Deux infirmières ontariennes se sont rendues à Queen’s Park pour demander aux députés provinciaux de tous les partis de poser « un geste concret » pour souligner la Semaine des soins infirmiers en mai. « Nous avons besoin de vous pour contrer la vague d’agressions sauvages perpétrées par des patients et des proches de patients contre les infirmières et les autres employés des soins de santé ontariens », ont-elles dit aux députés. Elles réclament leur soutien à une modification au Code criminel fédéral qui aggraverait la peine associée à une agression contre un travailleur de la santé.

Sandra Hillcoat, une infirmière auxiliaire autorisée (IAA) de Kitchener, et Maggie Jewell, une IAA de Lindsay, ont raconté les cas d’infirmières et de préposées aux services de soutien à la personne ayant subi des fractures, des blessures au visage et des commotions cérébrales. Après avoir été agressées par un patient, certaines ne pourront plus jamais marcher ou travailler. Plusieurs infirmières souffrent de stress post-traumatique et d’autres blessures psychologiques.

« En santé, a expliqué Mme Jewell, nos employeurs banalisent la violence contre le personnel, ils la présentent comme un risque du métier. Frustrés par un système de santé sous-financé et débordé, les patients et leurs proches se vengent sur le personnel. Si nous sommes ici aujourd’hui, c’est pour vous dire que les milieux de travail du secteur de la santé ne sont plus sécuritaires, autant pour le personnel que pour les patients. Nous sommes ici aussi pour réclamer aux députés provinciaux la reconnaissance formelle de la Semaine des soins infirmiers sous la forme d’un appui de tous les partis à un amendement au Code criminel qui découragerait les agressions contre le personnel des soins de santé. » Mme Jewell est membre du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

En Ontario, une infirmière sur deux a été agressée en 2014, la dernière année pour laquelle on dispose de statistiques complètes.

« Pour la Semaine des soins infirmiers, a poursuivi Mme Hillcoat, nous demandons aux politiciens provinciaux ontariens de faire comprendre clairement au fédéral que cette vague d’agressions contre des infirmières et d’autres employés de la santé est inacceptable. L’amendement pour lequel nous réclamons leur appui permettra au juge d’utiliser le fait que la victime de l’agression est un travailleur de la santé comme circonstance aggravante dans la détermination de la peine. » Mme Hillcoat est membre d’Unifor.

Il existe déjà, dans le Code criminel, un article similaire concernant les employés du transport en commun. L’amendement s’appliquerait aux infirmières, aux médecins, aux préposés aux services de soutien à la personne, aux ambulanciers et à tous les autres travailleurs de la santé, y compris ceux œuvrant dans les soins de longue durée, le maintien à domicile et les autres services de soutien communautaire.

« Malheureusement, a déploré Katha Fortier, adjointe au président d’Unifor, la société affiche un niveau de tolérance très élevé à l’égard de la violence faite aux femmes, chose qui se répercute dans les lieux de travail à prédominance féminine, comme en santé. Plusieurs infirmières se sont fait tabasser au point où elles ne pourront plus jamais travailler. Il faut modifier le Code criminel pour faire comprendre aux infirmières et au personnel de la santé qu’on prend cette violence au sérieux et qu’on ne la tolérera pas. »

Les employés de première ligne de la santé, autant ceux affiliés à Unifor qu’au SCFP, font état d’une culture au travail où les incidents ne sont ni signalés ni examinés et où on blâme le personnel pour les agressions perpétrées contre lui. En 2016, une infirmière de North Bay a été congédiée pour avoir dénoncé le problème de violence dans son hôpital.

C’est une problématique très complexe, a précisé le président du Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario du SCFP, Michael Hurley. « Elle a plusieurs sources, a-t-il dit : l’attitude de la société en matière de violence contre les femmes ; l’impact des compressions dans les services comme la santé mentale et la lutte aux toxicomanies ; la consommation accrue de drogues ; l’impatience de la population devant les listes d’attente qui s’allongent pour obtenir des services ; et la manière dont on gère le travail au sein du secteur de la santé. Cet amendement au Code criminel ne fera disparaître la violence comme par enchantement, mais on parlera de ce problème, on l’exposera et on pourra s’efforcer de le régler. »

On peut lire le contenu de la proposition d’amendement au Code criminel aux liens suivants : www.ochu.on.ca, scfp.ca et www.unifor.org.