La négociation d’augmentations de salaire décentes n’aide pas seulement les travailleurs, leurs familles et leur communauté. L’économie en profite aussi. Depuis la récession de 2008, les dépenses des familles qui gagnent de bons salaires sont l’un des principaux moteurs de la croissance économique. Malheureusement, cela est en train de changer.
En effet, la stagnation des salaires actuelle nuit à l’économie. En raison d’une faiblesse inattendue des dépenses de consommation et des investissements immobiliers, la Banque du Canada a décidé en janvier de reporter la hausse des taux d’intérêt.
Lorsque la Banque augmente les taux d’intérêt, le coût d’emprunt pour les dépenses de consommation et l’immobilier augmente. Comme les Canadiens ont une dette de près de 1,78 dollar pour chaque dollar de revenu disponible, la situation est insoutenable sans augmentation des salaires.
On peut suivre la croissance des salaires de diverses façons. La Banque du Canada utilise quatre mesures produites par Statistique Canada pour estimer la croissance moyenne des salaires horaires. C’est la moyenne « salaires-comm ». La Banque du Canada considère qu’une croissance de 3 % de cette moyenne constitue une croissance saine. Depuis 2011, cette moyenne oscille entre 2 et 3 %. Elle n’a atteint 3 % qu’une fois, soit au dernier trimestre de 2017.
Cette moyenne est toutefois trompeuse. Elle est gonflée par la croissance plus rapide des salaires des travailleurs les mieux rémunérés, alors que la plupart des travailleurs ont connu une croissance de leur salaire beaucoup plus faible. En ce qui concerne les travailleurs syndiqués, la moyenne canadienne dans les principales conventions collectives négociées en 2018 était de 1,3 %, contre 1,7 % en 2017. C’est dans les trois provinces productrices de pétrole que la plus faible croissance des salaires dans les ententes négociées a été enregistrée. En Alberta et à Terre-Neuve-et-Labrador, la croissance a été d’à peine 0,1 % ! La Colombie-Britannique est la seule province où les hausses salariales négociées ont dépassé 2 % en 2018.
Si l’on tient compte de la hausse des prix survenue en 2018 et de celle prévue en 2019, le portrait est encore pire pour les travailleurs syndiqués. Il n’y a qu’au Québec que les ajustements salariaux négociés arrivent à suivre l’inflation.
Il n’est donc pas surprenant que les familles dépensent avec plus de prudence. Mais pourquoi les salaires sont-ils si faibles? Compte tenu de la vigueur de l’emploi et de la croissance du produit intérieur brut, ils devraient pourtant augmenter plus rapidement.
En comparant la croissance du salaire horaire moyen des travailleurs à temps plein en 2008 et en 2018, on constate que la croissance des salaires accuse un retard sur les autres indicateurs. En 2008, l’augmentation a été de 4,3 %. En 2018, avec un taux de chômage plus bas, elle n’était que de 2,4 %, un chiffre encore une fois gonflé par l’augmentation du revenu des plus hauts salariés. Dans plusieurs provinces, les travailleurs à bas salaire ont vu leur situation s’améliorer en raison de la hausse du salaire minimum, mais la croissance des salaires de la classe moyenne est beaucoup plus faible.
Plusieurs facteurs expliquent cette faiblesse persistante. Mentionnons les concessions et les clauses de disparité de traitement réclamées par les employeurs à la table de négociations, la croissance de la précarité d’emploi, l’affaiblissement des lois du travail et des mesures de protection des travailleurs, la sous-traitance, ainsi que les compressions et les gels salariaux imposés par plusieurs gouvernements provinciaux.
La politique de négociation du SCFP Aller de l’avant présente le plan de notre syndicat pour résister aux concessions et aux clauses de disparité de traitement, notamment en aidant les sections locales à obtenir de réelles augmentations de salaire. À la Conférence nationale sur les négociations, les membres développeront leurs compétences et partageront des stratégies pour continuer à aller de l’avant ensemble. C’est une bonne nouvelle pour les membres du SCFP, dont beaucoup attendent une augmentation de salaire depuis longtemps, mais c’est aussi une bonne nouvelle pour l’économie.
Pour savoir à quel rythme votre salaire augmente, utilisez la calculatrice du SCFP : scfp.ca/calculatrice-salaires-reels
AUGMENTATIONS DES SALAIRES ET DES PRIX
Moyenne Canadienne | Secteur fédéral | T .-N .-L | Î .-P .-É . | N .-É . | N .-B . | Qué . | Ont . | Man . | Sask . | Alb . | C .-B . | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Hausse moyenne du salaire de base dans les grandes conventions collectives (2017) |
1,7% |
1,5% |
– |
– |
0,9% |
1,0% |
1,8% |
2,0% |
1,4% |
1,6% |
0,7% |
2,0% |
Hausse moyenne du salaire de base dans les grandes conventions collectives (2018) |
1,3% |
1,8% |
0,1% |
1,5% |
1,2% |
– |
1,8% |
1,8% |
1,9% |
0,6% |
0,1% |
2,1% |
Inflation moyenne (2018)* | 2,3% | – | 1,6% | 2,3% | 2,2% | 2,1% | 1,7% | 2,4% | 2,5% | 2,3% | 2,4% | 2,7% |
Inflation moyenne (prévisions pour 2019)** | 1,8% | – | 1,9% | 1,8% | 1,8% | 1,8% | 1,8% | 1,8% | 1,8% | 1,8% | 1,7% | 1,9% |
* Statistique Canada. Tableau 18-10-0005-01 : Indice des prix à la consommation, moyenne annuelle
**Selon les prévisions des banques TD, Royale et de Montréal en date du 15 janvier 2019.