Lors d’une conférence de presse tenue aujourd’hui, la Coalition ontarienne de la santé (OHC), l’Advocacy Centre for the Elderly (ACE) et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) ont annoncé qu’ils intensifiaient leur appel à une enquête officielle de la Commission ontarienne des droits de la personne sur la discrimination systémique contre les personnes âgées dans la prestation des soins de santé en Ontario.
Cela fait longtemps qu’une enquête publique en vertu du Code des droits de la personne est nécessaire, mais la situation presse encore plus depuis le dépôt du projet de loi 7 du gouvernement Ford, la Loi de 2022 pour plus de lits et de meilleurs soins, qui suspend de façon permanente le droit des personnes âgées au consentement. S’il est adopté, ce projet de loi exacerbera profondément les politiques de santé du gouvernement ontarien qui exercent une discrimination omniprésente et de longue date fondée sur l’âge. Dans une lettre adressée au commissaire aux droits de la personne de l’Ontario, les groupes ont renouvelé leur demande pour que la commission enquête sur la discrimination systémique contre les personnes âgées dans la prestation des soins de santé.
« Le nouveau projet de loi du gouvernement Ford cible les personnes âgées fragiles et vulnérables, anéantissant leur droit au consentement éclairé à leurs soins de santé », résume Natalie Mehra, directrice générale de la Coalition ontarienne de la santé. « C’est une question fondamentale de justice. Les patientes et patients âgé(e)s n’accaparent pas plus de ressources que les autres. C’est de la cruauté par l’âgisme, point final. La Commission ontarienne des droits de la personne doit agir. »
En vertu du projet de loi 7, un patient désigné comme autre niveau de soins (ANS) pourra être transféré dans un établissement de soins de longue durée (SLD) sans son consentement. S’il résiste au transfert, on pourra lui facturer des centaines, voire des milliers de dollars par jour passé à l’hôpital.
« Nous avons déjà exprimé de vives inquiétudes concernant l’abus de la désignation ANS pour les personnes âgées sans porter une attention suffisante et individualisée à leurs besoins particuliers en matière de soins », affirme Graham Webb, directeur général de l’Advocacy Centre for the Elderly. « Les patients désignés ANS sont régulièrement traités comme des “bloqueurs de lits” qui n’ont pas besoin de soins hospitaliers. Ils se voient systématiquement refuser un accès équitable aux soins financés par l’État dans cette province. Les personnes âgées ont elles aussi besoin de meilleures alternatives aux soins de longue durée, des options qui les aideraient à éviter l’hospitalisation et les soins de longue durée plus longtemps, sinon entièrement. »
L’OHC, l’ACE et le SCFP demandent à nouveau à la Commission ontarienne des droits de la personne d’utiliser les pouvoirs d’enquête publique que lui confère l’article 31 du Code des droits de la personne pour enquêter sur la discrimination systémique contre les personnes âgées dans la prestation de soins de santé en Ontario.
« Il ne fait aucun doute que les hôpitaux de la province sont mis à rude épreuve et que l’accès aux services de santé est ralenti par une grave pénurie de personnel », ajoute Michael Hurley, président du Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario (CSHO-SCFP). « Mais ce n’est pas la faute des patientes et patients ANS; leur transfert forcé ne permettra pas d’ajouter ne serait-ce qu’un seul poste. Les personnes âgées ANS servent de bouc émissaire pour détourner l’attention du sous-financement des hôpitaux, qui dure depuis des décennies, une tendance que les conservateurs comptent prolonger pendant encore cinq ans. Le fait que ces transferts forcés impliquent la suspension du droit au consentement aux soins et l’absence de droit d’appel justifie certainement une enquête sur les droits de la personne. »
L’Ontario est la province canadienne qui possède le moins de lits d’hôpitaux par tranche d’habitants. Si elle était un pays, elle se classera parmi les trois dernières places de tous les pays de l’OCDE. D’un côté, le gouvernement applique la politique de réduction des effectifs hospitaliers la plus extrême du monde développé; de l’autre, il sous-finance systématiquement le système de soins de longue durée. L’Ontario se classe avant-dernière parmi toutes les provinces pour le nombre de lits de SLD par tranche d’habitants; elle affiche une liste d’attente de plus de 30 000 noms.
Le gouvernement Ford accuse carrément les personnes âgées de « rester trop longtemps » à l’hôpital, mais les organismes de défense des personnes âgées l’accusent d’être à l’origine de cette crise. Refuser aux personnes âgées des soins hospitaliers appropriés et les renvoyer dans des établissements aux ressources très insuffisantes est non seulement inhumain et inefficace, mais aussi profondément discriminatoire. « Envers nos aînés, la Commission des droits de la personne de la province a l’obligation d’agir. C’est pourquoi nous renouvelons notre appel à une enquête », déclarent-ils.
Au printemps 2021, à la suite du décès de milliers de résidentes et résidents vulnérables des SLD au cours de la première et de la deuxième vague de la pandémie de COVID-19, l’ACE, l’OHC et le CSHO-SCFP avaient officiellement demandé à la Commission ontarienne des droits de la personne d’ouvrir une enquête sur la discrimination systémique de l’Ontario contre les personnes âgées dans l’accès aux soins de santé.