Des années d’âgisme systémique dans le système de santé de l’Ontario, qui traite les personnes âgées comme ayant moins droit à des soins que les autres citoyens, ont contribué au décès par la COVID-19 de plus de 280 résidents des soins de longue durée à Ottawa au cours de la dernière année. C’est ce qu’ont affirmé, hier, des défenseurs qui réclament une enquête révolutionnaire de la part de la Commission des droits de la personne.
L’Ontario Health Coalition (OHC), le Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario (CSHO, division hospitalière du Syndicat canadien de la fonction publique ou SCFP) et l’Advocacy Centre for the Elderly (ACE) réclament une enquête publique pour discrimination des droits de la personne envers les personnes âgées dans l’accès aux soins hospitaliers et de longue durée et le niveau des soins prodigués.
La population, en plus de vieillir, a augmenté de 4,5 millions de personnes au cours des trois dernières décennies. Pourtant, les gouvernements ontariens ont mené la réduction la plus radicale de la taille des hôpitaux de toutes les provinces canadiennes. À Ottawa, on a éliminé des milliers de lits. Parallèlement, le provincial a rationné l’accès aux soins de longue durée. Résultat : une liste d’attente de 38 000 personnes, pour la plupart âgées. À Ottawa seulement, une personne peut devoir patienter jusqu’à 1 836 jours (soit plus de cinq ans) avant d’obtenir une place.
L’Hôpital d’Ottawa, le Montfort et le Carleton Queensway, entre autres hôpitaux ottaviens, sont chroniquement surpeuplés; ils tournent régulièrement à plus de 100 pour cent de leur capacité. Les patients sont entassés dans les salles d’urgence, ce qui crée une énorme pression pour transférer les personnes âgées là où il y a de la place, indépendamment de la sécurité et de la pertinence des soins.
Partout en Ontario, plus de 2200 personnes, pour la plupart âgées, classées comme des patients à autre niveau de soins (ANS) et « souvent appelées bloqueurs de lits par dérision ont été transférés des hôpitaux vers des établissements de fortune comme le Greystones d’Ottawa, une maison de retraite privée, pendant la pandémie », explique Michael Hurley du CSHO.
Dans toute la province, seul un petit pourcentage de résidents en soins de longue durée ayant contracté la COVID-19 ont été hospitalisés avant leur décès : 22,4 pour cent, soit un sur cinq, selon une étude récente. À titre comparatif, le taux d’hospitalisation des malades qui vivent dans la communauté est de 81,4 pour cent.
« La culture du détournement hospitalier pour les résidents des soins de longue durée s’est répercutée sur les première et deuxième vagues », ajoute Natalie Mehra de l’OHC. « Plus le résident est âgé, plus le taux d’hospitalisation est faible. »
Selon l’OHC, le CSHO-SCFP et l’ACE, il est grand temps de faire enquête sur la discrimination systémique envers les personnes âgées dans l’accès à des soins de santé en Ontario. Ils en ont fait part à la Commission des droits de la personne de l’Ontario dans une lettre (en anglais seulement).
« La COVID-19 a fait ressortir l’âgisme systémique appliqué au traitement des personnes âgées dans le système de santé ontarien », souligne Jane Meadus de l’ACE. « On parle de chambres à quatre lits, de manque de personnel et d’EPI, de non-hospitalisation des résidents. Mais les choix politiques qui nous ont menés à cette situation datent de plusieurs décennies. Il faut que ça cesse. »
Les défenseurs ont également exhorté le gouvernement provincial à veiller immédiatement à ce que tout le monde reçoive les soins hospitaliers et de longue durée dont il a besoin, sans discrimination fondée sur l’âge. Ils ont également appelé à l’arrêt du transfert de patients ANS hospitalisés vers des établissements non hospitaliers.