À l’époque, Transports Canada a prétendu que le nouveau ratio aiderait les entreprises canadiennes à faire face à la concurrence internationale. Mais à quel prix ? Malheureusement, la décision de Transports Canada fait passer les profits avant la sécurité des passagers. Le système aérien canadien s’est longtemps classé parmi les plus sécuritaires au monde. Le Canada ne devrait pas participer au nivellement des normes par le bas qui affaiblit l’aviation mondiale au nom de la concurrence.
Le ratio du 1 pour 50 constitue un retournement dangereux et antidémocratique de la position du gouvernement
La nouvelle réglementation adoptée sous les conservateurs constitue un retournement dangereux de la position historique du gouvernement fédéral. De 2001 à 2005, les décideurs, autant les hauts-fonctionnaires de Transports Canada que les élus, ont appuyé le maintien du ratio du 1 pour 40. En 2001, le gouvernement libéral a par exemple rejeté le changement de ratio proposé par les transporteurs.
Le 22 mai 2014, lors des consultations de Transports Canada sur le changement proposé à la réglementation, des représentants du ministère ont admis que le ratio du 1 pour 50 n’offrait pas un niveau de sécurité équivalent au ratio du 1 pour 40. En outre, Transports Canada a reconnu que la nouvelle réglementation ne s’appuyait pas sur une évaluation des risques récente.
Historiquement, la Chambre des communes a toujours insisté pour que tout changement au ratio agents de bord-passagers soit soumis au niveau le plus élevé d’examen, de débat et de supervision. À plusieurs reprises, des députés ont affirmé que tout changement à la réglementation doit être soumis au Comité permanent des transports. Ce ne fut pas le cas avant l’entrée en vigueur du ratio du 1 pour 50 en 2015.
L’engagement électoral du Parti libéral du Canada en 2015
Lors de la dernière campagne électorale fédérale, la Division du transport aérien du SCFP a fait parvenir un questionnaire à tous les grands partis. Entre autres questions, on leur demandait s’ils appuyaient le retrait du nouveau ratio du 1 pour 50 et le retour au ratio éprouvé du 1 pour 40.
Voici la réponse du le Parti libéral du Canada :
« Le gouvernement conservateur a mis les Canadiens en danger en réduisant les budgets de Transports Canada consacrés à la sécurité. Le gouvernement a pour rôle de prendre des décisions éclairées fondées sur des preuves et des données. Le Parti libéral du Canada ne prendra pas une décision unilatérale, sans consulter adéquatement les intervenants et les experts. Ce faisant, la sécurité de tous les Canadiens sera en tête de liste de nos priorités. »
Une forte majorité de Canadiens s’opposent au ratio du 1 pour 50
À l’automne 2013, la firme Environics a mené un sondage pour le compte de la Division du transport aérien du SCFP. Il révèle que 74 pour cent des Canadiens estiment que la réduction du nombre d’agents à bord aura un impact négatif sur la sécurité des passagers.
Le ratio du 1 pour 40 a fait ses preuves : en cas d’urgence, chaque seconde compte
1er exemple : En 2005, lors d’un orage violent, le vol 358 d’Air France a quitté la piste de l’aéroport Pearson de Toronto et a pris feu. Le ratio était d’un agent de bord pour 30 passagers et tous les passagers ont survécu. Peu après, le ministre fédéral des Transports de l’époque, Lawrence Cannon, a décidé de maintenir le ratio du 1 pour 40, déclarant que son gouvernement reconnaissait l’importante contribution des agents de bord, particulièrement lors des évacuations d’urgence.
2e exemple : En juillet 2013, le vol 214 d’Asiana s’est écrasé à l’aéroport international de San Francisco avec 291 passagers et 12 membres d’équipage à bord. Quatre membres d’équipage ont été éjectés de l’avion et trois autres blessés sous la force de l’impact. Trois passagers seulement sont morts, dont un qui a été frappé par un véhicule d’urgence au sol. Si le ratio du 1 pour 50 avait été en vigueur, il y aurait eu seulement huit membres d’équipage à bord du vol 214, dont cinq auraient été mis hors combat par l’impact. Le nombre de morts et de blessés aurait sûrement été plus élevé.
Dans ces deux cas, le nombre d’agents de bord présents a fait toute la différence. Contrairement au ratio du 1 pour 40, lorsque le ratio du 1 pour 50 est en vigueur, des sorties de secours sont laissées sans surveillance, faute d’agents de bord en nombre suffisant. C’est un risque inutile et inacceptable.
Les agents de bord font toutes sortes de tâches contribuant à la sécurité
Les agents de bord du SCFP sont des professionnels de la sécurité. À bord, ils servent de pompiers, de policiers et d’infirmiers. Parce que chaque seconde compte, ils sont essentiels à la sécurité des passagers en situation d’urgence. Par exemple, en cas d’évacuation d’un avion gros porteur, toutes les sorties ne sont pas surveillées par un agent de bord lorsque le ratio du 1 pour 50 est en vigueur (voir croquis). Les données tirées des vraies situations d’urgence démontrent qu’il faut plus d’agents de bord, pas moins.
Et, il n’y a pas que les évacuations. Les agents de bord doivent aussi s’occuper régulièrement des turbulences, des cas de décompression de la cabine, des urgences médicales, des passagers turbulents et des incendies à bord.
De nombreux agents de bord qui travaillent sur des vols où le ratio du 1 pour 50 est en vigueur ont constaté un relâchement des normes de sécurité, ainsi qu’une hausse du stress et de la fatigue. Pourtant, Transports Canada refuse de mener les recherches qui démontreraient que, pour sauver des vies dans de vrais accidents, on a besoin d’un ratio d’au moins un agent de bord pour 40 passagers. C’est l’une des raisons pour lesquelles le SCFP conteste la nouvelle réglementation devant la Cour fédérale.
La nouvelle réglementation n’a pas subi l’examen rigoureux requis, en plus d’aller à l’encontre des décisions antérieures de Transports Canada concernant le ratio du 1 pour 50. Puisqu’il en va de la sécurité des passagers, le gouvernement fédéral actuel doit absolument ramener la sécurité en tête de liste des priorités.
Les revendications du SCFP
Pour ces raisons, nous demandons au gouvernement fédéral d’annuler la nouvelle réglementation et de réinstaurer le ratio du 1 pour 40, un ratio éprouvé en matière de sécurité. Maintenir le statu quo n’est pas dans l’intérêt des Canadiens. Les données disponibles démontrent en effet que le ratio du 1 pour 50 réduit la sécurité des passagers.
Si le nouveau gouvernement libéral n’est pas prêt à nous débarrasser immédiatement du ratio du 1 pour 50, qu’il respecte au moins sa promesse électorale, c’est-à-dire de « consulter adéquatement les intervenants et les experts ». Les libéraux devront aussi faire en sorte que l’affirmation selon laquelle « la sécurité de tous les Canadiens sera en tête de liste de nos priorités » devienne réalité.
À la lumière de cet engagement, le SCFP réclame que le ratio du 1 pour 50 soit soumis à une évaluation des risques. Cette évaluation devra être menée par Transports Canada en toute transparence. Les principaux intervenants, comme le SCFP, devront y participer. Les résultats de cette évaluation devront être rendus publics. Le Comité permanent des Transports, de l’infrastructure et des collectivités de la Chambre de communes doit superviser tout étude relative au ratio, incluant la nouvelle évaluation des risques.
Le SCFP est le plus grand syndicat au Canada. Il compte 639 000 membres. Le SCFP représente plus de 10 000 agents de bord qui travaillent pour Air Canada (ligne principale et rouge), Air Transat, Calm Air, Canadian North, CanJet, Cathay Pacific, First Air et Sunwing.