Le NPD fédéral  présentera un projet de loi anti-briseurs de grève pour protéger les syndiqués des secteurs sous réglementation fédérale en cas de grève ou de lock-out. Si le projet est adopté, le Canada rejoindra le Québec et la Colombie-Britannique, qui ont déjà une loi anti-briseurs de grève qui bénéficie aux travailleurs sous compétence provinciale.

L’adoption d’une telle loi au fédéral renforcerait le pouvoir des travailleurs. L’un des rôles essentiels d’un syndicat consiste à aider les travailleurs à s’organiser pour obtenir une meilleure convention collective lors des négociations avec l’employeur. En unissant nos forces, nous obtenons de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail qu’en négociant individuellement.

Notre pouvoir de négociation vient de notre capacité à arrêter le travail par la grève. D’ailleurs, lorsque le gouvernement de la Saskatchewan a rendu presque impossible la grève dans le secteur public provincial, la Cour suprême du Canada a conclu que le droit de grève était un élément essentiel de la négociation collective et de la liberté d’association.  

La plupart des négociations collectives se concluent sans arrêt de travail, mais certains lock-out et grèves peuvent durer plusieurs années. Les employeurs profitent des longs lock-out pour exiger des concessions aux régimes de retraite et aux avantages sociaux, confier des tâches en sous-traitance ou même essayer de casser les syndicats. L’utilisation de travailleurs de remplacement, qu’on appelle briseurs de grève ou « scabs » en anglais, diminue le pouvoir de négociation des travailleurs et fait grimper la tension sur les lignes de piquetage.

Nous le constatons avec le lock-out de la raffinerie Co-op à Regina, un lieu de travail de compétence provinciale, où l’employeur fait venir des travailleurs de remplacement par hélicoptère pour soutenir son attaque contre les prestations de retraite des syndiqués d’Unifor. À la mi-février, la ville de Fredericton a mis en lock-out des travailleurs municipaux membres de la section locale 508 et a recruté des briseurs de grève par l’entremise d’une société basée en Ontario. Heureusement, ce lock-out s’est terminé rapidement. Au moment d’aller sous presse, les membres de la section locale 4193 du centre de traitement des déchets situé près de Bathurst au Nouveau-Brunswick, étaient en lock-out et des « scabs » prenaient leur place.

Une étude réalisée en 2015 indique que l’impact des lois anti-briseurs de grève varie en fonction du taux de syndicalisation, des conditions économiques générales et de variations dans les lois du travail (par exemple, la présence de l’accréditation par vérification des cartes). Certains chercheurs ont conclu qu’une loi anti-briseurs de grève diminue le nombre de longs lock-out et contribue à faire augmenter légèrement les salaires.

Les opposants à la loi anti-briseurs de grève en Colombie-Britannique et au Québec prédisaient qu’il y aurait plus de grèves et que les investisseurs seraient moins susceptibles de s’installer dans ces provinces. Ces prédictions ne se sont pas réalisées.

L’analyse démontre que, de plus en plus, les employeurs confient des tâches en sous-traitance, les transfèrent au privé et recourent aux briseurs de grève en période de grève ou de lock-out prolongé. Cette situation prévaut à travers le pays, y compris dans les secteurs sous réglementation fédérale. Lors de la grève de 2002-2003 chez Vidéotron, au Québec, l’employeur a pu utiliser des briseurs de grève parce que le secteur des télécommunications est de compétence fédérale. La grève de 10 mois a touché 2200 travailleurs de Vidéotron, membres des sections locales 1417 et 2815 du SCFP. Le recours aux travailleurs de remplacement a réduit le pouvoir de négociation de nos membres et a diminué la volonté de l’employeur de conclure une entente.

Le NPD fait preuve de leadership en annonçant le dépôt d’un projet de loi anti-briseurs de grève pour équilibrer le rapport de force entre les travailleurs et les employeurs dans les domaines sous juridiction fédérale. Le temps est venu d’adopter une telle loi.