Margot Nickerson, early childhood educator and president of CUPE 4745 in Nova ScotiaCette entrevue avec la présidente du SCFP 4745, Margot Nickerson, a été publiée dans le Chronicle Herald le 4 juin 2020. (En anglais seulement)

Le plan de la Nouvelle-Écosse de rouvrir les garderies accréditées et les garderies en milieu familial dans moins de deux semaines est incohérent et flou, déplore une éducatrice en garderie.

« Nous apprécions le fait que nous avons pu conserver nos emplois et que nous continuons d’être rémunérés, et nous comprenons parfaitement que les services de garde sont essentiels à la réouverture de l’économie, mais nous sommes vraiment déçus de la façon dont c’est fait », indique Margot Nickerson.

« Nous n’avons pas l’impression que le gouvernement a pris les mesures qui garantiraient un retour au travail aussi sécuritaire que possible pour les éducatrices et les éducateurs. »

Nickerson est l’une des neuf éducatrices qui travaillent avec 70 bambins et enfants d’âge préscolaire au St. Joseph’s Children’s Centre de Scotia Square, au centre-ville de Halifax. Elle est également présidente du SCFP 4745, qui représente 200 éducateurs et éducatrices de six garderies à but non lucratif financées par le gouvernement dans la région de Halifax.

Le ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance a récemment annoncé dans une directive que les garderies accréditées et les garderies en milieu familial, qui sont fermées depuis le 17 mars en raison de la pandémie, rouvriront le 15 juin.

Mardi, le Ministère a publié une série de directives de santé publique en vue de la réouverture, un document qui incorpore les conseils des pédiatres du Centre de santé IWK et la rétroaction de plus de 2 500 intervenants du secteur.

« Le manque d’équipement de protection nous inquiète beaucoup, souligne Mme Nickerson. Nous sommes préoccupés par la qualité et le nombre d’équipements que le gouvernement fournira aux garderies. »

« Nous croyons que le personnel des garderies devrait avoir droit aux mêmes équipements que ceux fournis au personnel des centres de soins de longue durée. Nous savons tous que c’est impossible d’appliquer la distanciation physique avec de jeunes enfants. »

Nickerson affirme que le directeur d’une garderie lui a indiqué que la province fournirait 80 masques par semaine pour 25 employés, alors que les employés des centres de soins de longue durée reçoivent deux masques par jour.

Selon elle, le nombre de masques fournis par le gouvernement permettra à peine de répondre aux situations d’urgence dans les garderies.

Dans ses directives, le Ministère indique que les enfants ne seront pas obligés de porter de masque et que « les employés devront suivre les pratiques actuelles d’utilisation des ÉPI en ce qui concerne les risques normalement rencontrés au travail, à l’exception qu’ils devront porter un masque médical lorsqu’ils ne peuvent pas maintenir une distance de deux mètres avec un enfant présentant des symptômes associés à la COVID‑19. »

Selon Nickerson, c’est inacceptable.

« Si on attend qu’un enfant ait des symptômes de COVID‑19, il aura déjà commencé à transmettre le virus et il sera trop tard », indique-t-elle.

« Au travail, nous sommes en contact très étroit avec les enfants tout au long de la journée. […] Nous sommes très craintifs. Selon certains, nous pourrions vivre une tragédie semblable à celle de Northwood si nous n’avons pas plus d’ÉPI. »

Nickerson déplore que les consignes de nettoyage soient incohérentes, tout comme la directive selon laquelle un enfant présentant des symptômes persistants d’écoulement nasal, de toux ou de reniflement pourra rester à la garderie, tandis qu’un employé présentant les mêmes symptômes devra retourner à la maison.

« Ça semble tout simplement incohérent, précipité et mal ficelé », indique-t-elle.

Les garderies comme celle où travaille Nickerson sont principalement financées par le gouvernement et les frais payés par les parents.

La directive gouvernementale est que toutes les garderies accréditées et les garderies en milieu familial de la province devront ouvrir à au moins 50 pour cent de leurs capacités la semaine prochaine.

Nickerson souligne que le nombre d’enfants accueillis variera selon la taille de la garderie. À titre d’exemple, en fonction de cette directive, environ 80 individus devraient être à la garderie de l’Université Dalhousie le jour de sa réouverture.

« Notre gouvernement aurait dû adopter l’approche de l’Île-du-Prince-Édouard, où la réouverture sera très graduelle avec un petit nombre d’enfants lors des deux premières semaines, après quoi une évaluation de la situation sera effectuée », indique Nickerson.

Selon elle, la directive de la Nouvelle-Écosse pourrait inciter certains directeurs à accueillir trop de jeunes trop vite, afin de s’assurer de conserver leur financement.

« Nous savons déjà que plusieurs de nos directeurs ont sondé les parents ces derniers jours, et ceux-ci ne sont pas encore prêts à renvoyer leurs enfants à la garderie. Ils veulent d’abord voir comment les choses vont se dérouler. »

« Certaines garderies ne rouvriront pas à 50 pour cent de leurs capacités et elles devront donc négocier avec le ministère de l’Éducation. Je présume que le Ministère se montrera compréhensif, mais on ne peut pas en être sûr. On se pose la question. »

Nickerson rappelle que le Ministère a clairement indiqué que toutes les garderies devront rouvrir à 100 pour cent de leurs capacités d’ici septembre, sans quoi leur financement sera affecté.

Elle indique que plusieurs membres de sa section locale ont peur de retourner au travail, mais qu’ils ont besoin de leur chèque de paie.

« Les membres à qui j’ai parlé se sentent sous-estimés et peu appréciés, et ils ont l’impression que le gouvernement nous envoie au front pour favoriser l’immunité collective ou quelque chose comme ça », conclut-elle.