Vous avez peut-être entendu aux bulletins de nouvelles des économistes affirmer que la rémunération des travailleurs et travailleuses s’était accrue en 2023, pour ensuite vous demander pourquoi votre paye n’a pas suivi cette tendance. Ces économistes fondent leurs affirmations sur la croissance de la rémunération totale, qui inclut les salaires et les avantages sociaux qu’ont reçus les personnes salariées dans l’ensemble de l’économie. Selon les données de Statistique Canada, la rémunération totale des personnes salariées a augmenté de 6,5 % en 2023. Toutefois, cela ne signifie pas que le salaire moyen ait connu la même hausse.
La croissance de la rémunération totale est attribuable à la hausse des trois principaux facteurs suivants : le salaire moyen, le nombre de personnes salariées et la moyenne d’heures travaillées. En 2023, le nombre de personnes salariées au Canada s’est accru de 476 000, et le nombre d’heures travaillées a légèrement augmenté. Compte tenu de la hausse du nombre de personnes salariées, la rémunération moyenne s’est accrue de 3,6 % en 2023, gain qui demeure inférieur au taux d’inflation de 3,9 %, établi en fonction de la variation sur 12 mois de l’indice des prix à la consommation (IPC). Autrement dit, la hausse de la rémunération totale en 2023 est principalement attribuable au nombre accru de personnes salariées plutôt qu’à une augmentation du nombre d’heures travaillées ou du salaire réel.
Selon les données provinciales, il n’y a qu’en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse que la hausse de la rémunération moyenne a surpassée celle de l’IPC. L’Île-du-Prince-Édouard affiche le plus grand écart entre la hausse de la rémunération totale et la hausse du salaire moyen. À l’Île-du-Prince-Édouard, bien que la rémunération totale ait connu une hausse impressionnante de 8,2 %, le salaire moyen n’a augmenté que de 1,5 %, ce qui est de loin inférieur au taux d’inflation. C’est la Saskatchewan qui affiche la plus faible hausse du salaire moyen par personne salariée, établie à seulement 1,1 %.
Votre propre augmentation de salaire peut être très différente de la moyenne de 3,6 %, car la hausse de la rémunération varie selon les niveaux de revenu. Par exemple, la rémunération annuelle moyenne des personnes salariées provenant des familles aux revenus les plus faibles est passée de 11 000 $, en 2022, à 13 000 $, en 2023, ce qui représente une hausse de 18,6 %. En comparaison, la rémunération annuelle moyenne des personnes salariées se situant au milieu de l’échelle des revenus s’est accrue de seulement 1,5 %, c’est-à-dire d’environ 1 000 $.
Les variations de la rémunération diffèrent beaucoup selon les emplois et les secteurs d’activité. Ainsi, la rémunération moyenne dans les services professionnels, scientifiques et techniques a augmenté de 8,4 % en 2023, tandis que celle dans les industries de l’information et de la culture a diminué de 3,2 %.
De plus, le taux d’accroissement de la rémunération varie énormément quand on tient compte de la hausse du nombre de personnes salariées. Par exemple, la hausse de la rémunération totale était de 9,7 % dans les services publics, mais celle de la rémunération moyenne par personne salariée, nettement inférieure, était de 5,1 %.
Les membres du syndicat doivent se rappeler que, malgré les augmentations de la rémunération totale annoncées dans les médias, les salaires moyens n’ont pas suivi l’inflation. Les données sur la rémunération totale peuvent être utilisées pour manipuler l’opinion des personnes salariées et les inciter à réduire leurs demandes. Les travailleurs et travailleuses ne doivent pas hésiter à exiger des hausses de salaire.