Amanda Vyce | Service de recherche du SCFP
Avec la conclusion du nouvel Accord États-Unis-Mexique-Canada (AÉUMC), l’appel du SCFP à la création d’un régime public d’assurance-médicaments national prend encore plus d’importance. L’AÉUMC apporte en effet des modifications importantes aux règles régissant les médicaments dits « biologiques » comme les vaccins et les produits biotechnologiques.
Les médicaments biologiques sont fabriqués à partir de cellules vivantes. Actuellement, 17 produits de ce type sont disponibles au Canada. Si l’on tient compte des assurances publiques et privées, ainsi que des déboursés des individus, les dépenses pour ces produits atteignent plus de 7 milliards de dollars par année au pays.
Parmi les 10 médicaments pour lesquels nous dépensons le plus d’argent chaque année au Canada, sept sont des produits biologiques. Il y en avait un seul dans cette liste il y a 10 ans. Cette situation est préoccupante, car les produits biologiques sont extrêmement coûteux. D’ailleurs, les entreprises en développent de plus en plus en raison des profits qu’ils génèrent.
Non seulement les produits biologiques sont coûteux, mais ils contribuent à la privatisation de notre système de santé. Un réseau pancanadien de cliniques de perfusion privées fournissant des produits biologiques est déjà en opération. Des entreprises pharmaceutiques paient même des honoraires supplémentaires aux médecins qui administrent des perfusions de certains produits biologiques dans leurs bureaux. C’est la conséquence directe de notre système actuel d’assurance-médicaments, dans lequel les hôpitaux doivent payer les médicaments coûteux administrés sur place, alors que le coût des médicaments administrés hors site est assumé par le patient, par la centaine de régimes d’assurance publics ou les 100 000 régimes privés qu’on trouve au Canada.
L’AÉUMC alourdit le système actuel en faisant passer la période de protection des données relatives aux nouveaux produits biologiques de huit à 10 ans. Au Canada, les médicaments sur ordonnance sont protégés par deux types de propriété intellectuelle : le brevet et la protection des données. Le brevet accorde au fabricant d’un nouveau médicament le droit exclusif de le produire pendant 20 ans. La protection des données fait référence aux informations recueillies par les entreprises lors des essais cliniques qu’elles effectuent sur l’innocuité et l’efficacité de nouveaux médicaments. Ces informations sont essentielles à la fabrication et à la vente des médicaments.
Contrairement à la protection des données, on peut contester un brevet devant les tribunaux et le faire annuler. Cela permet aux médicaments génériques beaucoup moins chers d’arriver sur le marché plus rapidement. Si le brevet d’un produit biologique est annulé par un tribunal et que la protection des données demeure en vigueur, les deux années supplémentaires de protection que prévoit l’AÉUMC pourraient représenter jusqu’à 300 millions de dollars en coûts de prescription par année.
Le meilleur moyen de contrer cette augmentation potentielle du coût des médicaments consiste à se doter d’un régime d’assurance-médicaments national et public. Si les médicaments pour l’ensemble de la population sont achetés par un payeur unique, celui-ci dispose d’un pouvoir de négociation important pour faire baisser les prix. On contre ainsi les pressions de la privatisation provoquées par un système de couverture des médicaments fragmenté et des produits biologiques coûteux, mais efficaces.