Remarque : Cette fiche est distribuée à titre d’information seulement. Aucun élément ne peut être considéré comme un avis médical ou légal.

Les opioïdes font partie de la catégorie de médicaments qui atténuent la douleur. Parmi les opioïdes les plus courants, notons la codéine, la morphine, l’oxycodone, le fentanyl, la méthadone, le carfentanil et l’héroïne. Ces médicaments peuvent prendre la forme de comprimés, de capsules, de sirops, de liquides pour injection, de vaporisateurs nasaux, de timbres transdermiques, voire de suppositoires[i].

Ces dernières années, nous avons assisté à la recrudescence du nombre de décès par surdose découlant de l’usage non médical de ces drogues, surtout lorsqu’elles sont mélangées avec d’autres substances illicites comme l’héroïne et la cocaïne ou avec des comprimés en vente libre et parfois contrefaites[i].

Lorsque ces drogues ou médicaments sont consommés en trop grandes quantités, des signes de surdose se manifestent, soit :

  • une respiration lente ou faible;
  • des étourdissements, de la confusion et de la somnolence;
  • la peau froide et moite;
  • des micropupilles;
  • Perte de conscience et le comai.

Intervention en cas de surdose

Les membres du SCFP travaillent dans toutes les sphères de la société. Plus la prédominance de surdoses d’opioïdes augmente, plus nos membres seront susceptibles de rencontrer des clients, des patients et des membres du grand public aux prises avec des réactions découlant de surdoses présumées d’opioïdes.

Les membres du SCFP qui sont intervenants d’urgence ou secouristes, comme les paramédicaux, ou qui travaillent dans des contextes médicaux ou sociaux sont susceptibles d’administrer des médicaments sous diverses formes. Cependant, l’administration d’un antidote permettant de neutraliser les surdoses constitue une option nouvelle, voire intimidante pour la majorité des travailleurs du SCFP relevant d’autres entités, comme les municipalités, les écoles, les bibliothèques et certains services sociaux.

Empêcher une personne de mourir d’une surdose comporte des avantages évidents. Cela dit, les membres du SCFP qui acceptent de traiter les personnes susceptibles de souffrir d’une surdose d’opioïdes doivent prendre des précautions. Advenant qu’un employeur demande aux membres du SCFP de commencer à jouer le rôle d’intervenants d’urgence en première ligne, les travailleurs doivent prendre plusieurs facteurs en considération AVANT que l’on puisse raisonnablement s’attendre à ce qu’ils se mettent à la tâche.

Un antidote aux surdoses d’opioïdes : la naloxone

La naloxone (ou Narcan) est un antidote courant et très efficace en cas de surdoses d’opioïdes. Ce médicament, qui ne nécessite aucune ordonnance, existe sous la forme d’injection ou de vaporisateur nasal. L’antidote se fixe aux mêmes récepteurs du cerveau auxquels s’attachent les opioïdes, ce qui a pour effet de bloquer les effets des opioïdes. De manière générale, la naloxone est un médicament qui ne présente pas de danger et n’a pas d’effets secondaires connus. Il s’agit également d’un médicament que l’on peut vraisemblablement administrer sans problème, même en l’absence d’opioïdes, à moins que la personne n’y soit allergique. En présence d’opioïdes, la réaction à la naloxone pourrait comprendre de graves symptômes de privation, comme des crampes abdominales, des nausées et des vomissements.

Intervention en cas d’incident : consultation, participation et plan

L’employeur qui s’attend à ce que ses employés interviennent en cas d’incidents de surdose présumée doit se doter de politiques, de procédures et de protocoles clairs, en consultation et en collaboration avec le comité de la santé et de la sécurité au travail ou son représentant. Tout le personnel doit suivre une formation poussée afin de savoir comment intervenir. Le simple fait d’avoir des doses de naloxone « à la portée de la main », sans politiques ou consignes d’utilisation de la part de l’employeur, est inacceptable. Les politiques et les plans doivent faire mention de l’équipement de protection individuelle requis, équipement qui doit être fourni aux travailleurs. Le plan d’intervention en cas d’incident doit énumérer les mesures à prendre pour évaluer la situation, tenir compte de l’exposition aux risques, inclure les coordonnées des personnes-ressources en cas d’urgence ainsi qu’un plan pour toutes sortes de complications imprévues.

Par ailleurs, les attentes des travailleurs doivent être très claires. Les travailleurs doivent avoir l’assurance qu’ils ne seront pas la cible de représailles s’ils tentent d’intervenir en cas de surdose présumée d’opioïdes. Il y a lieu de remarquer que certaines commissions des accidents du travail peuvent considérer l’administration d’un traitement qui n’est pas décrit dans les politiques et les programmes d’un employeur, ou encore, dans une convention collective, comme du « bénévolat ». Par conséquent, les réclamations en cas de blessures ou de troubles découlant de ces activités, au travail ou en dehors des heures de travail, risquent de ne pas être couvertes par la commission des accidents du travail. Les travailleurs doivent avoir la certitude que l’employeur les appuiera dans leurs démarches juridiques et financières, peu importe ce qu’il adviendra de la situation. Et enfin, il faut savoir que ce ne sont pas tous les travailleurs qui seront à l’aise avec cette tâche et par conséquent, il doit y avoir des dispositions pour que tous les travailleurs puissent discuter de leurs préoccupations et s’en occuper.

Équipement de protection individuelle

Les lieux de travail diffèrent d’un endroit à l’autre, mais il n’en reste pas moins qu’il existe des points communs en présence de surdose présumée d’opioïdes. Du point de vue biologique, la situation présente des inquiétudes, car la personne qui fait une surdose est susceptible de vomir. De plus, la transmission des opioïdes, en soi, présente un risque. Certaines formes d’opioïdes, comme le carfentanil, sont tellement puissantes que même la transmission de quelques grains (par voie cutanée, inhalée ou ingérée) peut présenter des dangers pour la santé de l’intervenanti. C’est pourquoi l’employeur doit fournir de l’équipement de protection individuelle adéquat, et montrer au personnel comment s’en servir, notamment comment l’enfiler et l’enlever.

Formation poussée en premiers soins

La plupart des gens ne sont pas formés pour intervenir en cas d’urgence ou pour déterminer les bonnes mesures à prendre en cas de surdose. Les travailleurs susceptibles d’administrer de la naloxone doivent suivre des cours complets en premiers soins et en réanimation cardiopulmonaire, en plus de cours sur la façon de reconnaître les symptômes d’une surdose. Ces travailleurs risquent également d’être obligés de prodiguer d’autres soins en attendant que les intervenants d’urgence ou les secouristes arrivent.

Évaluation du risque de violence

Les membres du SCFP peuvent être la cible de violence en tout temps, ce qui est source d’inquiétudes. La participation à un programme comprenant l’administration de naloxone peut augmenter les risques de deux manières :

  1. Les travailleurs qui administrent le médicament doivent être en contact étroit avec la personne en cause. La personne qui fait une surdose peut agir de manière imprévisible et risque d’être décontenancée. Elle peut tenter de donner des coups si elle se sent menacée. Les risques de blessure deviennent alors plus grands, surtout si la personne est agressive pendant sa période de manque.
  2. Lorsque les gens savent que de la naloxone peut être administrée en certains lieux, ces lieux deviennent, de fait, des « lieux d’utilisation sécuritaires ». Par conséquent, le nombre de consommateurs de drogues, opioïdes ou autres, risque de s’accroître.

L’employeur doit donc tenir compte de ces facteurs et faire une évaluation des risques de violence afin de déterminer les mesures à prendre pour que les membres du SCFP demeurent en sécurité. L’évaluation doit être effectuée en consultation avec le comité de la santé et de la sécurité au travail ou avec un représentant des travailleurs pour déterminer les mesures à prendre. Le processus d’évaluation doit être consigné par écrit.

Blessures et stress causé par un incident critique

L’employeur doit faire en sorte que le membre du SCFP susceptible d’intervenir en présence de surdoses présumées d’opioïdes n’aura aucune perte de salaire en cas de blessure. Les blessures peuvent être psychologiques. L’employeur doit savoir que les membres du SCFP qui s’occupent d’une personne faisant une surdose au travail ou pire encore, qui meurt d’une surdose leur causera un grand stress psychologique, même s’ils n’interviennent pas directement. Cela s’ajoute aux risques de blessures physiques. Par conséquent, les employeurs doivent absolument mettre en place des ressources adéquates pour traiter correctement la réaction au stress causé par un incident critique avant qu’il ne dégénère en blessures psychologiques plus profondes.

Résolution de la crise des opioïdes

La naloxone est efficace quand vient le temps d’empêcher une personne de mourir d’une surdose, mais elle ne permet pas de surmonter le problème de l’utilisation d’opioïdes ne faisant pas l’objet d’ordonnances. Le fait de mettre des trousses de naloxone à la disposition des membres du SCFP ne règle pas la crise des opioïdes. L’apport de solutions complètes, y compris des stratégies exhaustives en matière de santé et de dépendance, incombe au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux. Cela comprend des lieux de consommation supervisés, un meilleur accès aux installations de rétablissement et de réadaptation, la décriminalisation, et ainsi de suite.

Renseignements supplémentaires

Si votre employeur soulève le sujet de l’administration de la naloxone, veuillez communiquer avec votre représentant national de service syndical du SCFP immédiatement.


[i]  http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1005750/carfentanil-drogue-puissante-fentanyl