Social impact bonds​Sarah Ryan  | Service de recherche du SCFP

Une nouvelle forme de privatisation, l’obligation à impact social (OIS), gagne du terrain au Canada. Malgré son nom, il ne s’agit pas d’une obligation d’épargne, mais d’un modèle servant à sous-traiter le financement, la planification et l’évaluation des programmes sociaux à des entreprises privées qui en tireront des profits pour leurs actionnaires.

Dans le modèle de l’OIS, des firmes  fournissent le financement initial pour la mise en place de programmes sociaux. Si certaines cibles sont atteintes, le gouvernement rembourse ces entreprises et ajoute une marge bénéficiaire. De nombreux consultants sont aussi impliqués dans la négociation des contrats, la gestion des projets et l’évaluation des résultats.

Ce nouveau modèle est né en Angleterre, puis il a été utilisé aux États-Unis, en Australie et au Canada. La plupart des projets à ce jour concernent les services aux prisonniers récidivistes et aux sans-abri ainsi que les services de garde à la petite enfance. L’OIS est aussi appelée obligation à bénéfice social ou obligation récompensant le succès (Pay for Success Bond).

Au Canada

L’OIS est à la mode au Canada:

  • le budget fédéral 2015 comporte des dispositions pour faciliter l’investissement dans les nouveaux projets réalisés grâce à l’OIS.
  • le gouvernement de la Saskatchewan a un projet de ce type en cours et quatre autres en développement.
  • le gouvernement libéral de l’Ontario lancera au moins un projet en 2016. La province soutient aussi la société MaRS qui fait la promotion des OIS.
  • le gouvernement libéral de la Colombie-Britannique a créé les « entreprises à contribution communautaire », des compagnies à but lucratif qui œuvrent dans des domaines autrefois réservés au secteur public ou sans but lucratif.

Les problèmes

Profits privés Les entreprises privées obtiennent un retour sur leur investissement pouvant aller jusqu’à 15 pour cent dans le cadre de programmes sociaux financés par les contribuables. En ajoutant le profit privé aux autres difficultés financières, on ne fait qu’accroître la pression sur les programmes publics. C’est moralement inacceptable que des investisseurs privés puissent tirer profit des services et du soutien prodigués aux citoyens les plus vulnérables.

Le calcul de la réussite L’OIS est assortie d’un processus qui détermine si le gouvernement paiera les investisseurs ou non, ainsi que le montant qui sera versé. Souvent, cette évaluation porte sur des résultats simplistes qui ne tiennent pas compte de la qualité du service. L’appât du gain peut aussi avoir un impact sur la clientèle des programmes sociaux financés en formule OIS, puisque les fournisseurs de services peuvent être tentés de sélectionner les clients ayant le moins de besoins.

Les travailleurs L’OIS peut éroder la stabilité et la sécurité du service puisqu’on ne sait pas si le financement du projet sera maintenu. Elle peut aussi accroître indûment la pression sur les travailleurs qui devront atteindre des cibles simples et mesurables, possiblement au détriment de la qualité générale du service.

Le risque Les partisans de l’OIS, comme ceux du partenariat public-privé, affirment vouloir transférer le risque du secteur public vers le privé. Or, la majorité des projets en OIS visent un domaine éprouvé. Au lieu d’attirer de l’investissement dans de nouveaux projets, les OIS ne font que privatiser et affaiblir des programmes publics et sans but lucratif qui ont fait leurs preuves.

Les solutions de rechange

La meilleure alternative au modèle de financement par OIS est évidemment le financement public traditionnel. De nombreux programmes sociaux sont sous-financés depuis plusieurs années à la suite des décisions des gouvernements libéraux et conservateurs. Un financement adéquat et des cibles raisonnables de qualité permettraient de renforcer et d’améliorer les services publics sans introduire le biais de la recherche du profit.

Que pouvez-vous faire? 

Éduquer Informez-vous sur l’OIS. Visitez le scfp.ca pour en savoir plus. Puis, discutez de l’OIS avec d’autres membres du SCFP et avec les employeurs.

Négocier Si vous œuvrez dans un secteur où ce type de financement risque d’être utilisé, renforcez les articles de votre convention collective portant sur la sécurité d’emploi et les changements technologiques.

Mobiliser Si vous apprenez qu’on envisage de recourir à l’OIS dans votre milieu de travail, mobilisez vos membres et vos alliés. Le SCFP peut aider votre section locale à se doter d’un plan de riposte.