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La Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) étend ses plans de privatisation aux systèmes municipaux d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux. Elle a récemment annoncé son soutien à un partenariat public-privé (PPP) dans une petite municipalité de l’Ontario, qualifiant le projet « d’innovation financière ».

Dans un communiqué lié à cette annonce, le ministre fédéral de l’Infrastructure et des Collectivités, François-Philippe Champagne, a salué le « nouveau modèle de partenariat » proposé par la banque.

Ce n’est pas la première fois que les institutions et programmes fédéraux tentent de promouvoir les PPP et de les rendre acceptables, surtout auprès des petites municipalités. Dans le cas présent, la BIC subventionnera les coûts d’emprunt pour les entreprises soumissionnaires au contrat de 20 ans visant à concevoir, bâtir, financer, exploiter et entretenir les installations actuelles et futures d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées du canton de Mapleton.

La BIC propose d’offrir des prêts aux entreprises à un taux inférieur à celui qu’elles obtiendraient sur le marché. Les détails concernant les modalités des prêts ont été rayés dans les documents publics portant sur cette entente.

Le consortium gagnant bénéficiera d’un flux garanti de revenus pendant deux décennies pour l’exploitation et l’entretien des systèmes d’eau du canton.

Le soutien de la BIC n’est pas un cadeau

Les municipalités rurales ou isolées ont des sources de revenus très limitées. Mais l’approche de la BIC n’est pas un cadeau. Ces PPP lieront les municipalités à des contrats rigides et coûteux. Elles devront notamment repayer le prêt de la BIC et les coûts à long terme pour l’exploitation et l’entretien par des entreprises privées qui devront pour leur part être intégrés dans les tarifs des services d’eau.

PriceWaterhouseCoopers (PwC) a présenté au conseil municipal une analyse de rentabilité qui recommandait l’approche de la BIC. PwC est l’une des quatre grandes firmes de consultants jouant un rôle important dans l’évaluation et le déploiement des PPP.

Certaines options n’ont pas été examinées dans l’analyse de rentabilité, notamment l’octroi de subventions fédérales ou provinciales (qui n’auraient pas à être remboursées). Une autre source potentielle de fonds – et non de financement – serait le Fonds de la taxe sur l’essence fédéral, qui est spécialement conçu pour ce type de projets. De plus, du financement partagé pourrait être offert grâce au Plan investir dans le Canada du gouvernement fédéral et du Fonds municipal vert de la Fédération canadienne des municipalités, qui a récemment reçu un milliard de dollars du fédéral.

L’analyse de rentabilité repose plutôt sur les tactiques habituelles pour rendre la privatisation plus attrayante que la gestion publique. Le guide du SCFP à l’intention des municipalités qui envisagent les PPP documente et déboulonne plusieurs de ces tactiques.

Un prêt à taux préférentiel : une meilleure option

La BIC aurait pu offrir un prêt à taux préférentiel directement au canton. Depuis la création de la BIC par les libéraux, le SCFP exige que cette banque de privatisation soit convertie en une banque publique qui soutient les administrations locales grâce à du financement abordable.

Le mandat de la BIC est clair. Elle tente de créer un précédent dans un secteur comptant peu de PPP pour l’instant. En 2016, Statistique Canada a établi que les administrations municipales et régionales possédaient 3400 installations d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées. Moins de 20 municipalités ont privatisé leurs réseaux par l’entremise de PPP. La BIC vise les municipalités les plus petites et utilise le canton de Mapleton comme projet pilote.

Ces dernières années, plusieurs collectivités – dont les municipalités de Taber et Okotoks, en Alberta –ont repris le contrôle sur leurs réseaux d’alimentation en eau ou de traitement des eaux usées, ou ont indiqué vouloir mettre fin aux contrats privés d’exploitation et d’entretien. Ces deux municipalités ont mis fin à leurs contrats avec EPCOR – qui fait partie d’un des groupes présélectionnés pour répondre à l’appel d’offres du projet de Mapleton.

Ce projet est un signe qu’il pourrait bientôt y avoir plus de privatisation du genre dans nos collectivités. Tous les membres du SCFP doivent être sur leurs gardes. Nous vous invitons à lire notre liste de 10 questions que les municipalités doivent se poser par rapport aux projets proposés par la BIC et à partager cette liste avec vos élus locaux.