Des parents et des groupes de défense crient haut et fort depuis des années leur mécontentement face aux dommages causés par le sous-financement et le manque de reconnaissance des services de soutien scolaire de l’éducation publique. Pour bon nombre d’enfants et de familles, il est presque impossible d’obtenir les ressources nécessaires pour favoriser l’apprentissage dans le système scolaire public de l’Alberta.
 
Le surmenage, les salaires insuffisants et la réduction des heures de travail aggravent depuis des années la pénurie de personnel de soutien dans les écoles primaires et secondaires, entraînant des conséquences dévastatrices dans un contexte de hausse du coût de la vie. « Jour après jour, des centaines de postes essentiels demeurent vacants dans nos écoles », a affirmé Mandy Lamoureux, présidente du SCFP 3550. 
 
Le SCFP représente 41 sections locales du secteur du soutien scolaire en Alberta, notamment des assistant(e)s en éducation, des bibliotechnicien(ne)s, des concierges, des adjoint(e)s en administration, des assistant(e)s en thérapie, des interprètes et plusieurs autres membres du personnel. Sans augmentation de salaire depuis plus de dix ans, ces travailleuses et travailleurs voient la valeur de leurs salaires diminuer d’année en année sans pouvoir espérer mieux en raison du plafond établi par le Parti conservateur uni (PCU) à la table de négociation.
 
En effet, la province exige que toutes les divisions scolaires en négociation respectent le plafond salarial imposé par le Provincial Bargaining and Compensation Office (PBCO), un organisme relevant du gouvernement provincial, dont une personne désignée assiste à la plupart des négociations en y exerçant un contrôle. Malgré des preuves évidentes du contraire, les ministres conservateurs affirment ne pas prendre part aux négociations entre les divisions scolaires et le SCFP, si bien que le président du SCFP-Alberta, Rory Gill, a adressé une lettre ouverte au gouvernement albertain dénonçant les actions et les déclarations qui minent l’intégrité du processus de négociation collective et exigeant que le gouvernement soit honnête quant à son rôle – en admettant qu’il travaille à l’encontre des intérêts des membres du SCFP, ou en les laissant négocier de bonne foi.
 
En plus de nier ouvertement son rôle dans le gel des salaires, le PCU nie également son incapacité à répondre à la croissance des inscriptions dans les écoles, ce qui a pour conséquence de creuser encore plus le déficit en éducation.
« Le gouvernement du PCU accorde des fonds publics aux écoles privées à un rythme alarmant, et la négligence intentionnelle dont il fait preuve envers notre système scolaire public aura, à long terme, de graves conséquences sur les élèves, les familles et, inévitablement, les communautés », a déclaré Rory Gill. 
Durant les élections provinciales de 2023, la première ministre et cheffe du PCU, Danielle Smith, promettait de créer 3 000 postes de soutien scolaire supplémentaires en Alberta. Or, aucun de ces postes ne peut exister si les divisions scolaires n’offrent que des miettes au personnel chargé de répondre aux besoins complexes des élèves dans des classes de plus en plus nombreuses. Non seulement les salaires ne suivent pas l’inflation fulgurante, mais après plus d’une décennie sans augmentations et en proie au gel salarial, il est devenu extrêmement difficile d’attirer et de retenir du personnel qualifié. « On parle d’emplois qualifiés », a souligné Kelly Salisbury, présidente du SCFP 4625. « On veut le mieux pour nos élèves, mais quand on n’arrive pas à répondre aux besoins de notre propre famille, on finit par se demander si c’est possible de continuer comme ça. » 
 
Le droit de grève est protégé constitutionnellement et représente la dernière ligne de défense du personnel de l’éducation du SCFP pour mettre fin à l’érosion des salaires et à l’effondrement de l’éducation publique en Alberta. « Dans le fond, cette lutte concerne l’avenir de l’éducation publique de qualité. On ne saurait trop insister sur le rôle crucial qu’on joue au quotidien. C’est désolant de laisser tomber les élèves dont les besoins ne sont pas comblés, c’est déchirant : d’un côté, on veut rester pour nos élèves, mais d’un autre, il faut bien gagner notre vie », a déclaré Michelle Bilodeau, membre du SCFP 3550. 
 
Mark Hancock, Rory Gill, Mandy Lamoureux et des milliers de membres du SCFP se dirigent vers l’Assemblée législative, où des milliers d’autres syndicalistes, parents et allié(e)s du public les rejoindront pour une manifestation politique, le 24 octobre 2024, premier jour prévu de la grève du SCFP 3550, avant que la province n’impose une commission d’enquête sur les différends.
Le 17 septembre 2024, le SCFP 2559 et le SCFP 2545, les deux sections locales du secteur de l’éducation à Fort McMurray, étaient sur le point de déclencher une grève lorsque la province est intervenue en nommant une commission d’enquête sur les différends, les obligeant ainsi à entrer dans un nouveau cycle de médiation. Le 24 octobre 2024, la province a usé de la même tactique pour freiner le SCFP 3550, la plus grande section locale du SCFP du secteur de l’éducation à Edmonton. Ce jour-là, les membres du SCFP ont organisé une manifestation politique devant l’Assemblée législative à laquelle ont participé des milliers d’allié(e)s du mouvement syndical, de parents et de membres du public sympathiques à leur cause, démontrant généreusement leur solidarité. Voyant ce qui l’attendait, le SCFP 4625 du comté de Sturgeon, en périphérie d’Edmonton, a décidé de reporter le dépôt de son avis de grève, le temps que les procédures de la commission d’enquête avec les autres sections locales prennent fin. 
 
Parmi les 36 autres sections locales du secteur de l’éducation en Alberta, presque toutes se sont concertées aussi vite que possible pour s’aligner sur les actions des quatre sections locales en grève. Les mandats de grève forts à majorité absolue, comme ceux que les membres du SCFP-Alberta ont donnés à leurs comités de négociation, sont plutôt rares dans la province et témoignent de l’importance de cette lutte. 

« On vit un moment historique », a affirmé Lynn Fleet, présidente du SCFP 2545 à Fort McMurray. « Ça fait des années que je fais partie de cette section locale et jamais je n’aurais imaginé me retrouver dehors, jour après jour par -30 degrés, à faire monter la pression, à me battre bec et ongles pour obtenir ne serait-ce qu’un peu de justice pour nos membres, mais aussi pour les élèves et les familles qui comptent sur nous au quotidien. La situation nous a ouvert les yeux sur le genre de député(e)s qu’on a élus dans notre communauté, et qui ont tourné si facilement le dos aux travailleuses et travailleurs. »

Les négociations individuelles entre les sections locales et les divisions scolaires se sont ainsi transformées en prise de position unanime du secteur de l’éducation du SCFP en Alberta contre l’imposition d’un plafond salarial par le gouvernement provincial et l’érosion de l’éducation publique. L’élan de solidarité à l’endroit du personnel de soutien scolaire dans toute la province et partout au pays est incroyable. Des sections locales du SCFP de toute taille, des allié(e)s du mouvement syndical, des parents, des militant(e)s pour les droits des personnes en situation de handicap, des organismes locaux et des petites entreprises s’unissent pour prouver qu’au-delà de la négociation, cette lutte concerne l’intégrité et la valorisation de notre système d’éducation public et des gens qui le portent à bout de bras. Il s’agit de l’une des plus grandes batailles du SCFP dans l’histoire récente de l’Alberta.
 
Pour découvrir comment vous pouvez soutenir les travailleuses et travailleurs de l’éducation en Alberta, rendezvous à SupportEducationWorkers.ca.