SURVOL
Les quelque 170 000 membres du SCFP qui travaillent dans le secteur municipal s’occupent notamment des services d’aqueduc et d’égouts, de la voirie, de l’urbanisme, de la santé publique et des services éducatifs à la petite enfance. Ces membres représentent un peu plus de 20 % des membres du SCFP et sont principalement des cols blancs et des cols bleus. De la collecte des ordures au déneigement en passant par le traitement de l’eau, le travail des membres du SCFP dans le secteur municipal facilite la vie de la population au quotidien.
Le SCFP compte plus de 1 100 unités de négociation dans ce secteur qui représentent plus de 20 000 classifications d’emploi. Le tiers de la main-d’œuvre municipale occupe des postes occasionnels, auxiliaires ou à temps partiel. Parmi les deux autres tiers, 20 % occupent un poste saisonnier et travaillent en moyenne neuf mois par année. Le groupe démographique connaissant la plus forte croissance dans ce secteur est celui des femmes de 25 à 54 ans occupant un poste auxiliaire, occasionnel ou à temps partiel.
On dénombre au Canada plus de 3 500 municipalités. Ce sont les habitant(e)s qui élisent le conseil municipal et le maire ou la mairesse qui les dirigent.Pour offrir certains services, comme le traitement de l’eau potable et des eaux usées, ou d’autres grandes infrastructures, des municipalités sont regroupées en comtés ou en municipalités régionales. Dans le cas des communautés éloignées sans structure municipale, le gouvernement provincial crée des conseils des services de district. Les municipalités et les lois qui les gouvernent relèvent des gouvernements provinciaux.
ENJEUX
Précarité d’emploi et intelligence artificielle (IA)
Selon les sections locales du SCFP, les emplois municipaux se sont précarisés au cours des quinze dernières années. Les municipalités ont remplacé des emplois à plein temps par des emplois temporaires à temps partiel ne donnant pas droit aux mêmes avantages sociaux et régimes de retraite. Beaucoup de membres du SCFP multiplient donc les emplois précaires pour arriver. Les employeurs profitent du départ à la retraite des baby-boomers pour réduire leur effectif en laissant des postes vacants ou en remplaçant les postes permanents par des postes contractuels. Cette approche a entraîné des disparités de traitement au niveau des salaires et des avantages sociaux dans certains milieux de travail.
D’autre part, on remarque une hausse de l’utilisation de l’IA au sein des municipalités canadiennes. Cette nouvelle technologie est souvent vendue comme un moyen de réduire les coûts. Or, les municipalités doivent aussi tenir compte des possibles dépenses cachées, du risque de détérioration des services publics, et des enjeux de confidentialité des données. Elles doivent de plus veiller à ce que leurs services demeurent accessibles à tout le monde, y compris aux personnes âgées et à faible revenu, qui pourraient préférer le soutien en personne, voire carrément en avoir besoin.
Le SCFP a préparé des guides à l’intention des sections locales pour les aider à comprendre l’IA et à négocier de meilleures protections.
Privatisation
Plusieurs municipalités envisagent de recourir à la sous-traitance et de privatiser certains services, comme la collecte des ordures, l’entretien des parcs, les transports en commun et le déneigement. À Toronto et à Winnipeg, la privatisation de la collecte des ordures a entraîné une baisse de la qualité du service, des coûts cachés et le non-respect de normes du travail et de santé et sécurité pourtant fondamentales. Cela dit, la privatisation semble perdre de son attrait ailleurs au pays. Au nombre des municipalités qui ont rejeté la privatisation de certains services, on compte White Rock en Colombie-Britannique (eau potable), Wood Buffalo en Alberta (transport en commun) et même Moncton au Nouveau-Brunswick (traitement des eaux usées).
Les membres du SCFP du secteur municipal démontrent au quotidien que la prestation publique de services de qualité est préférable à la sous-traitance à des entreprises à but lucratif.
Les partenariats public-privé (PPP) et autres stratagèmes de privatisation inefficaces et antidémocratiques ne servent pas l’intérêt public. Il est temps de renoncer à cette obsession injustifiée et dépassée de transformer nos infrastructures et services publics en industrie lucrative.Le SCFP demande aux gouvernements fédéral et provinciaux d’abandonner leurs plans de privatisation des services et des actifs municipaux.
Infrastructures
Les municipalités du Canada sont aux prises avec une crise des infrastructures, causée par leur vieillissement, leur utilisation accrue en raison de la croissance démographique, et des facteurs extérieurs comme les changements climatiques. Les municipalités possèdent et gèrent environ 60 % des infrastructures publiques. Beaucoup sont vétustes et ont besoin d’être rénovées ou remplacées.Selon les estimations de l’Institut international du développement durable, cette situation occasionnerait un déficit en infrastructure global entre 150 milliards et 1 billion de dollars.
Les derniers budgets fédéraux ont réservé une somme substantielle à la rénovation des infrastructures, ce qui constitue une bonne nouvelle. Malheureusement, le gouvernement fédéral continue d’appuyer la réalisation des projets en PPP par l’entremise de la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) et du Fonds de croissance du Canada. De plus, il n’a investi qu’une partie du financement promis pour les infrastructures.
Pour ne rien arranger, l’administration fédérale de Mark Carney semble favoriser l’augmentation des investissements et de l’ingérence du secteur privé dans les services publics. Cette tendance, combinée aux pressions exercées par l’administration américaine, accroît grandement la vulnérabilité de nos infrastructures publiques et de nos ressources naturelles. Ce sont d’ailleurs les municipalités, leurs employé(e)s et leurs habitant(e)s qui risquent d’en ressentir de plein fouet les contrecoups.
Les municipalités ont besoin de financement fédéral direct à faible taux d’intérêt pour construire et gérer leurs infrastructures, tant matérielles (essentielles au fonctionnement de nos communautés) que sociales (qui assurent les soins à la population). C’est le modèle le plus efficace et le plus rentable pour construire des communautés fortes, sécuritaires et inclusives où il fait bon vivre.
Revenus municipaux
Les municipalités ont besoin de sources de revenus plus durables, diversifiées et importantes, comme l’ont démontré la pandémie de COVID-19 et les turbulences financières qui en ont résulté. Les municipalités doivent obtenir une part plus équitable des revenus fiscaux fédéraux et provinciaux pour se doter des infrastructures suffisantes et les entretenir adéquatement, protéger la santé publique et s’acquitter de leurs responsabilités croissantes.Le SCFP soutient les municipalités qui cherchent à accroître leurs sources de revenus, et poursuivra son travail de recherche, de consultation et de sensibilisation sur cette question. En 2024, la Fédération canadienne des municipalités (FCM) a publié un cadre de croissance municipale qui a obtenu l’appui sans réserve du SCFP. C’est maintenant au gouvernement fédéral de moderniser la politique fiscale qui régit les municipalités pour qu’elle reflète les défis propres au 21e siècle.
NÉGOCIATIONS
Structure de négociation
À l’échelle nationale, le SCFP est le principal syndicat dans le secteur municipal. Il représente le personnel de la plupart des grandes municipalités du pays, notamment celui des 10 plus grandes villes.
Chaque section locale négocie avec son conseil municipal. Bien des municipalités comptent plusieurs sections locales représentant différentes catégories d’emploi, par exemple les cols bleus et les cols blancs. Dans quelques grands centres urbains, certaines sections locales représentent le personnel de plusieurs municipalités. Par exemple, dans la région de York en Ontario, le SCFP 905 représente des membres de dix municipalités. C’est aussi le cas dans le Grand Vancouver.
En Colombie-Britannique, en Alberta et en Ontario, les négociations sont coordonnées par secteur ou par région. Plusieurs régions utilisent avec succès une approche où les gains obtenus par une section locale phare établissent la barre pour les autres sections locales du secteur.Ces dernières années, cette technique a porté ses fruits en Alberta et à l’Île-du-Prince-Édouard.
Les employé(e)s municipaux se heurtent aux mêmes préjugés que les autres fonctionnaires : gros salaire et excellents avantages sociaux pour un emploi facile. Cette campagne de désinformation menée par les employeurs limite notre poids pendant les négociations pour obtenir des gains importants, et particulièrement en période d’inflation élevée. Les budgets d’austérité adoptés dans plusieurs provinces rendent les négociations d’autant plus difficiles.
Sous-traitance et sécurité d’emploi
Les employeurs municipaux cherchent à affaiblir la sécurité d’emploi et à renforcer leurs droits pour faciliter la sous-traitance. En 2024, la section locale représentant le personnel de St. Catharines a réussi à renverser les plans de sous-traitance des services de foresterie.Plusieurs municipalités ont procédé à un examen des services de base offerts par leurs différentes équipes, une opération qui pave souvent la voie à la privatisation. Ces examens ne recommandent généralement rien d’autre que des compressions dans des services importants pour économiser quelques dollars. Les sections locales du SCFP ont mené la charge contre ces programmes d’austérité.
Salaires
Malgré des négociations difficiles, le SCFP continue d’obtenir des augmentations salariales pour ses membres dans le secteur municipal. Les taux d’inflation élevés atténuent cependant ces gains, ce qui rend nos campagnes de négociation d’autant plus importantes. Les sections locales continuent d’obtenir de petites améliorations aux régimes d’avantages sociaux. Toutefois, notre méfiance persiste face aux propositions qui, en créant des disparités de traitement, avantagent la main-d’œuvre actuelle tout en laissant pour compte les nouveaux employé(e)s. Cette tactique nuit à la solidarité entre travailleuses et travailleurs.
Régimes de retraite
Les sections locales municipales du SCFP travaillent à assurer la sécurité financière de leurs membres à la retraite : plus de 96 % des membres peuvent cotiser à un régime de retraite ou à un régime d’épargne-retraite auquel contribue l’employeur. Les trois quarts de ces membres ont accès à un régime à prestations déterminées.
Beaucoup participent à un régime à prestations déterminées qui regroupe plusieurs employeurs, comme le Municipal Pension Plan en Colombie-Britannique ou le Municipal Employees Benefit Program au Manitoba. Il s’agit d’excellents régimes, qui sont également viables. La crise économique mondiale de 2008 n’a pas épargné les régimes de retraite, toutefois les problèmes de financement ont été temporaires. Or, certains gouvernements et employeurs, ainsi que des groupes anti-secteur public, ont profité de la situation pour exiger une diminution des prestations des régimes de retraite municipaux. Dans la foulée des dépenses entraînées par la pandémie de COVID-19, le SCFP a défendu à nouveau ces régimes de retraite.
Certains régimes de retraite canadiens investissent massivement dans des infrastructures privatisées à l’échelle mondiale. Ce modèle d’investissement pourrait s’implanter au Canada si nos infrastructures publiques sont privatisées au profit des caisses de retraite.La Banque de l’infrastructure du Canada a été créée pour attirer les investissements des caisses de retraite dans les projets d’infrastructure en PPP. Pendant son processus budgétaire de 2024, le gouvernement fédéral a demandé à Stephen Poloz de trouver des moyens d’inciter les régimes de retraite canadiens à investir au pays. Ce dernier a notamment recommandé de modifier la limite actuelle qui empêche le secteur privé de détenir plus de 10 % des sociétés municipales fournissant des services publics.Il n’y a pas eu de développement récent à ce sujet, mais le SCFP continue de surveiller la situation, prêt à s’opposer à tous changements qui pourraient favoriser la privatisation des services publics.
CAMPAGNES
À l’échelle du pays, le SCFP travaille sur des dossiers communs avec la FCM et d’autres partenaires. De concert avec le Conseil des Canadiens, le SCFP défend la gestion municipale des cours d’eau et lutte contre la privatisation des services d’eau et d’eaux usées. Des membres du SCFP du secteur municipal participent à Communautés bleues, une campagne demandant aux municipalités de rejeter la privatisation, de reconnaître l’eau comme un droit fondamental, de cesser de couper l’eau aux personnes ayant de la difficulté à payer leur facture et de bannir l’eau embouteillée de leurs activités et des édifices publics.
Lors de la rencontre annuelle 2025 de la FCM, le SCFP a réuni un panel d’expert(e)s au sujet de l’IA. Les panélistes ont échangé sur ses bienfaits et ses risques, en plus de présenter les éléments que les responsables municipaux doivent considérer avant d’implanter l’IA dans leur communauté.
Les élections municipales sont d’une grande importance pour les membres du SCFP qui travaillent dans ce secteur. Les conseils municipaux influencent notre qualité de vie et nos conditions de travail. Les membres du SCFP collaborent étroitement avec d’autres organisations syndicales afin de faire élire des conseillères et conseillers municipaux qui protégeront et amélioreront les services publics. On peut assurément dire : « Votez comme si votre boulot en dépendait! »