La mise à jour économique de cet automne est inquiétante à bien des égards. Normalement, elle consiste en une série de prévisions revues et corrigées pour les mois à venir, accompagnées d’une mise à jour des comptes du gouvernement. Or, avec cette mise à jour économique, le gouvernement pèse sur l’accélérateur pour favoriser encore plus la privatisation.

« Le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, s’entend comme larrons en foire avec les gros bonnets du secteur privé siégeant sur son conseil consultatif en matière de croissance économique. Ces derniers ont recommandé de vendre nos infrastructures à des investisseurs privés qui cherchent à réaliser des profits. Or, une telle manœuvre va coûter plus cher aux Canadiens pour des services de moindre qualité », a déclaré le président national du SCFP, Mark Hancock.

La Banque de l’infrastructure du ministre des Finances mènera à la cannibalisation et à la privatisation des infrastructures publiques au profit d’investisseurs institutionnels privés. Ces investisseurs exigent un taux de rendement nettement plus élevé que le taux auquel le gouvernement peut emprunter directement. La facture sera plus élevée et la population payera la différence, que ce soit par l’intermédiaire des subventions gouvernementales versées ou de hausses des frais d’utilisation.

La privatisation ne fait pas qu’augmenter les coûts. Elle accentue aussi les inégalités sociales. Sous l’effet de la privatisation, les frais d’utilisation grimpent, les salaires et les avantages sociaux des travailleurs diminuent et la rémunération des hauts dirigeants augmente. L’engagement, maintes fois répété, du gouvernement Trudeau à soutenir la classe moyenne et à réduire les inégalités semble s’être volatilisé.

En faisant financer les projets d’infrastructure par le privé qui s’attend à un taux de rendement de sept à neuf pour cent, alors que le fédéral peut emprunter en ce moment à moins de deux pour cent pendant plus de 30 ans, on quintuplera les frais d’intérêt et de financement de ces projets et on en doublera le coût total. Autrement dit, nous obtiendrons moitié moins pour notre argent collectif.

Un expert de l’Université de Toronto, Matti Siemiatycki, a pourtant formulé des propositions beaucoup plus constructives pour la Banque de l’infrastructure du Canada, des propositions qui permettraient de réduire le coût du financement des infrastructures publiques par l’entremise de prêts directs et de garanties d’emprunt. Son approche est beaucoup plus conforme à ce que le premier ministre a demandé au ministre Morneau dans le mandat qu’il lui a confié lors de sa nomination : « créer la Banque de l’infrastructure du Canada afin d’offrir du financement à faible coût (y compris des garanties d’emprunt) pour de nouveaux projets d’infrastructure municipaux faisant partie de nos secteurs d’investissement prioritaires ».

Au lieu de favoriser la privatisation et le financement à coût élevé qu’elle entraîne, le ministre Morneau devrait opter pour le financement public à faible coût pour nos infrastructures publiques.