À St. Catharines, en Ontario, les arbres en milieu urbain et les personnes qui en prennent soin profitent désormais d’une meilleure protection grâce à l’organisation des travailleuses et travailleurs municipaux qui ont tissé des liens avec la communauté pour préserver les services forestiers publics de la ville.
Le projet de la Ville de St. Catharines d’abandonner les services forestiers internes a été rejeté à l’unanimité par le conseil municipal plus tôt cette année, après des mois d’organisation intensive et stratégique.
Les travailleuses et travailleurs forestiers, membres du SCFP 150, ont été informés pour la première fois des plans de privatisation de la Ville au début de 2023, bien que le service subit des pressions depuis des années pour faire concurrence à des sous-traitants qui cherchent à sous-enchérir et qui comptent sur une main-d’œuvre sous-payée avec un taux de roulement élevé. La Ville laissait quatre postes vacants aux services forestiers et prétendait vaguement et de manière erronée que ces services internes coûtaient plus cher que les sous-traitants.
La solidarité de la section locale et la mobilisation des membres pour mettre fin à la privatisation
À l’automne de la même année, le mouvement de privatisation s’est intensifié. La section locale, après avoir terminé une ronde de négociations ardues, disposait d’une liste d’adresses électroniques à jour, lui permettant ainsi de prévenir rapidement les membres de la menace de suppression de neuf postes.
« Tout le monde était au courant du problème et nous appuyait », affirme Rory Bourgeois, travailleur municipal et ancien secrétaire-archiviste de la section locale, qui en est maintenant le président. La section locale représente environ 180 membres à temps plein et 50 travailleuses et travailleurs saisonniers.
Rory Bourgeois a coordonné une campagne qui a mobilisé les membres, impliqué les membres élus de la section locale et établi un solide réseau communautaire. Le fait d’avoir une personne unique qui peut se concentrer sur la campagne a été essentiel à sa réussite.
La section locale a accentué la pression sur le maire et son équipe en publiant des études sur les conséquences négatives de la privatisation et en inondant leurs boîtes de réception de courriels d’une campagne en ligne très réussie. Les dirigeant(e)s du SCFP 150 ont noué de nouveaux liens politiques et renforcé ceux déjà établis avec les conseillères et conseillers progressistes. On a mis l’accent sur la diffusion d’un message clair et cohérent au sujet de la valeur des travailleuses et travailleurs internes qui s’occupent des arbres de St. Catharines, surnommée la « ville des jardins ».
La sous-traitance s’accompagne de coûts élevés et de risques importants
Les raisons de maintenir les services forestiers publics étaient claires dès le départ.
« Le coût de la sous-traitance est largement sous-estimé », a déclaré Rory Bourgeois aux conseillères et conseillers municipaux lors d’une réunion cruciale du conseil, pleine à craquer de membres du SCFP 150 et d’allié(e)s de la communauté. Il a prévenu le conseil que les sous-traitants allaient d’abord faire des offres inférieures, puis augmenter leurs tarifs lorsqu’il n’y aurait plus de service interne pour les concurrencer.
Au conseil municipal et dans la communauté, Rory Bourgeois et la section locale ont souligné l’importance de protéger les arbres de la ville en tant qu’atouts naturels précieux. Les multiples coûts cachés liés à la privatisation, comme la surveillance, le nettoyage après les interventions des sous-traitants forestiers, ainsi que le temps consacré par le personnel à la supervision et à la gestion des contrats, ont également été mis en évidence.
Des travaux de moindre qualité en raison du roulement élevé des sous-traitants et de la pression exercée pour réduire les coûts, l’absence de surveillance interne et la mauvaise intégration avec d’autres services de la Ville étaient d’autres préoccupations majeures.
« Le personnel de la Ville a une connaissance approfondie de toutes les activités de la Ville et est en mesure d’acheminer les plaintes à l’interne. La population sait que tout problème lié à la Ville peut être signalé à n’importe quel camion portant le logo de la municipalité », a déclaré Rory Bourgeois. Il a également rappelé aux membres du conseil que le personnel interne est redevable envers la population, et non pas envers une entreprise à but lucratif, et qu’il est flexible. En hiver, les travailleuses et travailleurs des services forestiers s’occupent souvent du déneigement.
« La force de notre ville dépend des travailleuses et travailleurs de première ligne », a déclaré Rory Bourgeois.
La section locale s’associe à des allié(e)s de la communauté pour renforcer le soutien
La section locale n’était pas la seule à lutter contre la privatisation. Elle a dressé la liste de ses allié(e)s et de ses adversaires au conseil et dans la communauté, et elle a travaillé pour obtenir l’appui du milieu des affaires local, des environnementalistes, des scientifiques et d’autres membres de la population.
Rory Bourgeois attribue à l’équipe du centre-ville de la section locale le soutien de l’association commerciale du centre-ville. Il a donné l’exemple d’un membre de l’équipe dont la veste porte la mention « Downtown Ron ».
« Il rencontre tous les propriétaires d’entreprises, ramasse les déchets et discute avec eux, leur montrant ainsi sa passion pour la propreté des rues, une cause qui leur tient à cœur », a déclaré Rory Bourgeois et, grâce à sa transparence et sa fiabilité, l’équipe du centre-ville a su créer un lien que la direction n’était pas en mesure d’établir.
« Les travailleuses et travailleurs demeurent généralement dans la ville toute leur vie, ce qui n’est pas souvent le cas des gestionnaires », a déclaré Rory Bourgeois.
Lui et d’autres membres du SCFP 150 ont pris part à des groupes de quartier, comme ArborSTC, un groupe environnemental local qui s’efforce d’augmenter la plantation d’arbres dans la ville. Le groupe a eu accès à des arbres gratuits, et la section locale a aidé à frapper aux portes et à mobiliser des membres pour constituer une main-d’œuvre. Ils ont aussi eu accès à des camions pour livrer de la terre. C’était un moyen pour la population locale de démontrer l’importance qu’elle accorde aux arbres et à la communauté.
La section locale a également appuyé sa stratégie sur des groupes comme les associations sportives et les clubs sociaux locaux, en puisant dans les liens existants de l’ensemble des membres pour faire connaître la lutte menée par les services forestiers.
« Tout le monde a une vie en dehors du travail. On ne sait pas toujours de quoi il s’agit, mais il y a beaucoup de membres qui s’impliquent dans la communauté de différentes manières », a déclaré Rory Bourgeois.
Cette victoire souligne l’importance de renforcer le soutien communautaire pour les services publics
Depuis l’échec du plan de privatisation de la Ville, le conseil municipal a demandé un rapport sur l’augmentation du personnel des services forestiers.
Maintenant qu’il est le président de la section locale, Rory Bourgeois a l’intention d’élargir la conversation sur les services internes à d’autres services de la Ville et de continuer à établir des liens avec la population locale et les dirigeant(e)s.
« La politique a une influence directe sur nos emplois, avance Rory Bourgeois. Travailler au cœur de la communauté et compter sur son soutien est crucial. Il faut comprendre les retombées de notre travail sur la communauté et chercher son appui. »