Qu’est-ce qu’un incident critique et le stress causé par un incident critique?

Les incidents critiques sont des événements anormaux, bouleversants ou traumatisants qui se produisent alors qu’un employé est au travail. Le stress causé par un incident critique est le terme utilisé pour décrire les réactions normales des travailleurs qui vivent un incident critique ou en sont témoins. Par exemple, être victime d’un accident grave ou devoir intervenir dans une situation semblable, voir un collègue se blesser ou être témoin d’une catastrophe comme un ouragan ou un acte terroriste peuvent entraîner un stress causé par un incident critique.

Le risque de vivre un incident critique ou d’en être le témoin existe pour de nombreux emplois occupés par des membres du SCFP. Pour les premiers répondants, les répartiteurs ou les personnes qui travaillent dans les hôpitaux, les écoles, le secteur aérien, les bibliothèques et les installations municipales, le stress causé par un incident critique est en effet un risque bien réel en matière de santé et de sécurité.

Voici quelques exemples d’incidents critiques pouvant causer du stress :

  • la mort d’un collègue, soit au travail ou à la suite d’un incident au travail
  • une blessure grave mettant en danger la vie du travailleur ou celle d’un collègue
  • un accident évité de justesse qui a mis en danger la santé et la sécurité du travailleur ou d’un collègue
  • le suicide d’un collègue
  • la mort d’un patient malgré les tentatives pour le sauver
  • le décès d’enfants ou un incident critique les affectant
  • la violence infligée à soi-même ou à un collègue
  • un crime violent sur le lieu de travail ou à proximité
  • des événements qui suscitent un intérêt excessif des médias
  • des désastres naturels qui ont des répercussions sur le travail

Certains travailleurs sont plus susceptibles d’être exposés à un incident critique en raison de la nature de leur emploi. Les membres du SCFP qui travaillent comme premiers répondants ou dans des domaines liés à la sécurité des enfants sont beaucoup plus susceptibles de signaler un incident critique. Il incombe aux employeurs de ces travailleurs de reconnaître que le risque est élevé et de mettre en œuvre des mesures de contrôle en vue de prévenir le stress causé par un incident critique.

Premiers répondants

De nombreux membres du SCFP sont des premiers répondants. Ces emplois, comme les ambulanciers paramédicaux, les policiers, les agents de sécurité, les pompiers et les répartiteurs, font que ces travailleurs courent un risque élevé d’éprouver du stress causé par un incident critique. Lorsque ce stress n’est pas traité, il peut mener au trouble de stress post-traumatique (TSPT) et à la dépression. Au Canada, entre le 29 avril et le 31 décembre 2014, 27 premiers répondants se sont suicidés. Vingt-huit autres se sont enlevé la vie au cours des six premiers mois de 2015i.

Après un incident critique, les travailleurs disposent rarement du temps nécessaire pour prendre soin de leur santé mentale. Par conséquent, de nombreux premiers répondants accumulent leurs problèmes en étant continuellement exposés à des incidents critiques alors qu’ils tentent de se remettre d’incidents précédents.

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La culture machiste qui prévaut dans de nombreux milieux de travail contribue également aux problèmes des premiers répondants. Trop souvent, elle les dissuade d’exprimer leurs émotions, de signaler les incidents ou de demander de l’aide au travail ou à l’extérieur.

Réactions aux incidents critiques

Les travailleurs qui éprouvent du stress causé par un incident critique peuvent se sentir dépassés et incapables de mener à bien leurs activités quotidiennes. Après un incident critique, l’attitude d’un travailleur à l’endroit du travail et du milieu de travail peut changer de façon dramatique.

Les symptômes de stress causé par un incident critique peuvent varier grandement d’un travailleur à l’autre, même entre les personnes qui ont vécu ce même événement ou qui en ont été témoins. Certaines personnes ressentent des symptômes sur le champ, tandis que d’autres les verront apparaître graduellement. Ces symptômes comprennent le choc, le déni, la colère, la rage, la tristesse, la confusion, la terreur, la honte, l’humiliation, le deuil, la peine et même des pensées suicidaires. La nervosité, la fatigue, la frustration, la peur, la culpabilité, le blâme, l’instabilité émotive, les troubles du sommeil, les troubles alimentaires, la dépression, les cauchemars, les épisodes de sudation intense, l’hyper-vigilance, la paranoïa, les réactions phobiques et les problèmes de concentration ou d’angoisse sont d’autres symptômes. Les travailleurs peuvent avoir des « flash-backs » ou rappels d’images de l’incident. Certaines personnes cesseront de socialiser et les relations interpersonnelles peuvent devenir difficiles. L’absentéisme peut augmenter et, dans des cas extrêmes, les travailleurs peuvent essayer de se suicider. Si les travailleurs présentent encore des symptômes de stress causé par un incident critique 30 jours après l’événement traumatisant, un professionnel pourra établir qu’ils souffrent du trouble de stress post-traumatique.

Les employeurs croient souvent que les travailleurs devraient pouvoir faire face à un incident critique sans aide. Cette mentalité transfère le blâme et la responsabilité d’incidents critiques de l’employeur au travailleur pour un événement qui échappe au contrôle de ce dernier.

Si l’employeur n’offre aucun soutien ou si les inquiétudes du travailleur sont rejetées du revers de la main, les travailleurs peuvent avoir l’impression qu’on les laisse tomber. Cette situation peut entraîner une baisse du moral des employés, une augmentation des accidents au travail, un roulement du personnel, des dépressions et même des suicides.

Quelles sont les causes systémiques à l’origine des incidents critiques et de stress causé par un incident critique?

En général, nous pensons que le stress causé par un incident critique se produit dans des professions où les travailleurs font face à des blessures ou des décès potentiels, mais un milieu de travail dangereux peut occasionner des blessures graves et du stress dans n’importe quelle profession. De faibles procédures de sécurité rendent n’importe quel milieu de travail dangereux et peuvent entraîner des incidents critiques, comme la chute d’un toit ou la mort d’un employé qui travaille seul. Le manque de personnel et de faibles procédures de sécurité peuvent accroître la probabilité d’éruptions violentes de clients. De mauvaises conditions de travail, une charge de travail trop lourde et les heures supplémentaires peuvent augmenter les dangers entourant la sécurité dans n’importe quel genre de travail. Des politiques et des pratiques adéquates en matière de santé et de sécurité dans tous les lieux de travail diminueront le nombre d’incidents critiques.

Que faire à propos des incidents critiques et du stress causé par un incident critique?

1. Cerner le problème

Pour s’occuper du stress causé par un incident critique, la première étape consiste à reconnaître que les incidents critiques représentent une menace grave pour la santé et la sécurité. Si un incident critique se produit à votre lieu de travail, il est probable que les travailleurs ressentiront du stress dans la foulée. Les enquêtes et les techniques de schématisation s’avèrent d’excellents outils pour déterminer si des travailleurs éprouvent du stress causé par un incident critique.

2. Mesures préventives

La prévention est essentielle pour éviter le stress causé par un incident critique. Toutefois, dans certaines professions, il est difficile d’éviter ce stress. Les ambulanciers paramédicaux ainsi que d’autres travailleurs de première ligne font face à des incidents critiques dans le cadre de leur travail. Dans de nombreux milieux de travail, le stress causé par un incident critique peut par contre être évité. Les mesures suivantes peuvent contribuer à diminuer le nombre d’occurrences d’incidents critiques dans tous les lieux de travail.

  • Refuser des conditions de travail dangereuses et les heures supplémentaires inutiles.
  • Effectuer un examen complet de l’organisation du travail et des conditions qui ont occasionné des incidents critiques.
  • Mener régulièrement des inspections des lieux de travail afin de prévenir des incidents critiques et les dangers du stress causé par un incident critique.
  • Demander aux employeurs de prendre des mesures en vue d’améliorer les conditions de travail et d’atténuer les situations dangereuses qui peuvent provoquer des incidents critiques et du stress causé par un incident critique.
  • Insister pour que les employeurs gèrent les procédures et l’organisation du travail afin d’éliminer les incidents critiques et le stress causé par un incident critique.

3. Faire face à un incident critique

De nombreux membres du SCFP feront face à des incidents critiques au travail et planifier les mesures à prendre lorsque cela survient est l’étape la plus importante. Lorsqu’un incident critique se produit, les mesures suivantes peuvent contribuer à lutter contre le stress qui en découle :

  • Mettre en œuvre un programme de gestion du stress à la suite d’un incident critique qui met l’accent sur la santé et la sécurité des travailleurs. Ce programme doit comprendre les étapes standards (désamorçage de la situation et verbalisation) en vue de répondre aux besoins des membres affectés par le stress causé par un incident critique.
  • Élaborer une politique concernant les incidents critiques et le stress causé par un incident critique pour les lieux de travail où œuvrent des membres du SCFP. La prémisse à la base de cette politique est la suivante : les incidents critiques et le stress causé par un incident critique représentent des dangers pour la santé et la sécurité et toutes les mesures doivent être prises afin de les éviter.
  • Maintenir la question des incidents critiques et du stress causé par un incident critique à l’ordre du jour du Comité de la santé et de la sécurité jusqu’à ce qu’elle soit résolue.
  • Négocier des clauses spécifiques dans la convention lorsque les lois ne fournissent pas de mécanismes de contrôle ou de surveillance ou un accès à l’information en ce qui concerne les incidents critiques et le stress causé par un incident critique.
  • Offrir la formation développée par le Service d’éducation du SCFP sur les incidents critiques, le stress causé par un incident critique et ses effets.

Plans d’intervention en cas d’incident critique

Les plans d’intervention en cas d’incident critique doivent impliquer du personnel hautement qualifié, dont des professionnels de la santé mentale spécialement formés et prévoir un soutien adéquat des collègues de travail. Le rôle des professionnels est d’atténuer l’impact des incidents critiques en aidant les membres affectés à comprendre leurs réactions et à obtenir le soutien nécessaire pour gérer adéquatement leurs émotions.

À la suite d’un incident critique, il faut souvent pouvoir compter sur le soutien psychologique de collègues ou de professionnels de la santé mentale. Le counseling fait partie d’un programme de gestion du stress à la suite d’un incident critique. Il doit être coordonné par les représentants en santé et sécurité formés par le SCFP.

Le désamorçage du stress aigu constitue la première étape à entreprendre après un incident critique. Le stress aigu est habituellement ressenti de trois à huit heures après l’incident. Un conseiller ou un collègue de travail rencontre alors les travailleurs touchés en vue de leur fournir de l’information sur les réactions normales à la suite d’incidents critiques et de leur expliquer comment prendre soin de leur santé émotionnelle. Le conseiller ou le collègue fait également part des ressources disponibles aux travailleurs qui ont besoin d’une aide supplémentaire.

La verbalisation se déroule habituellement de 24 à 72 heures après l’incident. Les travailleurs parlent de l’impact émotionnel de l’incident. En général, une séance de verbalisation est dirigée par un professionnel de la santé mentale qui invite les travailleurs à raconter leur expérience pour qu’ils expriment et libèrent leurs émotions.

Le désamorçage et la verbalisation ne sont pas des substituts à la thérapie. Ils font partie d’un processus plus large visant à faire comprendre aux travailleurs que leurs réactions sont normales et à leur fournir les ressources nécessaires pour qu’ils puissent aller chercher de l’aide professionnelle.

Les procédures de suivi doivent permettre de communiquer avec les travailleurs et de les soutenir à long terme. Le stress causé par un incident critique peut provoquer des réactions immédiates, quelques heures ou mois plus tard. Les procédures de suivi sont vitales pour la santé des travailleurs. Les membres de la famille sont habituellement impliqués dans les étapes de suivi afin de veiller à ce que les travailleurs soient en mesure de composer avec les effets du stress lorsqu’ils sont à la maison.

Les programmes d’aide aux employés doivent comprendre des dispositions relatives au stress causé par un incident critique. Ils doivent également aborder la violence, le stress, la surcharge de travail, la dépendance, les relations interpersonnelles et les problèmes familiaux, les décès, les problèmes financiers et les maladies physiques. Un programme complet peut cerner et régler les problèmes avant que le stress causé par un incident critique prenne de l’ampleur et exacerbe un trouble de santé mentale. De plus, les travailleurs doivent être informés de la gamme complète des ressources disponibles, et de la manière de les utiliser.

Le meilleur programme d’aide aux employés ne sera toutefois d’une grande utilité si les conditions de travail des membres ne sont pas clairement établies et les dangers au travail éliminés. L’objectif premier demeure la prévention des incidents critiques afin d’éviter le stress causé par un incident critique.