Dans le cadre de l’engagement du SCFP de tirer profit des expériences des personnes autochtones, noires et racisées, et de célébrer leurs réussites, nous vous présentons des membres du Comité national pour la justice raciale et du Conseil national des Autochtones. L’article de ce mois-ci présente Calvin Scott, membre du Comité national pour la justice raciale.

Après avoir enduré des actes de racisme anti-noir dans le système scolaire de Boston, Calvin Scott s’est donné pour mission d’offrir aux élèves afro-néo-écossais le soutien qu’il n’a pas reçu.

Lui-même afro-néo-écossais, Calvin est travailleur de soutien à l’école secondaire Halifax West, membre du SCFP 5047 et membre du Comité national pour la justice raciale, du SCFP.

Le programme des spécialistes du soutien aux élèves a vu le jour dans les années 90 dans le but de lutter contre la discrimination systémique à l’égard des élèves de descendance africaine, dont l’identité et les expériences n’étaient pas reflétées en classe. En raison de cette absence de représentation et de modèles, les élèves noir(e)s étaient prédestiné(e)s à échouer. Beaucoup n’obtenaient pas leur diplôme, et peu entreprenaient des études postsecondaires.

Donner le soutien qu’il n’a jamais reçu

« Ce qui m’anime réellement, c’est de savoir que je suis là pour guider des élèves qui me ressemblent et qui peuvent vivre de mauvaises expériences, comme celles que j’ai vécues. Je n’avais personne qui me ressemblait pour défendre les intérêts des élèves noir(e)s, personne pour me tendre la main dans un milieu vraiment désagréable pour moi », explique Calvin.

Calvin a grandi à Roxbury, au Massachusetts, dans les années 70, dans une ville et un système scolaire où la ségrégation raciale était la règle. Après la décision d’un juge de mettre fin à la ségrégation, Calvin et d’autres enfants ont été transportés en autobus de leur quartier où se trouvaient majoritairement des personnes noires à une école située dans un quartier composé uniquement de personnes blanches. Entre ces murs, les enfants ont connu racisme et hostilité.

« On écrivait des mots méchants à propos de nous sur les murs, sur les bureaux, dans les corridors et dans les toilettes », se rappelle Calvin en se demandant comment il a réussi à survivre aux nombreux actes de racisme vécus au quotidien.

« Presque chaque matin, on arrivait à l’école en voyant les concierges peindre par-dessus des termes péjoratifs visant les élèves noir(e)s. Il y a également eu de nombreuses émeutes raciales durant ces quatre années au secondaire », ajoute-t-il.

« Je n’oublierai jamais ce sentiment désagréable de savoir que je n’étais pas le bienvenu dans cette école – et ça ne venait pas seulement de la communauté, mais de membres du personnel enseignant et de la direction également. »

Favoriser la réussite des élèves

Calvin applique les leçons tirées de cette profonde injustice dans son travail, où il agit en tant que modèle et défenseur pour les élèves afro-néo-écossais depuis près de 30 ans. « Je crois sincèrement que c’est ma vocation », affirme-t-il.

« Mes premières expériences à l’école m’ont ôté l’envie de m’instruire en raison du personnel enseignant qui ne croyait pas en moi ou qui me disait des choses inappropriées », explique Calvin.

« L’école n’est pas un bon vecteur de l’histoire des personnes de descendance africaine. On ne parle pas des réussites. On ne parle que du négatif. »

Depuis le début du programme des spécialistes du soutien aux élèves afro-néo-écossais, le taux d’obtention du diplôme a augmenté chez les élèves noir(e)s, et davantage obtiennent également un diplôme d’études postsecondaires.

Se servir de sa voix et de sa force

Calvin s’est impliqué dans sa section locale il y a 15 ans, après avoir été nommé pour siéger au Comité des droits de la personne. Durant la réunion, il a balayé la salle du regard… pour constater qu’il était le seul membre noir.

« J’étais troublé. Qui prendra la parole pour les gens comme moi? Qui exposera notre point de vue? Notre opinion? Qui nous défendra? »

Aujourd’hui, Calvin est membre formateur et entreprend un deuxième mandat au sein du Comité national poue la justice raciale. Il considère ce comité comme « une plateforme encore plus importante pour tenter de provoquer des changements à l’échelle locale, mais aussi à l’échelle nationale ».

Il précise que des efforts sont actuellement déployés pour lutter contre le racisme et accroître la représentation au sein du SCFP. « On démantèle tranquillement les barrières qui entravent notre route depuis longtemps. »  

Calvin raconte que le travail syndical lui a permis de s’exprimer avec assurance et de parler de choses qui lui tiennent à cœur. Il puise dans cette force lorsqu’il est victime de racisme au travail.

« Je ne suis pas confronté à du racisme flagrant, mais à du racisme déguisé. C’est subtil. Je parle des microagressions vécues au quotidien, précise-t-il. C’est difficile, mais j’ai une bonne connaissance de moi, je sais qui je suis, où je suis et pourquoi je suis ici. »

« Être continuellement confronté à du racisme est mentalement épuisant , souligne Calvin. Le racisme laisse des séquelles. » Il a appris à choisir ses batailles et à prendre soin de lui. La sécurité psychologique des employé(e)s noir(e)s et racisé(e)s doit être une priorité.

« C’est vraiment une question de survie, sur le plan mental. J’ai voulu abandonner à de nombreuses reprises. Je me disais que je n’en pouvais plus. On se livre à un combat sans fin – on doit déplacer des montagnes, caillou par caillou. »

Mettre en œuvre la stratégie de lutte contre le racisme

« La Stratégie du SCFP de lutte contre le racisme est un premier pas dans la bonne direction. On a un document écrit », souligne Calvin, tout en insistant sur le fait que la Stratégie est inutile sans actions concrètes. 

Sa demande est simple : « Faites-en plus qu’un document stratégique. Montrez aux membres que la Stratégie donne des résultats. Tenez les gens responsables de leurs actes en cas de non-respect », précise-t-il en ajoutant que la sensibilisation est essentielle à la responsabilisation. « Soyez dans la discussion plutôt que la dénonciation. Essayez de sensibiliser la personne, et si ça ne donne rien, vous pourrez dénoncer ses actions. »

Calvin souligne que l’engagement du SCFP à lutter contre le racisme est important pour une raison : « C’est la bonne chose à faire. Point! »

Il désigne la composition de plus en plus diversifiée de notre syndicat comme étant un autre facteur déterminant. « Le SCFP et ses membres reflètent le pays. Beaucoup de personnes immigrantes viennent au Canada et intègrent nos milieux de travail avec leurs croyances, coutumes et valeurs. »

Calvin conseille aux membres noir(e)s, autochtones ou racisé(e)s qui songent à s’impliquer au SCFP de jeter un coup d’œil aux différents rôles.

Parfois, Calvin est la seule personne noire aux réunions de sa section locale. Son approche consiste à rester fort. « Il faut se connaître soi-même. Tout le monde ne partage pas les mêmes idées. Certaines personnes seront en désaccord avec nos idées, mais il faut s’en tenir aux faits et défendre sa position. On doit miser sur la sensibilisation, et non la confrontation. »

Selon lui, cette approche permet de cultiver le changement. « C’est ce que je dis toujours aux élèves. Vous ne le voyez peut-être pas, mais je sème une graine dans l’espoir qu’elle germe. »

Après presque 30 ans, Calvin sait qu’il a beaucoup semé. « J’ai une forêt maintenant! », conclut-il en arborant un large sourire.

Pour en savoir davantage sur la Stratégie du SCFP de lutte contre le racisme, notamment sur l’objectif 4 – Apprendre de l’expérience des membres noirs, autochtones et racisés et célébrer leurs réussites –, rendez-vous au scfp.ca/stratégie_contre_le_racisme. Voyez également les conseils pour mettre en œuvre la Stratégie dans votre section locale.