Le SCFP craint que les consultations du fédéral visant à mettre à jour la stratégie canadienne sur l’intelligence artificielle aient été précipitées et favorisent les intérêts des entreprises privées aux dépens des autres voix.
Dans une lettre au ministre de l’Intelligence artificielle et de l’Innovation numérique Evan Solomon, notre syndicat prévient que la nouvelle stratégie ne répondra probablement pas aux besoins des travailleuses et travailleurs et ne protégera pas l’intérêt collectif. Non seulement la consultation a été très rapide, mais les grandes entreprises en ont monopolisé l’essentiel, et le groupe de travail nommé pour établir la stratégie manque de représentativité.
Le gouvernement fédéral a en effet tenu en octobre dernier une consultation-éclair, puis constitué un groupe de travail chargé de mettre à jour la stratégie canadienne sur l’IA.
Bien que le gouvernement ait nommé une personne pour représenter le SCFP au sein du Groupe de travail sur la stratégie en matière d’IA, il a exclu plusieurs autres groupes et expert(e)s, notamment des syndicats, des organisations de la société civile et des chercheuses et chercheurs en IA et travail, gouvernance de l’IA, vie privée et droits de la personne.
Le SCFP demande que la consultation soit prolongée et élargie pour garantir un processus plus représentatif et équitable.
Le mémoire du SCFP lié à la consultation fait des recommandations concernant cinq grands domaines.
Élaborer des lois et règlements exhaustifs
Le gouvernement fédéral devrait exiger :
- une approche transparente lorsque des systèmes d’IA sont introduits en milieu de travail;
- des restrictions et des mesures de protection relativement à l’utilisation d’algorithmes pour la gestion des employé(e)s;
- des lois rigoureuses en matière de protection des données et de la vie privée, qui préservent la dignité et l’autonomie des travailleuses et travailleurs.
Investir dans l’infrastructure publique d’IA
Le gouvernement fédéral devrait investir dans la technologie publique d’IA, y compris l’infrastructure infonuagique, les systèmes de gestion des données et les modèles et applications d’IA.
La propriété publique favorise la responsabilité et la transparence en plus de servir l’intérêt collectif. Elle renforce également la souveraineté numérique du Canada et, par le fait même, notre capacité à contrôler l’infrastructure, les services et les données numériques qui ont une incidence sur la démocratie, l’économie et la société.
Consulter largement et soutenir le milieu de la recherche
Le gouvernement fédéral devrait consulter en priorité les syndicats, les chercheuses et chercheurs universitaires, la société civile et les autres groupes concernés.
Il devrait aussi créer un observatoire sur le travail et l’IA et des groupes sectoriels qui étudieraient l’impact de cette technologie sur les emplois, les services publics, les biais et la discrimination, ainsi que la vie privée.
Investir dans l’éducation, la formation et un filet de sécurité sociale solide
Le gouvernement fédéral devrait investir dans l’éducation à la littératie numérique pour les travailleuses et travailleurs ainsi que la population, et dans la formation et le recyclage professionnel pour les fonctionnaires qui utilisent l’IA.
Le gouvernement fédéral devrait aussi consolider les mesures de sécurité sociale mises en place comme l’assurance-emploi pour les travailleuses et travailleurs qui seront remplacé(e)s par l’IA.
Protéger notre réseau énergétique et l’environnement
Le gouvernement fédéral devrait gérer la croissance des centres de données pour assurer la sécurité et la viabilité de notre réseau énergétique et atteindre les objectifs du Canada en matière de changements climatiques.
Il faut veiller à ce que les avantages de l’évolution technologique profitent aussi aux travailleuses et travailleurs, ainsi qu’au reste de la population. Cela ne se concrétisera que si les gouvernements du Canada, à commencer par le gouvernement fédéral, mettent en place des mesures de protection pour limiter les risques liés aux technologies numériques comme l’IA.