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Principales mesures du budget

Dans un contexte où les économies mondiales sont en sévère récession et où le sort du gouvernement canadien est en jeu, le budget fédéral de 2009 était attendu avec impatience. Ce budget devait stimuler l’économie et aider les Canadiens à faire face au ralentissement économique, protéger les plus vulnérables et maintenir et créer des emplois en relançant l’économie.

Le budget a-t-il atteint ses objectifs?

  1. stimulation de l’économie
  2. protection des plus vulnérables
  3. maintien et création d’emplois en relançant l’économie

Stimulation de l’économie

Pour stimuler l’économie, le budget devait fournir des incitatifs financiers équivalant à 2 % de la production économique annuelle (PIB ou produit intérieur brut), comme l’avait fortement recommandé le Fonds monétaire international (FMI). Le FMI, la Banque mondiale et la plupart des économistes proposaient également que, pour avoir un maximum d’impact et d’avantages, la plupart des mesures de stimulation devaient porter sur la protection sociale, les emplois, l’investissement dans l’infrastructure et le soutien aux faibles revenus.

L’efficacité de ces mesures de stimulation économique doit être mesurée tant par leur ampleur que par leur impact probable.

Ampleur

Le budget prévoit des baisses d’impôt, des dépenses en infrastructure et d’autres engagements de dépenses totalisant autour de 18 milliards de dollars pour 2009-2010, et 15,5 milliards de dollars pour 2010-2011. Ces mesures équivalent à environ 1 % de la production économique du Canada de 1,5 billion de dollars par année, ou seulement la moitié de la cible de 2 % proposée par le FMI.

En comparaison, le président Obama vient d’annoncer un plan de reprise et de réinvestissement (American Recovery and Reinvestment Plan) de 825 milliards de dollars, des mesures qui équivalent à près de 3 % du PIB des États-Unis, avec l’objectif de créer plus de 3 millions d’emplois.

Impact

Comme prévu, le budget insiste lourdement sur l’investissement dans l’infrastructure publique, qui compte pour 29 % de la valeur totale des nouvelles mesures. Cet élément est positif compte tenu du fort effet de stimulation économique (« multiplicateur ») de l’infrastructure, des importants déficits en infrastructure du Canada et des revenus limités des municipalités et d’autres organismes du secteur public.

Le budget accorde aussi une place importante à la construction résidentielle. Ce type de mesure peut avoir un effet de stimulation relativement fort et aider les plus vulnérables, surtout si on accorde du financement au logement social. Le budget prévoit 1 milliard de dollars par année pour le logement social, la moitié étant consacrée à la rénovation et à la mise à niveau d’unités existantes. C’est un bon début, mais il faudrait 2 milliards par année pour de nouveaux logements à coût abordable, selon les militants en logement. Par ailleurs, le budget prévoit presque le double (3,7 milliards de dollars sur deux ans) en crédits d’impôt pour la rénovation résidentielle, l’achat d’une maison et les mises à niveau. On peut se demander si ces crédits d’impôt stimuleront une activité additionnelle, ou s’ils ne feront qu’offrir un avantage fiscal pour des travaux qui auraient été réalisés de toute façon.

Le budget accorde un soutien limité à la protection sociale et aux personnes à faible revenu (voir ci-dessous) et ce qui est accordé est contrebalancé par la réduction des transferts de péréquation.

De même, le budget déçoit en ce qui a trait à la protection ou à la création d’emplois (voir ci-dessous).

Il prévoit plutôt plus de 5 milliards de dollars en baisses d’impôt, tant aux personnes qu’aux entreprises, pour 2009-2010 et de près de 3 milliards de dollars pour 2010-2011. Ces baisses d’impôt équivalent à 25 % de la valeur des mesures de stimulation dans le budget et avantagent ceux dont le revenu est plus élevé.

Par exemple, les changements apportés aux montants personnels et aux tranches d’imposition ne réduiront les impôts que de 66 $ par année pour une famille typique à deux revenus et deux enfants et qui gagnent moins de 60 000 $ par année. Entretemps, une famille similaire avec des revenus annuels de plus de 200 000 $ obtiendra une baisse d’impôt de 634 $ par année. Puisque ceux qui disposent de revenus plus élevés épargnent une plus grande partie de leur argent, les baisses d’impôt personnel et d’entreprise ne stimulent pas beaucoup par rapport à des dépenses et à des investissements publics directs, ou à un soutien destiné aux familles à faible revenu.

L’investissement et les dépenses publiques ont beaucoup d’effets sur l’économie et sur les emplois de deux à trois fois plus importants que les baisses d’impôt personnel, et encore plus sur le ratio des baisses d’impôts des sociétés.

Un investissement de 1 milliard de dollars en éducation de la petite enfance et en services de garde à l’enfance créerait 40 000 emplois, 1 milliard de dollars investi dans la santé créerait 18 000 emplois et 1 milliard de dollars investi dans l’infrastructure créerait autour de 15 000 emplois. Un milliard de dollars investi en baisses d’impôt personnel ne crée que 6 000 emplois.

L’économie du Canada devrait subir un déclin de 1,2 % cette année, selon la Banque du Canada. Le budget de l’année dernière prévoyait que l’économie connaîtrait une croissance de 2,4 % en 2009. Tant la Banque du Canada que le gouvernement fédéral prévoient une récession courte et forte, suivie d’une reprise solide de l’économie en 2010 et dans les années subséquentes. La plupart des autres prévisionnistes croient que la reprise viendra plus tard et sera plus lente. Par exemple, le FMI s’attend à ce que l’économie du Canada croisse de 1,6 % en 2010 comparativement aux prévisions de 2,4 % du ministre des Finances et de 3,8 % de la Banque du Canada.

L’impact économique direct du budget devrait être relativement modeste. Il devrait stimuler le PIB du Canada de 1,2 % cette année et de 0,1 % en 2010, pour une hausse totale de 1,4 % en deux ans. Si on ajoute « l’effet levier » des dépenses additionnelles des provinces et des municipalités, l’impact augmente à 1,6 % en 2009 et à 0,2 % en 2010. Toutefois, on peut se demander quelle proportion de ces dépenses faites par d’autres instances de gouvernement seront additionnelles, surtout pour les municipalités qui sont sérieusement à court d’argent.

Il sera impossible de déterminer si les mesures que contient le budget auront l’effet de stimulation affirmé par le gouvernement : le budget comprend une hypothèse de planification pour la croissance économique qui est encore plus pessimiste et qui, d’une certaine façon, rend difficile la comparaison.

Note : D- pour l’ampleur des mesures de stimulation (dépenses directes égales à la cible de 52 % de la cible du FMI) D+ pour le type de mesures de stimulation (bon pour l’infrastructure, mais le soutien à l’AE, aux faibles revenus et à la protection sociale est très limité)

Protection des plus vulnérables

Le deuxième plus important objectif de ce budget aurait dû être la protection des plus vulnérables pendant le ralentissement économique. Le filet de sécurité sociale du Canada s’étiole de plus en plus.

À cause des compressions imposées au programme d’AE, des exigences d’admissibilité plus strictes et de la réduction des prestations, seulement 40 % des chômeurs reçoivent maintenant des prestations d’AE et ces prestations sont limitées à 435 $ par semaine. L’aide sociale a encore baissé par rapport au seuil de pauvreté. Les services sociaux, communautaires et autres subissent des pressions encore plus fortes pendant une période de ralentissement économique.

La crise financière a entraîné d’énormes pertes et a suscité une insécurité économique croissante chez les retraités et ceux qui épargnaient pour leur retraite grâce à un régime de retraite au travail ou individuel. De plus en plus de personnes comptent désormais sur les régimes de retraite publics, qui doivent être bonifiés.

Malheureusement, le budget prévoit un soutien limité pour les mesures de protection des plus vulnérables contre le ralentissement économique.

Le soutien se limite à une hausse de la prestation fiscale pour le revenu gagné pour les travailleurs pauvres, une prolongation du nombre de semaines prévu pour les prestations d’assurance-emploi (AE), une hausse des fonds destinés à la formation et un soutien accru aux Canadiens autochtones et des Premières nations, bien que la majeure partie de ce financement se fasse par l’entremise de l’infrastructure.

Aucun changement n’est proposé pour rendre l’AE plus accessible ni pour hausser les niveaux de prestations; il n’y a rien non plus pour bonifier les retraites publiques pour les personnes âgées à faible revenu ou pour protéger les régimes de retraite au travail; il n’y a pas d’augmentation de la prestation fiscale pour enfants pour les familles à faible revenu; il n’y a rien pour soutenir les efforts de réduction de la pauvreté, rien pour les garderies; et aucune hausse des transferts aux provinces pour les services sociaux et publics. La plupart des chômeurs à faible revenu qui n’ont pas accès à l’AE ne trouveront rien pour eux dans ce budget.

En même temps, les transferts fédéraux pour le programme de péréquation, qui assurent un financement aux provinces les plus pauvres afin qu’elles puissent offrir des services publics, seront limités et augmenteront au même rythme que l’économie, comme ce qui avait été proposé d’abord dans l’énoncé économique de novembre. Au cours des deux prochaines années, il y aura donc 7 milliards de dollars de moins dans les transferts destinés aux provinces les plus pauvres pour leur permettre de maintenir la qualité de leurs services publics.

Note : F+

Maintien et création d’emplois par la relance de l’économie

L’autre grande priorité du budget aurait dû être le maintien et la création d’emplois par la relance d’une économie de l’avenir. Nous avons bénéficié de taux de chômage faibles au cours des dernières années parce que notre économie naviguait sur la vague de prospérité des secteurs du logement, des ressources et des finances. Mais en même temps, les industries manufacturière et forestière du Canada étaient en crise, la croissance économique devenait de plus en plus inégale et notre productivité stagnait.

Maintenant que ces bulles ont éclaté, les gens perdent leurs emplois et leurs épargnes et les collectivités souffrent. Le taux de chômage devrait augmenter à près de 8 % l’année prochaine. Autrement dit, environ 350 000 autres personnes perdront leur emploi par rapport à 2008. Outre la souffrance humaine et les occasions perdues, le chômage plus élevé entraînera plus de faillites, moins d’activité économique pour les entreprises et, pour les gouvernements, moins de revenus et plus de coûts.

Ce budget aurait dû reconnaître le problème et élaborer un plan stratégique pour maintenir et créer des emplois en rebâtissant l’économie canadienne. Le plan aurait dû porter sur le réoutillage de secteurs industriels clés les plus durement touchés, comme le secteur manufacturier et les forêts, et sur la croissance de nouvelles industries. Il aurait aussi dû consolider les services publics et reconnaître le rôle qu’ils jouent non seulement dans l’amélioration de notre qualité de vie, mais aussi dans l’augmentation de notre productivité et de notre capacité concurrentielle

Les gouvernements d’autres pays ont très bien réussi à le faire en se tournant vers l’avenir et en planifiant des investissements publics, des soutiens, de la formation, de la RD, des achats gouvernementaux et des règlements proactifs pour donner un coup de pouce aux industries jugées les plus prometteuses. Par exemple, les gouvernements ont avantage à travailler avec l’industrie et le mouvement syndical pour développer des industries vertes.

Par contraste, l’attitude du gouvernement Harper en matière de développement économique en a été une de laissez-faire, axée sur les baisses d’impôt et la réduction de la réglementation et opposée à la participation proactive du gouvernement (bien qu’il ait accordé un soutien public important à quelques secteurs favoris, comme le pétrole et le gaz, l’agriculture et la défense).

Le budget de 2009 ne change pas grand chose à cette situation. Il offre un certain appui à court terme aux forêts, à l’agriculture, à la construction navale et à l’industrie automobile. Cependant, l’argent des forêts est destiné au marketing et le financement prévu pour l’industrie automobile (que GM a rejeté) était lié à des réductions salariales. Le soutien à l’« industrie verte » est très limité et porte presque exclusivement sur le captage et le stockage du carbone plutôt que sur l’accroissement de l’efficacité. Le budget contient quelques hausses de financement pour la culture et le tourisme et une augmentation du financement et des investissements pour la recherche dans les collèges et universités.

La formation recevra des fonds, mais cet argent ne sert à rien s’il n’y a pas d’emplois. Le financement destiné à la création d’emplois est limité aux emplois d’été pour les étudiants, les Canadiens autochtones et les diplômés en technologie et en affaires.

Le budget prévoit des mesures extraordinaires pour offrir du crédit et des garanties de prêt aux entreprises, en plus de proposer des plans de réglementation nationale pour l’industrie financière. Toutefois, la réglementation est censée être « fondée sur des principes » plutôt que sur des règles. Dans la plupart des cas, cela équivaudra à encore plus d’autoréglementation et de déréglementation pour l’industrie financière – en somme, exactement ce qui a causé la présente crise financière et économique.

Le budget estime que ces mesures créeront 142 000 nouveaux emplois nets et 47 000 de plus si l’on tient compte de l’« effet de levier » provincial et municipal. Selon ces chiffres, le chômage devrait demeurer inférieur à 7 % l’année prochaine. Mais la capacité de créer des emplois additionnels est douteuse, puisque les municipalités sont à court d’argent et que rien ne garantit que les emplois prévus grâce à l’effet de levier des prêts et du logement se matérialiseront.

Note : Incomplet

Le budget fédéral de 2009 a été préparé dans un climat exceptionnel d’attention et d’anticipation. Il a été élaboré dans la foulée d’une crise financière qui a déstabilisé l’économie mondiale et provoqué un revirement fondamental des politiques économiques généralement acceptées.

Le règne de trente années de baisses d’impôt basées sur une relance économique par l’offre, de discipline fiscale, de déréglementation et de privatisation en tant que principes d’orthodoxie économique a pris fin. Désormais, les gouvernements du monde favorisent une gouvernance active, le retour à la réglementation et des mesures de stimulation keynésiennes comme solutions à la crise économique et financière.

Dans son premier test de navigation dans ces eaux inconnues – son énoncé économique de novembre – le gouvernement Harper a échoué à plusieurs égards. Il a présenté des prévisions peu plausibles, en plus de faire preuve d’une attitude cavalière face à la crise économique et d’un opportunisme crasse qui s’est retourné contre lui et a presque entraîné sa chute.

Dans un contexte économique qui ne s’améliore pas, le budget fédéral de 2009 avait d’autres épreuves à surmonter : 1) il devait obtenir l’appui politique nécessaire pour garder le pouvoir et 2) il devait livrer la marchandise sur des points économiques clés : stimulation de l’économie, protection des plus vulnérables et maintien et création d’emplois par la relance de l’économie.

Le budget semble avoir réussi son premier examen politique avec l’appui de l’opposition libérale. Même s’il est encore difficile de savoir s’il finira par atteindre ses objectifs économiques importants, ce premier bulletin de notes indique qu’il a encore bien du chemin à faire.