Les opposants à la bonification du Régime de pensions du Canada (RPC) se préparent à livrer leur ultime combat. Ils sont prêts à jouer le tout pour le tout, y compris ressortir leurs arguments usés, pour empêcher qu’on règle enfin la crise des retraites.
Notamment grâce aux efforts de l’Île-du-Prince-Édouard et de l’Ontario, les ministres provinciaux et territoriaux des Finances redoublent actuellement d’ardeur pour convaincre le gouvernement conservateur de Stephen Harper de bonifier les prestations du RPC. Dans une déclaration émise après leur réunion de la fin octobre, ils ont envoyé un message clair à leur homologue fédéral Jim Flaherty : il faut améliorer le RPC.
Nous n’avons jamais été aussi près d’une vraie réforme des pensions publiques. Il ne reste qu’une poignée d’obstacles surmontables sur notre route. Cependant pour nous rendre à destination, il manque un élément essentiel : le fédéral doit démontrer de la volonté politique et faire de la bonification du RPC une réalité.
Or, dans ce dernier droit, les opposants à la bonification du RPC persistent à propager des mythes, et ce même si ce régime offre la solution la plus efficace et la plus abordable à l’insécurité du revenu à la retraite.
Rien, pas la moindre miette de donnée crédible, ne soutient leurs prétentions à l’effet que les cotisations au RPC constituent un impôt sur la masse salariale qui fait disparaître des emplois. La cotisation de l’employeur au RPC, comme toute cotisation à un régime de retraite, est un salaire reporté. La présenter comme un impôt sur la masse salariale est fallacieux, voire carrément trompeur.
Qui plus est, la prétention voulant qu’une hausse des cotisations au RPC force les Canadiens à moins cotiser à leurs régimes privés d’épargne-retraite est fondamentalement biaisée. Il est vrai que moins du quart des Canadiens cotisent à un REER, mais parce qu’ils n’en ont tout simplement pas les moyens. Les REER se sont aussi avérés inefficaces comme mode de planification de la retraite. Étonnamment, les groupes qui se disent préoccupés par la capacité des travailleurs à cotiser à un REER n’exigent pas qu’on augmente les salaires, qui stagnent depuis des dizaines d’années. Pour sa part, le régime d’épargne-retraite collectif (RERC) mis de l’avant par le gouvernement fédéral possède des lacunes similaires à celles des REER. Finalement, les experts de partout au pays s’entendent pour dire que les véhicules d’épargne volontaire, comme le REER et le RERC, constituent une solution inaccessible pour la grande majorité des Canadiens sans régime de retraite au travail.
Reporter la bonification du RPC pour soutenir, encore et encore, l’échec de l’épargne privée volontaire n’aide en rien à résoudre la crise des retraites.
Et cette crise est bien réelle. Aujourd’hui, plus de 11 millions de Canadiens n’ont pas de régime de retraite au travail. Selon un rapport récent de la CIBC, près de la moitié des Canadiens nés dans les années 1960 disposeront d’un revenu à la retraite correspondant à moins de 80 pour cent de leur revenu au travail. Parmi les Canadiens nés entre 1985 et 1989, six sur dix connaîtront le même sort. Par comparaison, seul le quart des Canadiens nés pendant ou peu après la Seconde Guerre mondiale ont subi une telle chute de revenu à la retraite.
Le Canada est le pays industrialisé où les frais d’investissement privé sont les plus élevés. Ils sont cinq fois supérieurs aux coûts de gestion du RPC. Le RPC est quant à lui bien géré, entièrement transférable et entièrement financé par les employés et leurs employeurs. Le RPC dispose des fonds nécessaires pour les 70 prochaines années.
Le RPC possède donc des bases solides et il faut en profiter.
C’est pourquoi le mouvement ouvrier canadien réclame la bonification du RPC. Si on augmente graduellement les cotisations de 2,85 pour cent sur sept ans, le RPC pourrait verser en prestations aux Canadiens 50 pour cent de leur revenu avant retraite, au lieu des 25 pour cent actuels qui sont insuffisants. Une réforme significative des pensions est possible, à très petit coût pour les Canadiens et les gouvernements.
Le mouvement ouvrier et ses alliés militent pour cette bonification du RPC depuis plusieurs années et, enfin, les provinces et les territoires réalisent les avantages de cette solution. Les Canadiens aussi : ils sont près de 75 pour cent à l’appuyer.
Il est maintenant temps que le gouvernement fédéral cesse de tergiverser, qu’il fasse preuve de leadership et qu’il bonifie le RPC. Nous pouvons et nous devons faire mieux pour les 11 millions de Canadiens sans régime de retraite au travail, ainsi que pour les générations futures.