Il y a quelques années, Sheryl Burns, militante des droits des personnes ayant un handicap, a convaincu l’exécutif de sa section locale, le SCFP 1936, de plaider en faveur d’une amélioration de la prestation pour prothèses auditives. Le coût était minime et cela n’a profité qu’à un petit nombre de personnes, mais l’impact pour celles-ci était inestimable. Mme Burns considère cette petite victoire comme l’une de ses plus importantes.
Ayant elle-même une incapacité auditive, elle sait que cela ne serait jamais arrivé si elle n’avait pas fait partie du comité de négociation. « C’est troublant, parce qu’il n’y a pas toujours des personnes ayant un handicap aux tables de négociation. Et s’il y en a, il n’y en a qu’une », a-t-elle fait remarquer lors du panel intitulé « Mettre l’équité à l’avant-plan » et présenté dans le cadre de la Conférence des femmes du SCFP.
« Il n’est pas toujours facile de pousser les préoccupations en matière d’équité au premier plan des négociations, ou de les y maintenir lorsque la pression monte à la table », a dit Gina McKay, vice-présidente régionale pour le Manitoba et présidente du SCFP-Manitoba, en ouverture de la discussion.
« Mais, en tant que syndicalistes, nous savons que si une personne n’est pas en sécurité, aucune de nous ne l’est. Pour résister aux menaces de la droite, à l’austérité et aux coupures budgétaires, nous avons besoin d’un syndicat qui se bat pour tout le monde. Et cela implique de modifier nos structures et d’utiliser notre pouvoir collectif pour faire tomber les obstacles pour les groupes méritant l’équité. »
À l’hôpital général de Vancouver, Lisa Kreut, membre du Syndicat des employés d’hôpitaux, et ses collègues ont réussi à obtenir l’ajout d’articles trans-inclusifs dans leur convention collective. Les comportements tels que de morinommer quelqu’un sont désormais interdits et un congé de huit semaines pour chirurgie d’affirmation de genre a été inclus. Tout comme les prothèses auditives, ces clauses sont extrêmement importantes pour un très petit nombre de membres.
Le SEH a gagné cette bataille parce qu’il était très bien préparé et parce que l’équipe de négociation et les membres l’étaient aussi. « Nous avons mené des consultations pendant des années », a expliqué Lisa Kreut. « Dès que vous aurez votre entente, reprenez les négociations ! » a-t-elle conseillé, car le travail n’est jamais terminé.
En tant que seule femme noire et en situation de handicap dans son milieu de travail, Nadia Aristyl, membre du SCFP 2000, a rapidement compris qu’elle devait parler de sa réalité et dire aux autres ce dont elle avait besoin pour faire son travail et participer au sein de sa communauté. Aujourd’hui, elle est une leader qui préconise l’inclusion d’autres membres méritant l’équité. L’automne dernier, elle a fait adopter par l’exécutif de sa section locale une résolution pour promouvoir les femmes autochtones chez Hydro-Québec.
Juanita Forde, travailleuse en services sociaux et membre du SCFP 2191, a parlé de la discrimination subie par les femmes noires dans son milieu de travail. Celles-ci sont plus souvent sanctionnées et congédiées que leurs collègues blanches. Elle a expliqué son travail de militante au sein d’un comité mixte syndical-patronal de lutte contre le racisme et les répercussions positives de dire la vérité aux dirigeant(e)s.
Des victoires comme celle-ci sont édifiantes, mais elles ne racontent pas toute l’histoire. En fait, l’ensemble des panélistes ont parlé avec éloquence des défis constants confrontés à titre de leaders syndicales issues de groupes méritant l’équité.
Lindsay Poll milite pour les droits autochtones et travaille comme agente de bord chez WestJet. Elle a parlé de la discrimination subie au travail. On lui a dit de porter des talons hauts, d’arranger ses cheveux d’une certaine manière et d’éviter les tatouages faciaux qui sont un symbole de son héritage et apprentissage culturels. « Je n’ai pas écouté, parce que je suis ma propre voie », a dit Lindsay Poll, membre du SCFP 4070.
Mais résister est un combat quotidien et, comme l’a dit Sheryl Burns, « nous ne pouvons pas lâcher. Il ne s’agit pas de nous… il s’agit d’ouvrir la voie à la participation d’autres personnes militantes. » La pente est particulièrement raide pour les personnes ayant un handicap, si souvent oubliées, même quand on parle d’inclusion. « Nous sommes invisibles. Nous sommes opprimées. On ne nous voit même pas », a-t-elle déclaré.