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Le projet de loi 11, the Health Care Protection Act a été présenté par le gouvernement de l’Alberta le 2 mars 2000. Ce projet de loi constitue la troisième tentative par la province d’adopter une législation qui établirait un cadre juridique formel permettant la privatisation de certains services chirurgicaux couverts par le régime d’assurance santé.

Le projet de loi constitue une pièce de législation qui exprime cette intention d’une façon plus sophistiquée que son prédécesseur immédiat, le projet de loi 37, en faisant la promotion de la privatisation sous la bannière de « la protection des soins de santé. »

On peut donc excuser celui qui conclut que le projet de loi 11 a été rédigé dans le but de cacher son véritable objectif, objectif qui n’a pas grand-chose à voir avec la protection du caractère public du système de santé en Alberta. Au contraire le projet de loi 11 transformera ce système en augmentant de façon appréciable la possibilité pour les hôpitaux privés à caractère commercial de dispenser des soins chirurgicaux. Le Globe and Mail en donne la description suivante :

L’Alberta sera la première province à ouvrir, sur une grande échelle, une tranchée pour le secteur privé dans son système public de soins de santé. (1)

La nébulosité du titre du projet de loi se retrouve également dans son texte. L’article 1 du projet de loi prévoit par exemple que personne ne peut exploiter un hôpital privé en Alberta. Mais dès l’article suivant on introduit le concept d’un « établissement chirurgical autorisé » qui pourra obtenir un permis pour fournir la gamme complète des services qui sont traditionnellement offerts dans les hôpitaux, à l’exception de certains actes médicaux majeurs ou de soins d’urgence qui ne sont d’ailleurs pas précisés.

Le Concise Oxford Dictionary définit «hôpital» comme étant un établissement qui dispense des traitements chirurgicaux et médicaux et des soins infirmiers pour les personnes malades ou blessées. Il va sans dire qu’un « établissement chirurgical autorisé » sera considéré comme un hôpital au sens de cette définition et comme on l’entend habituellement.

Aucune disposition dans le projet de loi 11 n’empêche que l’on accorde un permis « d’établissement chirurgical autorisé » à une entreprise privée à but lucratif. Le projet de loi ne contient pas davantage de restriction concernant la propriété étrangère de ces établissements ou l’investissement étranger dans ceux-ci.

Cependant le projet de loi 11 propose des limites à l’éventail des services que de tels établissements seraient autorisés à rendre. L’article 2(2) prévoit que les chirurgies majeures, tels que définies par les règlements adoptés en vertu du Medical Profession Act, ne pourront être dispensées que par les hôpitaux publics. L’article 29(m) définit « hôpital privé » comme signifiant un établissement de pointe qui

  1. dispense des services d’urgence, de diagnostics, des services médicaux et chirurgicaux et
  2. admet des patients pour des séjours sous surveillance médicale qui dépassent 12 heures,

mais ne comprend pas un hôpital public.

L’article 5 permet explicitement à ces établissements chirurgicaux qui sont des « non-hôpital » d’offrir des produits et services médicaux de plus haute qualité sous réserve de certaines restrictions pour protéger les usagers. L’article 7 édicte trois conditions pour l’octroi d’un permis à un tel établissement chirurgical :

  • accréditation par le Collège en vertu du Medical Profession Act;
  • une entente avec l’autorité compétente en matière de santé approuvée par le Ministre; et,
  • la désignation par le Ministre.

L’article 10 impose certaines restrictions sur les transferts de propriétés. L’article 11 accorde au Ministre le pouvoir de désigner des établissements chirurgicaux aux fins de dispenser des soins chirurgicaux spécifiques et pour imposer les conditions et modalités à cet égard.

La section 2 du projet de loi énonce les exigences requises pour l’obtention d’un permis concernant la fourniture de services non assurés aux patients hospitalisés et les chirurgies d’un jour. La section 3 prévoit qu’on peut retirer une désignation ou y mettre fin. La partie 3 comporte diverses dispositions d’ordre général et comprend une clause privative qui limite la révision judiciaire des décisions prises par le Ministre en vertu de la loi et un article accordant au Cabinet le pouvoir de prendre des règlements sur différents sujets.

La partie 4 constitue le Conseil consultatif du Premier Ministre sur la santé et la partie 5 comporte les différentes définitions pertinentes au projet de loi. Finalement la partie 6 énonce diverses dispositions transitoires, de même que des amendements au Alberta Health Care Insurance Act, au Hospital Act et au Medical Profession Act. (2)

Bien que le projet de loi semble avoir été rédigé de façon à tenir compte de certaines préoccupations déjà exprimées à l’égard des projets précédents, il est clair qu’il représente toujours une percée importante et sans précédent permettant au secteur privé de prendre une place dans la fourniture des soins de santé couverts par l’assurance santé. Si la province réussit dans sa démarche, elle procéderait par l’intermédiaire des services régionaux de santé, à une institutionnalisation de la fourniture de soins de santé par le secteur privé à un niveau que ses protagonistes n’ont pas imaginé jusqu’à maintenant.

Réserves

Conformément à vos directives, nous n’avons pas examiné les implications du projet albertain à l’égard des obligations que comporte l’Accord général sur le commerce et des services de l’Organisation mondiale du commerce. Nous n’avons pas davantage examiné les questions pouvant être reliées aux arrangements convenus au Canada en vertu de l’entente sur le commerce intérieur. Finalement nous ne formulons aucune opinion sur la question de savoir si le projet de l’Alberta est conforme ou non aux exigences de la Loi canadienne sur la santé.


Références

  1. Vendredi, 3 mars 2000.
  2. Le projet albertain peut également s’appuyer sur un terrain déjà preparé et qu’on retrouve dans la législation provinciale et qui permet d’adopter des règlements pour autoriser que des soins assurés soient dispensés par des hôpitaux privés (voir l’article 62 du Hospitals Act).