Lorsqu’il est question de s’opposer au gouvernement colombien pour améliorer les droits des travailleuses et travailleurs, défendre les communautés et mettre fin au massacre des militant(e)s pour les droits de la personne, Berenice Celeita Alayon n’a pas son égale.
Pendant des décennies, cette leader et farouche défenseuse des droits de la personne s’est dressée contre des régimes de droite opposés à son existence même – des gouvernements qui non seulement refusaient de la rencontrer, mais l’exposaient également à des menaces d’assassinat.
Cependant, depuis l’élection de Gustavo Petro à la présidence et de Francia Márquez à la vice-présidence en 2022, Mme Celeita est confrontée à un nouveau défi : convaincre un gouvernement plus progressiste d’accélérer les grandes réformes dont la Colombie et son peuple ont désespérément besoin après des années d’exploitation et de violence.
Berenice Celeita Alayon est à la tête de l’Association pour la recherche et l’action sociale (Nomadesc). Lors de son passage au Congrès national du SCFP en 2023, elle a exhorté les membres du SCFP à maintenir leur mouvement de solidarité internationale pour défendre les communautés et sauver des vies.
L’élection d’un gouvernement progressiste a suscité une participation sans précédent des communautés noires, autochtones et rurales. « Cette participation massive, en particulier à Bogotá, a marqué l’histoire. Pour la première fois en 212 ans, la Plaza de Bolivar et ses abords ont été envahis par des gens de la campagne venus des quatre coins du pays », explique-t-elle.
Depuis, le nouveau gouvernement se montre disposé à rencontrer les syndicats. Aussi encourageant que ce changement puisse être, il a tardé à venir et la réforme structurelle se fait toujours attendre.
« Les inégalités sont profondes et persistantes en Colombie », déplore Mme Celeita. « La grande majorité des gens ne gagnent même pas le salaire minimum, et ce problème de taille est aussi aggravé par le fait que la droite continue de s’attaquer au mouvement pour la justice sociale. »
Le personnel de Nomadesc est régulièrement suivi, son bureau surveillé et ses téléphones mis sur écoute. Même après l’élection, le personnel continue de recevoir des menaces de mort. La sécurité demeure une source de préoccupation majeure, car la police, l’armée et les services de sécurité de l’État n’ont toujours pas fait l’objet d’une réforme.
Le pouvoir du capitalisme mondial constitue également un obstacle de taille à un changement systémique. La Colombie a conclu 17 accords de libre-échange qui l’obligent à exploiter les ressources naturelles dans des localités ciblées.
Les populations concernées s’opposent avec force à cet extractivisme, c’est-à-dire à l’extraction effrénée des ressources naturelles, en particulier dans le secteur minier, où des entreprises canadiennes sont présentes depuis longtemps. Néanmoins, il est difficile d’exiger des comptes de ces sociétés privées, car elles changent constamment de nom pour éviter tout litige et poursuivre leurs activités en Colombie. « Ce ne sont pas seulement nos ressources naturelles qui en prennent un coup : ces accords dépouillent les communautés autochtones et noires de leurs droits ancestraux », affirme Mme Celeita.
C’est là que la solidarité internationale joue un rôle crucial.
« Les pressions des Brigades de paix internationales, du SCFP, d’autres syndicats et la solidarité de nos allié(e)s à l’étranger sont absolument indispensables, pas à titre de solidarité économique, mais en tant que solidarité politique. La solidarité signifie de se mobiliser pour défendre la vie au sens large, pour défendre la nature et les différentes façons de penser », explique la militante.
La solidarité du SCFP renforce Nomadesc et son Université interculturelle des peuples – une université alternative d’éducation populaire qui est administrée par et pour les mouvements sociaux – ainsi que l’enseignement transformationnel, le développement social et la sensibilisation qu’elles offrent.
« Plusieurs membres du gouvernement actuel, y compris la vice-présidente, ont bénéficié des programmes de formation, des domaines de spécialisation et des installations de cette université soutenue par le SCFP », remarque Mme Celeita . « Je crois que la solidarité, ça se construit au fil du temps, en réaction à une crise mondiale comme celle que nous vivons actuellement. Alors, continuons de nous battre pour la transformation. »