, directement ou indirectement, pour procurer des revenus constants aux investisseurs privés. Par le biais du financement, de la conception, de l’opération, de l’entretien et de soumissions non-sollicitées du secteur privé, la BIC cédera ainsi à long terme le contrôle des infrastructures communautaires et les profits qui en découlent aux entreprises et investisseurs privés. Peu importe l’enrobage utilisé pour décrire ces projets, il s’agit bel et bien de privatisation d’actifs publics.
Si l’on veut protéger les services publics, la démocratie locale et l’intérêt public, les dix questions suivantes sont primordiales pour les municipalités qui envisagent de réaliser un projet avec la BIC :
- Qui a proposé ce projet ? S’agit-il d’une offre non sollicitée provenant d’une entreprise privée ? La proposition répond-elle à une priorité de la municipalité et de ses citoyens ?
- Le projet s’intègre-t-il aux systèmes et à l’infrastructure en place ? Faudra-t-il apporter des ajustements ou des mises à niveau à d’autres systèmes ou infrastructures en place pour les adapter au projet ? Si oui, quels seront les coûts et qui paiera la facture ?
- Comment ce projet générera des revenus ? Quel est le rendement sur l’investissement ou sur le prêt auquel le promoteur privé s’attend? Qui assumera les dépassements de coûts et les lacunes du projet ?
- À quel type d’examen public le projet sera-t-il soumis ? Le processus d’approbation et de planification sera-t-il transparent ? À quel point ? Y aura-t-il des consultations publiques, y compris sur la pertinence de la participation du privé au financement, à la propriété ou à l’opération du projet ?
- A-t-on envisagé toutes les autres sources et formes de financement ? Est-il possible d’utiliser un financement public à faibles taux d’intérêt? Le projet répond-il aux exigences d’un autre programme fédéral ou provincial de financement de l’infrastructure ?
- Quel est le coût du projet et quel engagement financier à long terme représente-t-il pour la municipalité ? A-t-on réalisé un comparatif complet, sur toute la durée de vie du projet, entre le coût du projet tel que structuré par la BIC et le coût du même projet financé, détenu et exploité publiquement ? A-t-on rendu publics les données et les calculs ?
- Quelles répercussions le projet aura-t-il sur l’économie locale, ainsi que sur les emplois, les salaires et les avantages sociaux des travailleurs ? Imposera-t-on des frais d’utilisation ? Si oui, a-t-on réalisé une étude sur l’impact qu’auront ces frais ? Garantira-t-on au personnel du projet un bon salaire, de bons avantages sociaux et de bonnes conditions de travail et ce, à toutes les étapes ?
- Le personnel, les planificateurs et les consultants qui participent au projet sont-ils indépendants de la BIC et du partenaire privé envisagé, ou bénéficieront-ils directement du projet ? Comment réglera-t-on les conflits d’intérêts ?
- La municipalité a-t-elle la capacité et les ressources nécessaires pour évaluer, administrer et surveiller adéquatement un contrat d’une telle durée, d’une telle portée et d’une telle complexité ?
- Le projet est-il assez flexible pour qu’on puisse y apporter des changements plus tard, si le système ou les installations vont à l’encontre de l’intérêt public ?
Pour en savoir davantage sur la valeur des infrastructures publiques et sur les risques associés à la privatisation, visitez le scfp.ca/municipalités.