Graham Cox | Service de recherche

Les Conservateurs utilisent les accords commerciaux internationaux pour réduire de façon permanente la taille des gouvernements et augmenter la privatisation. Comment? Les accords commerciaux réduisent la capacité du gouvernement fédéral et des provinces de réglementer les activités économiques au Canada et à l’étranger.

Bon nombre de Canadiens pourraient être surpris d’apprendre que depuis 2009, le gouvernement conservateur a amorcé des négociations ou signé plusieurs accords commerciaux internationaux. Parmi les exemples importants, notons l’Accord économique et commercial global avec l’Union européenne, les négociations sous la gouverne des États-Unis du Partenariat transpacifique avec douze pays, l’Accord de libre-échange Canada-Corée et les accords inspirés de l’ALENA conclus avec plusieurs pays de l’Amérique latine. Plus récemment, les Conservateurs ont participé aux discussions de l’OMC sur l’Accord sur le commerce des services (ACS). En vertu de cette entente, les services publics seraient régis par les accords commerciaux.

Les Conservateurs affirment que les accords commerciaux ouvrent de « nouveaux » marchés. Or, nous échangeons déjà avec la plupart des pays avec lesquels nous avons signé des accords. En réalité, ces accords nous mettent en concurrence avec des régions comme l’Europe de l’Est où les salaires sont plus bas et la réglementation plus souple, ce qui exerce une pression à la baisse sur les salaires au Canada.

Les choix en matière de politique commerciale ne devraient pas être laissés entièrement entre les mains des soi-disant experts et lobbyistes du secteur privé. Il s’agit d’un enjeu politique qui touche tous les citoyens. La politique commerciale du Canada devrait faire l’ objet d’un débat public. La participation citoyenne est aussi primordiale. Finalement, les principes sous-jacents des négociations commerciales avec d’autres pays devraient refléter les valeurs de coopération, de solidarité et de développement durable chères aux travailleurs canadiens.

Cela peut sembler difficile, mais ces valeurs sont précisément celles qui ont incité les activistes européens à amorcer des discussions à l’échelle locale et à mettre au point des solutions de rechange progressistes aux accords commerciaux privilégiés par les entreprises. Sous la bannière « Trade isn’t working » (Le commerce ne fonctionne pas), une cinquantaine d’organismes et de réseaux européens ont uni leurs efforts pour proposer une alternative au libre-échange. Ils forment l’ Alternative Trade Mandate Alliance (Alliance pour une alternative commerciale).

L’ Alliance vise à développer une capacité d’organisation locale afin de permettre aux citoyens de participer aux discussions relatives au libre-échange et d’ être entendus.

En Europe, la mobilisation sur les enjeux relatifs au commerce a permis aux citoyens de se familiariser avec le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS) et de s’y opposer. L’ISDS permettrait aux entreprises de contourner les systèmes de justice locaux. Elles pourraient contester des lois adoptées démocratiquement en recourant à un système d’arbitrage international, ce qui est profondément injuste.

Le tollé soulevé par l’ISDS a fait en sorte que les partis et les mouvements de centre-gauche au Royaume-Uni, en France et en Allemagne ont pris position contre les dispositions relatives aux règlements de différends entre investisseurs et États. La conscientisation et l’opposition à l’ISDS ont pris tellement d’ampleur que le nouvel accord Japon-Australie ne renferme pas de disposition de cette nature.

Il s’agit d’un gain important, que nous pouvons aussi réaliser au Canada. Le SCFP fait partie du Réseau pour le commerce juste. Le syndicat invite les groupes locaux de partout au Canada à s’inspirer des actions de nos partenaires européens en organisant des discussions sur les effets des accords commerciaux. Les objectifs du Réseau sont les suivants :

  • accroître la conscientisation aux dangers des accords sur le commerce et les investissements.
  • dissiper le mythe selon lequel s’opposer au libre-échange ou le critiquer, c’ est être contre le commerce.
  • imaginer et promouvoir une vision alternative pour des accords de commerce justes qui profitent à la majorité, pas seulement à l’élite internationale des affaires.