Dans le cadre de l’engagement du SCFP d’apprendre des expériences des personnes autochtones, noires et racisées et de célébrer leurs réussites, nous vous présentons des membres du Conseil national des Autochtones et du Comité national pour la justice raciale. L’article de ce mois-ci présente Lynn Serhan, membre du Conseil national des Autochtones.
Quand Lynn Serhan dit kisâkihitin (« je t’aime » en cri) à ses collègues et à sa famille, elle pose un geste d’espoir et de résistance.
En apprenant des mots en cri et en michif, la langue des Métis, elle se réapproprie son héritage cri et métis.
En grandissant, Lynn n’a pas appris la culture et les traditions de son peuple. Une flamme s’est allumée en elle quand elle a commencé à apprendre tout ce qu’elle pouvait et à le transmettre à ses enfants et petits-enfants, ainsi qu’à ses collègues et aux membres de son syndicat.
Comme elle explique : « Si la langue meurt, que nos Aîné(e)s meurent sans qu’elle soit transmise, notre peuple meurt avec elle. La langue est à la base de tout. »
Au Canada, les politiques et les pratiques coloniales ont interdit aux peuples autochtones de parler leurs langues dans le but d’éliminer leurs cultures et de les assimiler. Aujourd’hui, il y a un mouvement de revitalisation des langues autochtones menacées de disparition.
Lynn est née d’une mère crie et d’un père russe. Ni sa mère ni sa grand-mère ne lui ont appris le cri.
« Voir nos langues renaître me remplit de fierté, raconte-t-elle. Nous sommes des survivantes et des survivants. Nous avons une grande force. Nous ne disparaîtrons pas. »
Lynn travaille comme aide-soignante au Pleasant Valley Manor, un établissement de soins de longue durée à Armstrong, en Colombie-Britannique. Elle habite tout près, à Enderby, sur le territoire non cédé de la bande Splatsin, de la Nation Secwépemc. Elle est membre du Syndicat des employé(e)s d’hôpitaux (SEH) et du Conseil national des Autochtones du SCFP.
Une percée remarquable
En 2021, lors d’un vote historique, les membres du SEH ont modifié leurs statuts pour ajouter six sièges réservés à la diversité au conseil exécutif provincial. L’année suivante, Lynn est devenue la première vice-présidente à la diversité représentant les membres autochtones du SEH. Elle a obtenu un second mandat en 2024.
Faire rayonner sa culture pour créer du changement dans le syndicat lui tient vraiment à cœur. Les voix autochtones comme la sienne apportent une précieuse perspective.
« Les gens se rendent compte que nous sommes toujours là, que nous n’abandonnerons pas », explique-t-elle.
Lynn a commencé son parcours au SEH il y a plus de quinze ans, à la présidence de sa section locale. Comme peu de membres participaient à la vie syndicale, elle a également assuré les rôles de déléguée et de représentante en santé et sécurité. Elle a commencé à participer aux congrès du SEH, puis a joint le Comité permanent des membres autochtones. Elle a également siégé au Conseil national des Autochtones du SCFP pendant les années 2010.
Créer des liens
En s’impliquant de plus en plus dans son syndicat, Lynn a rencontré d’autres membres autochtones qui avaient aussi été coupé(e)s de leur culture; c’est ce qui lui a donné envie de prendre parole.
« J’aime raconter mon histoire, car j’ai espoir qu’elle aide les autres à se défaire du sentiment d’imposture que j’ai moi-même vécu.
J’ai toujours eu l’impression que je ne faisais pas partie de la communauté autochtone. À l’école, je n’avais ma place ni avec les Blancs, ni avec les Autochtones. »
Les insultes racistes qu’on lui lançait ont empiré les choses. « En grandissant, on me traitait de noms. J’ai dû apprendre que ces insultes ne reflétaient pas qui j’étais. »
Il lui a fallu beaucoup de temps pour désapprendre, s’ouvrir aux autres et parler. Mais aujourd’hui, elle est fière de son identité. Le Conseil national des Autochtones lui a permis de créer des liens profonds et de renforcer son sentiment d’appartenance.
« Chaque fois qu’on se voit, on se retrouve comme si on venait tout juste de se quitter. »
Nouer des relations
Le travail du SCFP pour la sécurisation autochtone interpelle Lynn. En collaboration avec le Conseil national des Autochtones, le service de l’éducation syndicale du SCFP organise un atelier d’une journée pour sensibiliser au racisme envers les membres autochtones et aux défis particuliers qui touchent ces travailleuses et travailleurs au Canada.
« Il faut savoir bien travailler avec les Aîné(e)s, les honorer et les écouter, en plus de reconnaître le caractère unique de chaque région et de chaque territoire. Il s’agit de poser des questions, de nouer des relations, de trouver des allié(e)s. »
C’est l’esprit dans lequel Lynn travaille comme aide-soignante auprès des personnes âgées, dont des Aîné(e)s.
« On respecte leurs traditions. Après un décès, une famille a observé une cérémonie de purification par la fumée et ses rituels pour accompagner, selon ses traditions, l’être cher au moment de son départ », explique-t-elle.
Son rapport aux traditions s’est transformé depuis qu’elle a appris à perler et à fabriquer des jupes à rubans, qu’elle s’intéresse à la médecine traditionnelle des plantes et qu’elle suit des cours intensifs de michif.
Lynn invite les personnes autochtones, noires et racisées qui aimeraient s’impliquer dans leur syndicat à sentir qu’elles y ont leur place.
« Impliquez-vous. Écoutez, apprenez des autres, posez des questions. Ne faites pas comme moi et ne perdez pas de temps à vous sentir comme un extraterrestre », raconte-t-elle.
Elle est convaincue qu’on gagnerait à impliquer plus de membres autochtones pour accélérer le changement.
« Nos voix sont de plus en plus présentes. C’est un long processus, mais nos voix sont écoutées. On accepte tout le monde. On est une grande famille. »
Pour en savoir plus sur la Stratégie du SCFP de lutte contre le racisme, et notamment sur l’objectif 4 — « Apprendre de l’expérience des membres noirs, autochtones et racisés et célébrer leurs réussites » —, rendez-vous au scfp.ca/la-strategie-du-scfp-de-lutte-contre-le-racisme. Voyez également les conseils pour mettre en œuvre la Stratégie dans votre section locale.