En mars, des représentantes du SCFP se sont jointes à 180 femmes syndicalistes de plus de 42 pays pour défendre les droits des femmes et des filles lors de la 63e session annuelle de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies (CCFNU) à New York.
Ce fut un marathon de réunions, de séances d’information, de lobbyisme, de réseautage et de manifestations. La Réplique a rencontré deux membres du SCFP pour savoir ce que cette expérience leur a apporté. La présidente de la section locale 2073 (Syndicat des employés de la Société canadienne de l’ouïe), Stacey Connor, et la secrétaire archiviste de la section locale 2348 (Syndicat des travailleurs communautaires, de la santé et des services sociaux du Manitoba), Gina McKay, ont réfléchi pour nous aux effets durables de leur participation à la CCFNU.
Que pensez-vous avoir accompli?
Stacey Connor (SC) : En tant que femme sourde, je rencontre quotidiennement des obstacles qui limitent ma participation. Cela faisait du bien d’être à l’ONU pour parler de mon expérience et d’être reconnue par mon syndicat pour mon travail comme femme sourde. J’ai rencontré des personnes comme moi confrontées à de nombreux obstacles dans le monde, notamment deux femmes sourdes, l’une du Soudan et l’autre de Mongolie. Ce fut un honneur de prendre part à leur atelier et d’apprendre d’elles.
Gina McKay (GM) : Ma plus grande réalisation a été de mieux comprendre la nécessité de la solidarité internationale. J’ai été émue d’entendre des femmes, des femmes trans et des femmes non binaires du monde entier partager leur vécu de travailleuses dans le secteur public. Leurs problèmes et leurs oppressions sont similaires et familiers. Plusieurs d’entre elles se débattent contre le capitalisme sauvage et la cupidité. Les travailleurs en quête d’égalité luttent partout dans le monde et dans tous les syndicats. J’ai raconté mon expérience de syndiquée LGBTQ2+ et j’ai trouvé des points communs avec notre mouvement syndical en reconnaissant que, comme mouvement, nous sommes aussi forts que nos voix les plus discrètes le sont.
Pourquoi est-ce important que les syndicats se fassent entendre à la CCFNU?
SC : Il était important pour les femmes sourdes et malentendantes de se faire entendre sur la scène internationale, pour qu’on ne les néglige pas. Notre rôle de syndiquées handicapées est de rappeler à l’ONU et au monde entier que nous existons et qu’on ne peut pas nous ignorer. Personne ne peut parler à notre place.
GM : Nos défis locaux, régionaux et nationaux sont aussi des défis internationaux. Les femmes et les travailleurs en quête d’égalité sont victimes d’oppression et de discrimination dans le monde entier. La solidarité entre travailleurs est le seul moyen de s’unir contre les structures et les systèmes qui nous oppriment. Notre voix apporte à l’ONU des approches progressistes en matière de protection des droits de la personne dans le mouvement syndical. Alors que l’opposition d’extrême droite domine de plus en plus les commissions des Nations Unies, il est impératif que le mouvement syndical s’unisse et se mobilise, pour que la diversité des droits et des problématiques de travailleurs soit respectée à l’échelle mondiale. Il ne suffit pas de se battre pour des protections fortes dans notre propre société. Dans une économie capitaliste et néolibérale, tous les travailleurs, syndiqués ou non, sont vulnérables.
Quelles actions votre participation à cette délégation vous a-t-elle inspirées?
SC : Cela m’a amené à réfléchir à mon leadership et aux opportunités qui s’offrent à moi pour me battre pour les droits des personnes sourdes et malentendantes, tant au sein du SCFP que dans la société en général. J’ai l’intention d’exprimer ces préoccupations lors de notre congrès national et de rappeler aux membres qu’ils doivent faire preuve d’inclusion, défendre les intérêts d’autrui et traiter chaque personne en toute égalité. Les travailleurs sourds et malentendants ont besoin d’une plateforme pour communiquer avec les autres travailleurs. Mais il faudra travailler fort pour créer un véritable espace pour ces personnes. Nous avons besoin de ressources pour mettre en place les outils linguistiques qui nous permettront de participer pleinement aux discussions et pour offrir de l’information et de la formation sur la façon de créer ces espaces inclusifs.
GM : Je suis rentrée à la maison avec de bonnes idées sur la manière d’aug men- ter notre présence à la prochaine CCFNU, afin de renforcer notre front commun contre l’extrême droite. Je vais rester en contact avec les participantes par le biais de conversations électroniques sur les droits des femmes et des LGBTQ2+ dans le monde. Je vais aussi pousser le SCFP à maintenir ses efforts et sa voix dans ce forum. Les travaux sur l’équité que nous menons au SCFP peuvent faire une différence à l’échelle mondiale. Le militantisme syndical intersectionnel est si important! Et la diversité est l’une des plus grandes forces de notre mouvement.
Que ressentiez-vous à la fin de la semaine?
SC : J’étais en colère et frustrée par ce que j’avais entendu de la part de femmes sourdes et malentendantes du monde entier. J’étais également très reconnaissante au SCFP pour cette occasion de tisser de nouveaux liens. Je crains que bon nombre des engagements pris pour soutenir les femmes comme moi n’abouteront pas à des actions concrètes si nous ne trouvons pas le moyen de continuer à créer des espaces propices à une véritable inclusion aux niveaux mondial et local.
GM : Je me sentais motivée à rester en contact avec les militantes que nous avons rencontrées et avec lesquelles nous avons dialogué. Il reste encore beaucoup à faire! Aussi avancés que puissent être certains pays, il reste beaucoup de communautés qui luttent pour le respect des droits fondamentaux de la personne. En tant que membres de la communauté ouvrière mondiale, nous devons travailler ensemble pour éviter que des travailleurs soient laissés pour compte.
Ces entretiens ont été modifiés pour des raisons de concision et de clarté.