Introduction

Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) est à l’avant-garde de la lutte contre la privatisation des services publics depuis sa fondation, en 1963. Le pouvoir collectif des membres du SCFP est notre meilleur moyen de défense contre la privatisation. Les conventions collectives du SCFP constituent un puissant outil pour mener cette lutte à bien. Lorsque les membres du SCFP s’organisent pour obtenir et faire appliquer à la lettre des clauses contractuelles qui empêchent nos employeurs de sous-traiter ou qui limitent leur capacité de le faire, nous sommes en mesure de protéger les emplois syndiqués et les services publics. Les conventions collectives du SCFP offrent une certaine protection contre la sous-traitance plus souvent que celles des autres syndicats. Les sections locales du SCFP utilisent donc régulièrement les dispositions de leur convention collective pour stopper la privatisation.

La sous-traitance est la forme la plus courante de privatisation à laquelle les membres du SCFP sont confrontés. Elle menace tous les secteurs. Elle implique qu’un employeur du secteur public (comme une municipalité, un conseil scolaire ou une régie de la santé) paye une société privée à but lucratif ou un organisme sans but lucratif pour fournir un service qui était auparavant fourni par du personnel du secteur public. Pour certains employeurs, la sous-traitance vise également à recourir à de la main d’œuvre non syndiquée, et à tirer les conditions de travail vers le bas. Lorsque la sous-traitance est utilisée pour tout un système ou service, on parle parfois d’« externalisation ». Il existe d’autres formes de privatisation, comme le partenariat public-privé (PPP), l’obligation à impact social (OIS) et la diversification des modes de prestation des services (DMPS).

Les sections locales du SCFP doivent absolument négocier des dispositions précises contre la sous-traitance si elles n’en ont pas déjà. Elles devraient aussi revoir et renforcer les dispositions existantes à chaque ronde de négociation collective et négocier une clause de rapatriement à l’interne pour confier à nouveau des tâches aux membres de l’unité de négociation.

Présentation

Ce guide vise à aider les personnes conseillères du SCFP et les comités de négociation des sections locales à rédiger des clauses de convention collective qui stopperont la sous-traitance.

Nous conseillons une approche multidimensionnelle qui inclut les aspects suivants :

  • limiter la capacité de l’employeur de sous-traiter.
  • contrer la sous-traitance en amont en exigeant la notification, la divulgation et la consultation.
  • négocier des normes pour les entrepreneurs afin de décourager la privatisation et la sous-traitance.
  • mettre en place un processus permettant d’inverser la privatisation en rapatriant le travail à l’interne.

Chaque rubrique de ce guide présente des exemples de clauses recommandées qui ont été négociées ou obtenues par voie d’arbitrage par des sections locales du SCFP. L’exemple donné peut ne pas représenter l’article de convention collective ou la lettre d’entente dans son intégralité. Au-delà de ces exemples, les personnes conseillères nationales et le personnel de recherche du SCFP sont bien équipés pour aider chaque section locale à négocier la meilleure clause pour sa situation particulière.

Points à considérer

Une bonne convention collective contient diverses dispositions qui interagissent pour empêcher l’employeur de prendre des décisions néfastes comme celle de confier du travail en sous-traitance. Pour en limiter les impacts, on pourrait, entre autres, négocier des mesures de licenciement. Celles-ci protégeront aussi les emplois dans de nombreuses autres circonstances, en plus de pouvoir décourager l’employeur de sous-traiter le travail en rendant le processus de mise à pied coûteux et complexe. De bonnes dispositions sur les licenciements, ça protège les membres et les unités de négociation du SCFP. Voici quelques idées :

  • un préavis au syndicat.
  • l’occasion d’explorer conjointement des solutions de rechange au licenciement et, pour l’employeur, d’étudier les propositions du syndicat.
  • un préavis aux travailleuses et aux travailleurs concernés.
  • une exigence de redéploiement ou de réaffectation.
  • la supplantation en cascade, soit le droit de supplanter quelqu’un ayant moins d’ancienneté qui pourra supplanter quelqu’un ayant moins d’ancienneté et ainsi de suite.
  • des prestations complémentaires de chômage pour les personnes licenciées.

Les clauses concernant les licenciements et les rappels varient beaucoup d’un secteur et d’une région à l’autre. Consultez votre conseiller ou conseillère syndicale du SCFP pour connaître la clause recommandée dans votre situation.

Les clauses concernant la sous-traitance ont plus de poids si elles sont enchâssées dans la convention collective, puisqu’elles sont reconduites dans les conventions suivantes, à moins qu’on les modifie en négociation.

La lettre d’entente est utile lorsqu’il s’agit d’un évènement particulier ou ponctuel, comme le rapatriement à l’interne d’un service, d’une classe d’emplois ou d’un quart de travail bien précis. La lettre d’entente peut aussi convenir à une nouvelle pratique ou procédure introduite à titre d’essai pour la durée de la convention collective comme la divulgation et les réunions concernant les questions de privatisation. Par contre, les lettres d’entente doivent être réexaminées lors de la ronde de négociation suivante pour en évaluer l’efficacité, y apporter des ajustements et les intégrer au corps de la convention collective.

Les conséquences de la sous-traitance

Pour la sécurité d’emploi, la sécurité syndicale et la santé des services publics, il est essentiel qu’une convention collective comporte des clauses qui limitent la sous-traitance.

Sans cela, l’employeur peut sous-traiter du travail pour miner les salaires, les avantages sociaux, les dispositions relatives à l’ancienneté et d’autres droits enchâssés dans la convention collective. Cela a des conséquences désastreuses pour les membres du SCFP.

En général, un employeur attribue le contrat à l’entreprise qui promet le prix le plus bas pour faire le travail, un prix qui, la plupart du temps, repose sur le recours à du personnel non syndiqué à bas salaire. Souvent, cela fait chuter les salaires et les conditions de travail dans tout le secteur. En outre, la sous-traitance et le recours à l’entreprise privée fragmentent la main-d’œuvre.

Des personnes qui font un travail similaire dans le même lieu de travail se retrouvent à ne pas avoir le même salaire, les mêmes avantages sociaux et la même protection syndicale.

De plus, la sous-traitance diminue le nombre d’emplois dans l’unité de négociation, ce qui affaiblit le pouvoir de négociation du syndicat. Les moyens de pression comme la grève sont moins efficaces parce que l’employeur peut se tourner vers ses sous-traitants pour remplacer les grévistes. La sous-traitance, c’est aussi moins de personnes qui cotisent au régime de retraite. Et elle réduit le bassin de cotisations syndicales disponible pour défendre nos conditions de travail.

Lorsque notre travail est sous-traité, les services publics en souffrent. La reddition de comptes diminue et les services deviennent moins réactifs, car la communauté n’a que peu ou pas d’influence sur les actions des entreprises privées. L’implication d’un exploitant privé fausse les objectifs de prestation des services publics. Le privé, dans le but de maximiser ses profits ou de réduire ses coûts, fait passer l’intérêt public au second plan.

Il existe un mouvement qui gagne de l’élan pour renverser la sous-traitance en ramenant les services à l’interne. Le rapatriement à l’interne se produit souvent parce que l’employeur du secteur public ou le gouvernement se rend compte que les services sous-traités sont de mauvaise qualité, alors que les services internes coûtent moins cher tout en étant meilleurs.

Qu’il s’agisse d’empêcher la privatisation avant qu’elle ne se produise ou de rapatrier les services à l’interne, la protection et l’amélioration des services publics profitent autant au personnel qu’à la société. Ce guide aidera les sections locales à évaluer leur convention collective et à préparer un programme de négociation qui garantira que leur contrat de travail protège les emplois et les services le mieux possible.


Une remarque concernant la traduction : Le présent document est disponible en anglais et en français. Les passages explicatifs ont été traduits. Par contre, les articles de conventions collectives présentés dans le document anglais sont tirés de conventions collectives de langue anglaise, tandis que et le document français contient des articles tirés de conventions collectives de langue française.

Empêcher la privatisation : restrictions à la sous-traitance

Les sections locales du SCFP ne devraient pas se fier exclusivement aux dispositions concernant le « travail de l’unité de négociation » pour empêcher la sous-traitance. Bien que ces dispositions puissent être utilisées pour empêcher le personnel n’appartenant pas à l’unité de négociation ou la direction d’effectuer les tâches réservées à l’unité de négociation, l’opinion dominante des arbitres est que, pour empêcher l’employeur de sous-traiter des tâches, il faut disposer de restrictions spécifiques.

Le moyen de défense le plus efficace dans la convention collective est l’interdiction totale de sous-traiter le travail de l’unité de négociation. Le SCFP a négocié ce langage dans divers secteurs et provinces à travers le pays :

25.01 Afin d’assurer la sécurité d’emploi des membres de l’unité de négociation, l’employeur accepte que tout le travail ou tous les services rendus par les employées ne soient pas donnés en sous-traitance, transférés, loués, assignés ou cédés, en tout ou en partie, à une autre garderie, personne, entreprise ou employée qui ne fait pas partie de l’unité de négociation, sauf ce qui est prévu dans la présente entente.

SCFP 1543, Garderie Les Petits Amis Day Care Inc. – MB
1 juillet 2018–30 juin 2020

S’il n’est pas possible d’obtenir une interdiction complète de la sous-traitance dans la ronde de négociation actuelle, les sections locales du SCFP peuvent restreindre la sous-traitance en limitant sa portée et les circonstances dans lesquelles elle peut se faire. Voici les meilleures options suivantes, par ordre décroissant :

1. Pas de sous-traitance si les membres de l’unité peuvent effectuer le travail

Exemple d’article

28.01 L’Employeur convient qu’aucun travail exécuté actuellement par les salariés ne sera sous-traité, transféré, assigné, cédé en entier ou en partie à une personne, entreprise ou employé qui n’est pas couvert par le certificat d’accréditation. Toutefois, l’Employeur peut confier certaines tâches exécutées par les salariés à une personne qui n’est pas couverte par le certificat d’accréditation, si un tel travail est de courte durée, tel que précisé à l’article 3.02 de la présente convention collective, ou qu’il est fait dans un but de formation ou d’expérimentation ou, dans les cas d’urgence, lorsque les salariés réguliers ne sont pas disponibles en nombre suffisant et à condition que le travail ainsi accompli ne réduise pas, en soi, les heures de travail ou le salaire d’un salarié.

SCFP 1853, Compagnie du cimetière Saint-Charles – QC
1 décembre 2017–30 novembre 2023

2. Pas de sous-traitance sauf en cas d’urgence

Exemple d’article

24.01 Afin d’assurer la sécurité d’emploi des membres de l’unité de négociation, l’employeur s’engage à ne pas faire appel à la sous-traitance, venant d’un autre établissement, personne, entreprise ou employée ne faisant pas partie de l’unité de négociation. En cas d’urgence, le recours à une bénévole ou à une personne ne faisant pas partie de l’unité de négociation est permis, jusqu’à ce que l’on puisse obtenir les services d’une employée membre de I’unité de négociation.

SCFP 4666, Le Centre Éducatif Félix Le Chat – SK
1 septembre 2013–31 août 2019

3. Pas de sous-traitance si celle-ci diminue la taille de l’unité de négociation, réduit les horaires de travail ou entraîne des mises à pied

Exemples d’articles

2.03 Aucun employé régulier ou temporaire ne sera congédié, mis à pied ou ne subira de baisse de salaire ou de réduction d’heures de travail par suite d’attribution de travaux à forfait ou en sous-traitance ou d’entente de partenariat entre l’entreprise privée et la Ville.

SCFP 2684, Ville de Métabetchouan–Lac-à-la-Croix (Bureau et métiers) – QC
1 janvier 2017–31 décembre 2022

Remarque : La clause doit protéger le travail et les postes de l’unité de négociation, et non seulement les membres actuels de l’unité de négociation. Si seuls les membres actuels sont protégés (par exemple, pas de réduction des horaires ou de mises à pied), cela n’empêche pas l’employeur de diminuer la taille de l’unité de négociation par attrition, soit en ne remplaçant pas les membres licenciés ou qui partent à la retraite, tout en sous-traitant le travail de l’unité de négociation.

35.03 L’attribution de sous-contrat pour du travail ou service exécuté par les salariés assujettis à l’accréditation syndicale ne peut entraîner l’abolition de poste, de mise à pied ou de baisse de salaire des salariés.

SCFP 4781, Le SCF Saguenay-Lac-St-Jean Inc. – QC
1 août 2016–31 juillet 2021

4. Pas de sous-traitance si cela entraîne la mise à pied de certains membres du personnel

On peut préciser un groupe de membres en fonction de la durée de service ou de l’ancienneté :

Exemple d’article

Aucune personne salariée ayant douze (12) mois et plus d’ancienneté ne sera congédiée, mise à pied, renvoyée ou licenciée, ni ne subira de baisse de salaire par suite ou à l’occasion :

  • d’améliorations techniques ;
  • d’améliorations technologiques ;
  • de changements dans les structures administratives ;
  • de changements dans les procédés de travail ;
  • de changements de l’équipement ;
  • de sous-contrats ;
  • de réorganisation d’un secteur de travail

SCFP 1604-00, École Polytechnique de Montréal
12 septembre 2018 – 31 mai 2022

On peut aussi spécifier un groupe de membres en fonction du statut d’emploi (le personnel permanent, par exemple) :

Exemple d’article

9.1 Aucun employé permanent ne sera congédié ni mis à pied et ne subira de baisse de salaire ou d’heures de travail par suite ou à l’occasion d’améliorations techniques ou technologiques ou de modifications quelconques dans les structures ou le système administratif de la Municipalité ainsi que dans les procédés de travail ou surplus de personnel.

SCFP 3156, Municipalité d’Entrelacs (Bureau et métiers) – QC
1 janvier 2019–31 décembre 2023

Remarque : Cette clause pourrait créer des disparités de traitement dans l’unité de négociation, où certains membres ont des droits inférieurs en matière de sécurité d’emploi. Les sections locales du SCFP ayant ce type d’article « à deux niveaux » sur la sous-traitance devraient s’efforcer de l’améliorer pour en faire une restriction qui protège l’ensemble des membres de l’unité de négociation. Pour en savoir plus, lisez la politique du SCFP intitulée « Résister aux concessions et aux disparités de traitement et défendre la libre négociation collective – Aller de l’avant ».

5. L’employeur peut sous-traiter, mais il doit prendre certaines mesures pour atténuer l’impact sur le personnel déplacé

Exemples d’articles

18.01 Dans le cas où l’employeur confierait à des sous-traitants le travail régulier présentement accompli en totalité ou en partie par les salariés actuellement à son emploi, les salariés ainsi concernés seront appelés à d’autres travaux durant une période de dix-huit (18) mois suivant la signature du contrat entre l’employeur et le sous-traitant, après quoi, s’il devient nécessaire de procéder à des mises à pied, les dispositions de la présente convention s’appliquent.

Il est toujours loisible à l’employeur de donner à forfait des contrats à la condition toutefois que cela ne diminue pas le nombre de personnes salariées régulières et n’entraîne aucune mise à pied ni baisse de salaire.

SCFP 1390, Ville de La Sarre (Métiers) – QC
1 janvier 2019–31 août 2024


29.01 L’Employeur ne devra pas avoir recours à des entrepreneurs indépendants pour accomplir du travail que font normalement les employés membres de l’unité de négociation s’il en résulte la mise à pied d’employés, exception faite d’employés occasionnels à temps partiel. L’impartition d’un contrat à un employeur qui engagera les employés de l’unité de négociation qui, autrement, auraient été mis à pied, ne constitue pas une infraction à la présente disposition.

SCFP 3101, Maison-Mère Des Soeurs de la Charité d’Ottawa (Service) – ON
1 janvier 2015–31 décembre 2019

N’oubliez pas qu’un certain niveau de protection contre la sous-traitance vaut mieux que rien du tout et qu’on pourra améliorer cet article lors des rondes de négociation suivantes.

Les conseillers et conseillères du SCFP peuvent vous indiquer les clauses négociées restreignant la sous-traitance dans votre secteur ou votre province.

Empêcher la privatisation : notification, consultation et divulgation

Négocier l’obligation pour l’employeur de partager l’information et d’informer le syndicat à l’avance au sujet de ses projets de privatisation peut aider le SCFP et ses alliés communautaires à s’organiser pour contester ces projets. Plus la période de préavis est longue, plus la section locale dispose de temps pour communiquer avec ses membres, faire des recherches, former des coalitions, exercer des pressions sur la classe politique et exposer les faussetés et les coûts cachés dans l’argumentaire de l’entrepreneur. Ces étapes, prises ensemble, s’inscrivent dans une campagne gagnante pour garder les services dans le giron public. L’article concernant l’avis de projet de privatisation peut inclure :

  • tous les renseignements sur un service que les membres fournissent actuellement et qui fait l’objet d’un examen en vue d’une éventuelle privatisation.
  • tous les renseignements sur un nouveau service ou une nouvelle installation qui serait normalement inclus dans la gamme de services fournis par l’organisation et par les membres du SCFP.

Exemple d’article

Appels d’offre

29.05 L’employeur informe le syndicat de tout appel d’offres entrepris par l’établissement ayant pour effet de soustraire directement ou indirectement partie ou totalité des tâches accomplies par les personnes salariées couvertes par l’accréditation, et ce, au moins trente (30) jours avant la publication de l’avis d’appel d’offres.

Conseil provincial des affaires sociales (CPAS) – QC
10 juillet 2016–31 mars 2020

En plus d’une période de préavis, les sections locales du SCFP devraient négocier une exigence de consultation qui leur donne l’occasion de discuter avec l’employeur de son intention de sous-traiter le travail de l’unité de négociation.

Exemple d’article

28.02 Pour les travaux à être confiés en sous-traitance, les parties s’en remettent préalablement à ce qui suit :

a) Un comité chargé d’étudier et de proposer toutes recommandations respectant les intérêts mutuels des contribuables, de l’administration municipale et des employés municipaux, est formé.

b) Ce comité est composé de deux (2) membres du Syndicat, d’un (1) membre de l’administration et un (1) membre du conseil municipal.

c) Chaque partie peut s’adjoindre une personne ressource au besoin.

d) Ce comité reçoit toutes les informations pertinentes relatives à la préparation de devis, soumission et à l’évaluation de besoins ayant pour but de pourvoir la Ville de services pour lesquels elle possède déjà une expertise technique, humaine ou matérielle incluant la location d’équipement.

e) Ce comité se réunit au besoin pour poursuivre le mandat qui Iui est confié et fait part de ses conclusions et recommandations au conseil municipal avant que celui-ci s’engage dans la procédure d’acquisition de service en sous-traitance.

SCFP 2468, Ville de Dolbeau-Mistassini (Bureau et métiers) – QC
1 janvier 2015–31 décembre 2020

La sous-traitance sert fréquemment à privatiser des services publics. Les clauses de notification, de divulgation et de consultation peuvent couvrir d’autres formes de privatisation, comme les partenariats public-privé (PPP), l’obligation à impact social ou la diversification des modes de prestation des services. Ces dispositions peuvent inclure les exigences suivantes :

  • L’employeur doit aviser le syndicat de toute proposition de PPP dans un délai déterminé.
  • L’employeur doit divulguer tous les renseignements concernant une proposition de PPP au syndicat dans un délai déterminé.
  • L’employeur doit consulter le syndicat sur la proposition de PPP avant son adoption, notamment en donnant au syndicat la possibilité de répondre officiellement à la proposition par écrit.

Si l’employeur a sous-traité du travail, la section locale devrait négocier une clause exigeant un examen conjoint périodique des tâches sous-traitées qui pourraient être couvertes par la convention collective. Cela devrait inclure la divulgation d’informations sur l’entrepreneur, la durée et le coût du contrat, ainsi que le coût de la négociation, de l’administration et de la supervision du contrat. Ces informations peuvent aider le SCFP à préparer un dossier pour rapatrier les tâches sous-traitées à l’interne.

Pour monter un dossier en faveur du rapatriement à l’interne, il faut démontrer la valeur du service rendu à l’interne. Les sections locales du SCFP ne devraient pas participer à un processus d’appel d’offres concurrentiel, puisque cela entrerait en conflit avec notre rôle d’agent négociateur. Soumettre une offre pour la prestation de services sape le processus de négociation collective en faisant pression sur les syndicats pour qu’ils réduisent le coût des services et fassent des concessions.

Exemple d’article

21.04 Comité sous-traitance

A. Ce comité est composé de trois (3) représentants de l’Employeur et de trois (3) représentants du Syndicat membres du comité de relation de travail.

B. Le comité se réunit dans les dix (10) jours de la demande d’une des parties.

C. Le comité a comme objectifs d’étudier des alternatives au recours à la sous-traitance et de formuler des recommandations à la direction générale.

D. Les bases d’analyse pour fins de comparaison doivent tenir compte des lois, règlements ou décrets régissant l’exécution des travaux concernés.

E. Les recommandations du comité doivent s’appuyer principalement sur les critères suivants : la qualité du service, l’efficacité du service, le coût du service incluant les coûts d’immobilisation requis, les frais de gestion et les délais d’exécution, de façon à s’assurer que le citoyen bénéficie d’un service de qualité.

Les recommandations du comité peuvent être accompagnées de propositions visant à modifier la convention collective.

SCFP 308, Ville de Saint-Jérôme (Cols bleus) – QC
1 janvier 2014–31 décembre 2018

Empêcher la privatisation : obligations du sous-traitant

Là où les sections locales n’ont pas réussi à interdire complètement la sous-traitance, on peut inclure dans la convention collective un article qui impose des obligations aux sous-traitants. Cela peut constituer un obstacle important à la privatisation et à la sous-traitance. Les sections locales peuvent négocier une disposition exigeant que l’employeur n’utilise que des entrepreneurs qui répondent à des normes d’emploi spécifiques.

On peut aussi obliger l’employeur à exiger de l’entrepreneur qu’il emploie les membres déplacés du SCFP et, ce faisant, à reconnaître la section locale du SCFP comme l’agent négociateur de ces personnes et à appliquer la convention collective qui les protégeait avant la privatisation.

Exemple d’article

10.02 SOUS-TRAITANCE

Malgré ce qui précède, l’hôpital peut sous-traiter du travail habituellement accompli par des membres de l’unité de négociation sans que cela n’entraine de violation de la présente disposition, à condition que dans le contrat qu’il conclue à cet effet avec le sous-traitant initial et tout sous-traitant subséquent, celui-ci s’engage à :

(1) confier le travail sous-traité au personnel de l’hôpital ainsi mis en disponibilité;

(2) ce faisant, en ce qui a trait à ce travail, se substituer à l’hôpital aux fins de la convention collective le liant au syndicat et conclure une entente avec le syndicat à cet effet.

Afin d’assurer la conformité à la présente disposition, l’hôpital s’engage à retirer toute sous-traitance à un entrepreneur qui ne satisfait pas aux conditions de celle-ci énoncées ci-dessus.

Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario (CSHO) – ON
Convention collective uniforme visant le personnel à temps plein et à temps partiel
28 septembre 2017–28 septembre 2021

On peut aussi exiger que l’employeur oblige tout entrepreneur à fournir un salaire et des avantages sociaux minimaux afin de maintenir une norme de rémunération uniforme.

Exemple d’article

29.03 Dans le cas de travaux accomplis par les personnes salariées dans les services de l’entretien ménager, de l’alimentation (cuisine et cafétéria) et des soins infirmiers, les contrats d’entreprise à être adjugés par l’employeur ou renouvelés par lui, devront prévoir que le taux de salaire et les bénéfices marginaux à être octroyés aux personnes salariées d’un sous-traitant travaillant chez l’employeur devront être comparables globalement aux taux du marché dans le secteur hospitalier pour les mêmes titres d’emploi.

Sont présumés comparables globalement, les taux de salaires et les bénéfices marginaux pour les personnes salariées d’un sous-traitant dont les taux de salaires et les bénéfices marginaux sont déterminés par convention collective.

Conseil provincial des affaires sociales (CPAS) – QC
10 juillet 2016–31 mars 2020

Inverser la privatisation : clauses de rapatriement à l’interne

Le rapatriement de tâches à l’interne est une autre façon de lutter contre la sous-traitance et la privatisation.

Négocier un processus de rapatriement implique généralement :

  • d’obtenir que l’employeur divulgue toutes les informations sur les services actuellement sous-traités.
  • d’obtenir un engagement envers un examen conjoint des travaux sous-traités qui pourraient être exécutés par les membres de l’unité de négociation.
  • d’obtenir un engagement à considérer les propositions du syndicat concernant le rapatriement à l’interne.

Exemples d’articles

6-4.05 Le mandat du sous-comité est notamment :

  • de procéder à l’analyse des coûts reliés aux travaux donnés à forfait et de les comparer avec les couts à l’interne dans l’hypothèse où ces travaux seraient effectués par les salariés;
  • d’étudier les motifs pour lesquels l’Employeur privilégie, le cas échéant, l’attribution de travail à forfait;
  • d’étudier tout projet de travaux qui pourraient être faits en régie interne;
  • de rechercher dans la révision des procédures de travail, par l’aménagement des conditions de travail ou par tout autre élément, des alternatives privilégiant l’exécution des travaux par les salariés;
  • de faire toute recommandation appropriée aux autorités compétentes de la Ville, relativement à l’octroi de travail à forfait ou de transfert à l’interne de travaux déjà attribués à forfait;
  • de collaborer au suivi de tous travaux qui pourraient être ainsi transférés, le cas échéant, du secteur privé à l’interne, suivant les décisions du Conseil de la Ville.

SCFP 2334, Ville de Lévis (Cols bleus et brigadiers scolaires) – QC
9 juillet 2015–31 décembre 2019


8.03 Faisant suite à la disposition 8.01c) i) 1), les parties conviennent que le comité des réaffectations pourra entreprendre l’examen de tout poste doté en sous-traitance qui relèverait autrement de l’unité d’accréditation, et qui pourrait venir à échéance et être ouvert à une renégociation dans les six (6) mois, dans la perspective de l’évaluation de l’aspect pratique et de la mesure dans laquelle il serait rentable de faire faire le travail à l’interne par des membres de l’unité d’accréditation.

SCFP 4721, L’Hôpital Montfort (Techniciens de laboratoire, de radiologie et des services respiratoires, polysomnographie, EEG et laboratoire du sommeil) – ON
1 avril 2019–31 mars 2022

Pour rapatrier des tâches à l’interne, il est possible dans certaines juridictions de négocier la portée de la convention collective (ou la reconnaissance de l’unité de négociation). On peut par exemple inclure une installation ou un nouveau service, ou encore ajouter un nouveau quart de travail, une nouvelle classe d’emploi ou un nombre de membres supplémentaires qui effectueront les tâches rapatriées à l’interne. Ce type de mesure doit être compatible avec l’accréditation et notre marge de manœuvre à cet égard dépend de la législation applicable.

Les sections locales devraient consulter leur conseiller ou conseillère syndicale pour s’assurer que la portée de l’accréditation soit compatible avec les clauses négociées.

Conclusion

Dans nos efforts pour protéger et améliorer les services publics et pour sauvegarder les bons emplois syndiqués, il est essentiel de disposer d’une bonne convention collective. La prévention et l’inversion de la privatisation sont une partie importante du cycle de négociation de nos sections locales. Cela fait aussi partie de notre travail quotidien en tant que militantes et militants syndicaux. Chaque membre a un rôle à jouer dans la protection des bons emplois et des services publics de qualité.

Défendre nos conventions collectives, les faire respecter entre les rondes de négociation est tout aussi important que de négocier une bonne clause. Les membres doivent être à l’affût, faire respecter leur convention collective et déposer des griefs lorsqu’il y a violation. Les personnes déléguées syndicales jouent un rôle clé dans cette défense en communiquant à la section locale les menaces qui pèsent sur leur convention et les moyens de renforcer celle-ci.

L’application stricte des clauses d’interdiction de sous-traitance et des autres dispositions empêchant la privatisation envoie un message fort aux employeurs : les membres du SCFP défendront toujours les bons emplois et les services publics de qualité.

En fin de compte, ce sont les conventions collectives les plus solides qui bénéficient du soutien de la communauté. Les membres du SCFP doivent continuer à bâtir une culture d’engagement politique des membres, à renforcer les coalitions et à participer à des campagnes avec leurs alliés communautaires pour défendre et promouvoir les services publics. Cette approche crée la solidarité dont les membres du SCFP ont besoin lorsqu’ils se mobilisent pour lutter contre la privatisation et la sous-traitance à l’aide de leur convention collective.

Ressources

Pour obtenir des cours sur la négociation collective et des ressources sur la privatisation, communiquez avec le personnel de l’éducation syndicale du SCFP de votre région à scfp.ca/education-syndicale.

Vous trouverez aussi des nouvelles et des ressources au scfp.ca/privatisation, dont de l’information sur les différentes formes de privatisation, des outils pour repérer les signes avant-coureurs de privatisation et y réagir, ainsi que des exemples de services rapatriés à l’interne. Les ressources clés comprennent :

Téléchargez le guide