Ce profil offre aux membres du SCFP des renseignements sur leur secteur de travail, et ce, dans une perspective nationale.
Plus de la moitié des travailleuses et des travailleurs du secteur de l’éducation au pays sont membres du SCFP. Répartis dans plus de 400 sections locales, 131 000 employé(e)s des écoles primaires et secondaires du pays sont en effet représentés par le SCFP. À l’exception de l’enseignement et de la direction des établissements, les membres du SCFP occupent tous les types d’emploi présents dans le système scolaire, et ce dans presque toutes les provinces.
En Ontario, le SCFP compte près de 55 000 membres dans ce secteur. Au Nouveau-Brunswick et à l’Île-du-Prince-Édouard, l’ensemble du personnel est représenté par le SCFP. L’éducation est donc un des secteurs d’emploi les plus importants du SCFP au Canada.
Les enjeux
Le sous-financement chronique
L’augmentation du financement ne suit pas celle du coût de la prestation de l’éducation et de l’entretien des édifices. Les conseils et les centres de services scolaires subissent des pressions énormes. Le financement réel par élève en Ontario a diminué constamment de 2012-2013 à aujourd’hui. Ajusté en fonction de l’inflation, il a diminué de 1100 dollars par rapport au sommet enregistré en 2011-2012, ce qui se traduit par une réduction réelle de 2,5 milliards de dollars en 2022-23. Pour en arriver là, le gouvernement de l’Ontario a utilisé des lois limitant les hausses salariales et s’est ingéré dans la libre négociation collective afin de maintenir les salaires à un niveau artificiellement bas. La pression ainsi exercée sur les conseils et les centres de services scolaires est intense, les forçant à faire des mises à pied et à laisser des postes non pourvus, ce qui aggrave les conditions de travail et d’apprentissage.
La situation est tout aussi désastreuse dans d’autres provinces. En Saskatchewan, le gouvernement du Parti de la Saskatchewan continue d’affamer le système d’éducation public. Le budget provincial de 2022-2023 ne prévoit qu’une augmentation de 1,5 % de l’enveloppe destinée aux divisions scolaires. Depuis 2016-2017, le financement des divisions n’a augmenté que de 5,1 %, tandis que l’indice des prix à la consommation a augmenté de 14,5 %. La faible augmentation du financement, combinée à l’escalade des coûts inflationnistes, a conduit de nombreuses divisions scolaires à éliminer des postes d’enseignant(e) et d’aide-enseignant(e), notamment. Certaines divisions ont l’intention d’introduire des frais de surveillance à l’heure du midi. Bien que le gouvernement provincial ait annoncé cet été qu’il débloquerait 20 millions de dollars supplémentaires pour aider les divisions scolaires à affronter la hausse des coûts de carburant et des assurances, aucune division n’a annulé les suppressions d’emplois prévues.
En Alberta, le financement des écoles publiques s’effectue maintenant en fonction d’une moyenne calculée sur trois ans. Cette formule pénalise les districts scolaires où le nombre d’inscriptions est en croissance. Par exemple, pour le district public d’Edmonton, ce nouveau calcul a entraîné cette année un manque à gagner équivalent aux coûts de prise en charge de 100 élèves.
Au Manitoba, les membres et alliés du SCFP ont riposté à des réformes proposées qui élimineraient les conseils scolaires pour centraliser toutes les décisions au ministère de l’Éducation. Ces mesures se sont avérées si impopulaires que le gouvernement a fait marche arrière. Malheureusement, il a maintenu sa décision de retirer aux divisions scolaires leur pouvoir de taxation, ce qui risque d’entraîner des réductions de personnel et de programmes.
La privatisation
Dans plusieurs provinces, l’utilisation de fonds publics pour financer des écoles privées et des partenariats public-privé (PPP) se généralise. La Colombie-Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, la Nouvelle-Écosse et le Québec subventionnent tous les écoles privées.
Dans son budget de 2022, la Saskatchewan a augmenté le financement des divisions scolaires publiques, catholiques et francophones de 1,5 % et de 16,7 le financement des écoles privées (ou « écoles indépendantes qualifiées »). La création d’une nouvelle catégorie d’écoles indépendantes qualifiées, l’école « associée », a aussi été annoncée dans le budget. Ces nouvelles écoles seront subventionnées à hauteur de 75 % du coût moyen par élève au lieu de 50 %.
En Alberta, le Parti conservateur uni continue de faciliter l’expansion des écoles à charte et l’érosion de l’enseignement public. En mars 2022, il a annoncé 25 millions de dollars en subventions de fonctionnement et un soutien en capital de 47 millions de dollars pour les écoles à charte en vertu de sa loi sur le choix en matière d’éducation, ce qui prive le système public d’autant de ressources nécessaires. L’Alberta compte 16 écoles à charte subventionnées et elle est la seule province du pays à les autoriser en ce moment. Cependant, la firme de sondage du Parti conservateur de l’Ontario a demandé cet été à échantillon de la population ontarienne si plus de ‘’choix’’ en matière d’éducation était souhaitable, notamment en créant des écoles à charte.
Plusieurs gouvernements ont construit des écoles publiques en partenariat public-privé (PPP) avec des entreprises à but lucratif, dont ceux de la Nouvelle-Écosse (qui a racheté celles-ci depuis), le Nouveau-Brunswick, la Saskatchewan et l’Alberta. Ces écoles coûtent plus cher et la qualité de l’enseignement y est généralement inférieure. De plus, leurs locaux ne sont pas accessibles après les cours et leur conception répond rarement aux besoins de la communauté au sens large. En 2018, la section locale 737 du SCFP au Manitoba s’est battu avec succès contre une proposition de construction de quatre écoles en mode PPP. Sa campagne s’intitulait Raise Red Flags.
Les membres du SCFP de partout au pays continueront de défendre le système scolaire public et demanderont aux gouvernements de prendre des mesures audacieuses pour financer celui-ci adéquatement et uniformément. Au lieu d’opter pour le sous-financement pour justifier les subventions versées aux écoles privées, les gouvernements provinciaux doivent financer un système scolaire public qui répond aux besoins des communautés.
La violence toujours en hausse
Contrairement aux membres du SCFP, une grande partie de la population n’a pas conscience de la violence et des menaces que subissent, au quotidien, les travailleuses et travailleurs du secteur de l’éducation en contact direct avec les élèves. Face à la hausse de la violence dans les écoles, les sections locales du SCFP militent en faveur de meilleurs mécanismes de formation et de signalement, en plus de faire respecter les droits conférés à leurs membres en vertu des lois sur la santé et la sécurité au travail.
L’expansion du système aux premières années d’apprentissage
Commencer l’éducation publique à un plus jeune âge permet d’améliorer le développement et le bien-être de l’enfant, l’égalité des femmes et leur présence sur le marché du travail, la qualité des soins et la qualité des emplois dans les services éducatifs à l’enfance. En 2021, les gouvernements de l’Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve-et-Labrador ont élargi leur système d’éducation publique aux premières années d’apprentissage (4 et 5 ans). L’Île-du-Prince-Édouard offre actuellement 15 heures par semaine de prématernelle dans les garderies. Terre-Neuve-et-Labrador pilote actuellement un programme de prématernelle dans 35 YMCA.
En 2019, le gouvernement de la Coalition Avenir Québec a adopté une loi pour rendre la prématernelle accessible aux enfants de quatre ans partout en province. Malheureusement, comme un réseau de garderies subventionnées existe déjà au Québec contrairement aux autres provinces, cette décision a créé un système parallèle inutile tout en ajoutant des contraintes de financement et en augmentant le ratio élève-enseignant(e) dans les écoles québécoises.
Les salaires
Les membres du SCFP du secteur de l’éducation ripostent après des années d’austérité et de gel des salaires. En 2021, les travailleuses et travailleurs de l’éducation du Nouveau-Brunswick se sont joints à la grève provinciale du SCFP pour exiger que leur salaire suive au moins le rythme de l’inflation et comble l’écart salarial créé par le gouvernement après des années de sous-rémunération.
En Ontario, les membres du SCFP ont été soumis à la loi 124 qui a plafonné leurs augmentations de salaire à 1 % par année. En 2022, le SCFP-Ontario a lancé la campagne 39 000 $, ce n’est pas assez. Cette somme correspond au revenu moyen d’un membre du SCFP dans le système scolaire ontarien.
En Colombie-Britannique, les travailleuses et travailleurs de l’éducation ont obtenu une augmentation de salaire supplémentaire de 0,25 $ l’heure plus 3,24 % en 2022, une augmentation minimale de 5,5 à 6,74 % en 2023, une augmentation de 2 % en 2024, ainsi qu’un ajustement au coût de la vie de 1 % pour la dernière année.
Les retards accumulés dans les négociations en raison de la pandémie de COVID-19 expliquent en partie pourquoi 38 des 41 sections locales du secteur de l’éducation de l’Alberta sont à la table ou sur le point d’entamer les négociations. Avec le soutien des membres du comité des employé(e)s de l’éducation de l’Alberta, elles s’opposent au mandat salarial du gouvernement qui prévoit un gel la première année, une augmentation de 2,25 % les deux années suivantes, ainsi qu’un mécanisme complexe de « partage des gains » d’une valeur dérisoire de 0,5 % si le PIB est nettement plus élevé que prévu au cours de la deuxième année. Les membres du SCFP en Alberta ont encaissé un gel salarial pendant huit à dix ans et en ont marre des mandats salariaux des conservateurs qui accentuent leur retard salarial. Les sections locales ont convenu de rejeter l’offre patronale à la table de négociations et travaillent ensemble pour forcer le gouvernement à retirer son mandat salarial.
En Saskatchewan, après des années de négociations marquées par l’austérité, la plupart des sections locales scolaires ont réussi à obtenir des augmentations salariales annuelles de 2 % au cours des deux dernières années. Certaines sections locales ont aussi réussi à négocier des congés de maladie payés en lien avec la pandémie.
La Saskatchewan est l’une des rares provinces sans aucune forme de négociation centralisée pour le personnel de soutien. Des efforts ont été déployés, ces dernières années, pour faire concorder les dates d’expiration des conventions collectives. Ainsi, 10 conventions collectives couvrant 4000 des 7000 travailleuses et travailleurs en soutien scolaire membres du SCFP dans la province sont venues à échéance le 31 août 2022. Compte tenu du sous-financement chronique du secteur de l’éducation et de la montée en flèche de l’inflation, il sera extrêmement difficile pour ces sections locales du SCFP de négocier des augmentations salariales qui suivent l’augmentation du coût de la vie.
Au Manitoba, le personnel de l’éducation était assujetti à une loi sur le gel des salaires. Cependant, grâce à des négociations coordonnées et, dans le cas de la section locale 1630, à une grève de quatre mois en plein hiver, le SCFP a réussi à obtenir de modestes augmentations salariales à chaque année de la convention, y compris un ajustement au coût de la vie la dernière année.
Les régimes de retraite
Plus de 90 % des travailleuses et des travailleurs du secteur de l’éducation membres du SCFP ont un régime de retraite à prestations déterminées et la quasi-totalité ont un régime de retraite. Les membres du SCFP au Manitoba exercent des pressions sur leurs employeurs pour obtenir un régime à prestations déterminées qui remplacerait les régimes à cotisations déterminées moins généreux qui sont la norme dans le secteur de cette province. L’élection d’un gouvernement néo-démocrate lors des élections provinciales de 2023 pourrait permettre d’atteindre cet objectif.
En Ontario, la Fiducie d’avantages sociaux des travailleuses et travailleurs de l’éducation du SCFP a été créée en 2018. Elle offre un régime d’avantages sociaux commun à toute la province. Il est financé par le gouvernement provincial, mais géré et contrôlé par le SCFP. C’est la deuxième fiducie de ce type en éducation à laquelle le SCFP participe, après celle de la Colombie-Britannique mise sur pied il y a plusieurs années. Au Québec, la plupart des membres du SCFP du secteur de l’éducation participent au régime d’avantages sociaux multisyndical et multisectoriel du Comité paritaire intersectoriel de la FTQ.