Il pourrait s’agir d’un des plus grands règlements du genre pour des travailleurs dont les droits constitutionnels ont été violés par leur employeur. En Ontario, les travailleurs du secteur de l’éducation affiliés au SCFP se sont entendus avec le gouvernement provincial pour un dédommagement financier. Cette entente survient un peu plus d’un an après que la Cour supérieure de l’Ontario ait donné raison aux syndicats du secteur de l’éducation qui contestaient la constitutionnalité de la loi 115.

« Nous sommes heureux de nous être enfin entendus avec le gouvernement ontarien sur un dédommagement financier pour la violation de nos droits. La loi 115 n’aurait jamais dû se retrouver devant les députés de l’Assemblée législative. La décision du juge Lederer nous a permis de négocier un dédommagement pour nos membres », a déclaré la présidente du comité de coordination du secteur de l’éducation, Terri Preston. Elle et Jim Morrison du SCFP ont mené les négociations.

L’entente, qui doit être ratifiée par les syndiqués, prévoit le versement sur plusieurs années d’une somme totale de 56,7 millions de dollars. Des votes de ratification seront organisés à travers la province d’ici la fin de juin.

Le montant exact que recevra chaque membre du SCFP dépendra du nombre final de syndiqués dédommagés. Les syndiqués qui étaient à l’emploi pendant les deux années scolaires touchées (2012‑2013 et 2013‑2014) recevront leur pleine part de la somme. Ceux qui étaient à l’emploi pendant une seule de ces années toucheront la moitié. Plus de 60 000 membres du SCFP œuvraient dans le secteur de l’éducation en Ontario durant la période où la loi 115 était en vigueur.

« L’intérêt du SCFP dans cette affaire était clair depuis le début. Avant même que la cause de la loi 115 soit entendue, nous avons fait valoir la cause remportée par la Fédération du travail de la Saskatchewan. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada a jugé que le gouvernement saskatchewanais était allé trop loin dans ses efforts pour interdire les grèves. Dans le cas de la loi 115, nous avons plaidé que cette loi enfreignait la Charte des droits et libertés en accordant au gouvernement ontarien la possibilité d’interdire la grève. Le juge Lederer nous a donné raison. Ces deux causes ajoutent à la jurisprudence qui confirme que les travailleurs canadiens jouissent de la liberté d’association en vertu de la Charte. Avec le dédommagement obtenu, les gouvernements qui seraient tentés de violer les droits des travailleurs vont savoir que cela va leur coûter cher. Le SCFP est fier d’avoir été aux premières lignes dans cette bataille », a affirmé le président national du SCFP, Mark Hancock.

La contestation judiciaire de la loi 115 qui privait les travailleurs du secteur de l’éducation en Ontario de leur droit à la libre‑négociation collective a été déposée en 2013. Dans le cas du SCFP, la loi, en plus d’interdire la grève, a fait en sorte que les intérêts des membres du SCFP et ceux des enseignants ont été considérés en bloc, alors que le syndicat ne pouvait négocier qu’au nom de ses propres membres. L’affaire avait été reportée en 2014, puis reprise en décembre 2015.

« Le tribunal a validé notre position : la loi 115 foulait aux pieds le principe fondamental de la liberté d’association. Dans son jugement, le juge Lederer écrit que la loi 115 a eu des répercussions “non seulement sur les conditions économiques des travailleurs du secteur de l’éducation, mais sur leur droit d’association, ainsi que sur la dignité, l’autonomie et l’égalité qui viennent avec l’exercice de ce droit fondamental.” Ce jugement et ce règlement de dédommagement envoient un message clair aux gouvernements : ne vous ingérez pas dans la libre négociation collective et ne jouez pas avec les droits des travailleurs », a souligné le président du SCFP‑Ontario, Fred Hahn.

Outre le SCFP, les parties prenantes à la contestation judiciaire étaient la Fédération des enseignantes et des enseignants de l’élémentaire de l’Ontario (FEEO), la Fédération des enseignantes et enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (FEESO) et le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO). UNIFOR avait le statut d’intervenant.

Le SCFP demande à ses membres qui ont occupé un emploi dans le secteur de l’éducation en Ontario entre 2012 et 2014 de bien vouloir entrer en contact avec leur section locale pour connaître les détails de l’entente et savoir s’ils ont droit à un dédommagement.

Le SCFP représente environ 60 000 travailleurs du secteur de l’éducation en Ontario. Ces syndiqués sont concierges, employés de bureau, aides‑éducatrices, moniteurs, ouvriers spécialisés, éducatrices de la petite enfance, etc. Ils œuvrent dans les quatre réseaux de commissions scolaires ontariens (anglais et français, catholique et public).