Les obligations à impact social sont une nouvelle forme de privatisation qui affecte des secteurs comme les services sociaux, l’éducation et les soins de santé. Ce nouveau modèle permet aux investisseurs de faire des profits au travers de services publics. Les investisseurs offrent un financement initial pour les programmes publics comme la protection de la santé, les services de garde, ou encore pour mettre fin à l’itinérance. Si certains résultats sont atteints, le gouvernement rembourse les investisseurs pour le coût initial du programme, plus un profit.
Les obligations à impact social se propagent lentement au Canada, avec deux projets fédéraux et deux en Saskatchewan. Les gouvernements du Manitoba et de l’Ontario, ainsi que le gouvernement fédéral, explorent de nouvelles obligations à impact social. Il est important que les travailleurs, les utilisateurs de services et les prestataires de services travaillent ensemble pour empêcher cette nouvelle forme de mercantilisme et qu’ils exercent des pressions pour des services publics forts et bien financés.
Voici dix façons dont les obligations à impact social nuisent aux gens et aux services publics.
1. Il n’y a pas de place pour les profits dans nos programmes sociaux
Les obligations à impact social permettent aux investisseurs de profiter des services offerts aux personnes âgées, aux personnes ayant un handicap, aux enfants et aux personnes qui sont marginalisées dans nos collectivités. Les investisseurs peuvent s’attendre à avoir des rendements annuels allant de 5 à 30 pour cent. Lorsqu’un projet est couronné de succès, les investisseurs récoltent les profits, aux dépens de la population. Ajouter les profits comme obstacle financier supplémentaire ne fait qu’exercer davantage de pressions sur des programmes déjà financés de façon serrée. Il est injuste que les investisseurs privés fassent un profit avec les services et les soutiens offerts aux personnes les plus vulnérables de notre société.
2. Les obligations à impact social transforment les économies faites grâce à des programmes efficaces en profits
Des programmes sociaux efficaces signifient des économies pour le gouvernement, économies qui peuvent être réinvesties dans d’autres services. Cela augmente l’impact global de nos programmes sociaux. Cependant, les obligations à impact social détournent toute économie possible des programmes publics vers les profits privés. Cela réduit le montant d’argent global disponible pour les programmes sociaux.
3. L’argent est détourné des services vers des consultants en obligations à impact social
Les obligations à impact social intègrent un large éventail de consultants qui profitent des projets. Ces consultants incluent des intermédiaires financiers, des gestionnaires de projets, des vérificateurs, des évaluateurs et des avocats. Une analyse d’une obligation à impact social fédérale sur les compétences essentielles a conclu que 60 pour cent des fonds servaient aux frais généraux et aux profits, tandis que seulement 40 pour cent servaient au programme réel. Les obligations à impact social impliquent des contrats complexes et coûteux qui entraînent des coûts administratifs et de transaction beaucoup plus élevés que les programmes offerts par le secteur public.
4. Les résultats des projets d’obligations à impact social simplistes nuisent aux services publics
Les programmes sociaux financés par l’État présentent régulièrement des rapports sur un large éventail de façons dont les services améliorent les vies des gens. Cependant, les obligations à impact social basent les profits des investisseurs sur quelques résultats qui se mesurent facilement afin de déterminer le « succès » d’un projet. Cela peut biaiser des programmes pour atteindre des résultats simplistes. Ce changement peut entraîner des programmes qui ne réussissent pas à répondre aux divers besoins dans nos collectivités et cela limite les résultats positifs qui découlent de programmes sociaux bien financés.
5. Les prestataires de services d’obligations à impact social ne sont plus des défenseurs
Les prestataires de programmes sociaux agissent souvent à titre de défenseurs pour les personnes qu’ils desservent et soutiennent. Les obligations à impact social peuvent modifier ce rôle, obligeant les prestataires de services à se concentrer sur des résultats de projets potentiellement nuisibles. Dans une obligation à impact social du Royaume-Uni, des organismes sans but lucratif ont reçu un paiement pour la déportation d’itinérants. Ce type de réorientation peut s’avérer contraire aux valeurs des prestataires de services et entraîner une perte de confiance et de réputation.
6. Les obligations à impact social nuisent aux salaires et aux conditions de travail du personnel
Le marché compétitif pour les obligations à impact social peut entraîner la détérioration des salaires et des conditions de travail des travailleurs. Les prestataires de services peuvent se livrer une concurrence entre eux en se basant sur les coûts de main-d’œuvre afin d’obtenir des contrats. Les obligations à impact social peuvent entraîner l’utilisation accrue de bénévoles plutôt que d’une main-d’œuvre rémunérée. Les travailleurs courent également le risque d’être mis à pied si les résultats d’une obligation à impact social ne sont pas atteints, ce qui entraîne une plus grande instabilité dans un secteur déjà précaire.
7. Les obligations à impact social peuvent limiter l’accès aux services
Les obligations à impact social peuvent créer un effet pervers pour les prestataires de services qui cherchent des façons plus faciles d’aider les utilisateurs de services. Ce choix est fait afin que les résultats qui assurent un paiement aux investisseurs soient plus faciles à atteindre. Cela fait également en sorte qu’il est plus difficile de soutenir les utilisateurs de services avec les programmes publics qui restent ou, dans certains cas, de tout simplement leur offrir un accès à des services publics.
8. Le risque n’est pas transféré au secteur privé
Certaines personnes affirment que les obligations à impact social transfèrent le risque pour les services sociaux au secteur privé parce que les investisseurs ne sont pas supposés être remboursés si les résultats ne sont pas atteints par les projets. Cependant, plusieurs stratégies sont utilisées pour minimiser le risque pour les investisseurs. Les prestataires de services peu performants peuvent être remplacés au milieu du projet dans certaines obligations à impact social. Dans d’autres cas, des garanties financières sont offertes qui permettent d’assurer que les investisseurs ne perdent pas la totalité de leur investissement initial. Les investisseurs ont tendance à chercher des projets qui restreignent leur exposition au risque et maximisent les rendements sur leurs investissements.
9. Les obligations à impact social n’encouragent pas l’innovation dans les programmes sociaux
Plutôt que d’être à la fine pointe, les obligations à impact social favorisent les programmes qui ont une recherche approfondie qui démontre leur efficacité. Par exemple, un programme de garderies et de soutien parental existant qui avait fait ses preuves a été bonifié par l’entremise d’une obligation à impact social. Dans d’autres cas, le modèle « Logement d’abord », pour lequel une recherche approfondie a été effectuée montrant son efficacité, a été utilisé dans des obligations à impact social. Malgré le discours relatif à l’innovation, les obligations à impact social ont tendance à répéter des méthodes qui ont bien fonctionné et qui fonctionnent toujours bien, et qui pourraient facilement être offertes par l’entremise de programmes financés et gérés par le secteur public.
10. Les obligations à impact social réduisent la transparence et la responsabilité
Les obligations à impact social donnent le financement, la planification et l’évaluation des programmes sociaux en sous-traitance à de tierces parties qui ne sont pas responsables à l’égard de la population. Les consultants et les investisseurs obtiennent un contrôle sans précédent sur les programmes sociaux qui sont financés, sur les approches qui sont utilisées et sur la façon dont le succès des projets est déterminé. La participation du secteur privé dans les services publics signifie que les coûts des projets, les résultats et l’analyse peuvent être tenus secrets.