Le plus grand syndicat du secteur hospitalier de l’Ontario, qui représente 45 000 travailleuses et travailleurs, est entré en négociation aujourd’hui avec l’Association des hôpitaux de l’Ontario. Les grandes priorités du Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario du SCFP (CSHO-SCFP) : les ratios infirmière/patient(e)s, la sécurité d’emploi et la rémunération.
« On a une bonne centaine d’études d’un peu partout qui prouvent que l’application de bons ratios infirmière/patient(e)s sauve des vies – alors qu’attendons-nous pour passer à l’action? » s’interroge Michael Hurley, président du CSHO-SCFP. « L’application de ratios serait transformatrice pour les hôpitaux de l’Ontario. On aurait de meilleurs soins, la charge de travail s’en trouverait réduite, et on générerait des économies substantielles. Espérons que l’association des hôpitaux examinera sérieusement cette proposition, qui s’appuie sur une solide documentation. »
La Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse ont récemment instauré un ratio infirmière/patient(e)s, et le Manitoba étudie la possibilité. C’est la Californie qui a ouvert le bal en 2004 en appliquant des normes de dotation du personnel infirmier. D’autres États des États-Unis et l’Australie ont emboîté le pas.
Le président du CSHO-SCFP estime que les ratios de dotation viendraient contrer la pénurie de personnel infirmier. Il cite en exemple la province australienne de Victoria, où l’instauration de ratios en 2015 a ramené dans le giron des hôpitaux 7 000 infirmières et infirmiers qui avaient quitté le milieu, reboostant de 24 % de l’effectif.
Ajouter des ratios de dotation au contrat de travail améliorerait grandement les conditions du secteur, où l’épuisement chronique et le surmenage sont monnaie courante. À preuve : le nombre de postes vacants a bondi de 331 % depuis 2015.
La secrétaire-trésorière du CSHO-SCFP Sharon Richer explique que la pénurie de personnel est aussi attribuable à la progression limitée des salaires.
Elle déplore que la rémunération de cet effectif majoritairement féminin et disproportionnellement racialisé n’ait pas suivi l’inflation. Le salaire moyen ajusté des postes vacants était 13 % plus bas en 2024 qu’en 2015.
« La charge des travailleuses et travailleurs s’alourdit et leur liste de responsabilités s’allonge, alors que leur revenu accuse un recul, ajoute-t-elle. Il n’est pas surprenant, dans ces circonstances, que tant de personnes quittent le domaine. La population est pénalisée par cette situation, car le manque de personnel allonge les délais d’attente, cause des retards dans les traitements et, plus alarmant encore, entraîne la fermeture de services. »
Le syndicat craint aussi qu’on utilise de plus en plus l’intelligence artificielle dans les hôpitaux et veut s’assurer que tout changement technologique se fasse en toute transparence de la part du patronat, après une véritable consultation du syndicat.
« Les hôpitaux ne sont pas honnêtes quant aux conséquences des technologies, signale le président du CSHO-SCFP. L’utilisation croissante de l’IA vise à supprimer des postes et à réduire les coûts. Or, on tait soigneusement les répercussions négatives que ça implique pour la patientèle et le personnel. Les robots conçus pour interagir avec les personnes gravement malades sont un exemple d’utilisation malavisée de la technologie, uniquement motivée par des considérations financières. »
« Que les améliorations technologiques soient essentielles pour améliorer la qualité, c’est une chose. Mais que les hôpitaux forment alors le personnel bousculé par ces changements. Par exemple, requalifiez les employé(e)s de bureau dont on supprime les postes pour contrer l’importante pénurie de personnel infirmier qui sévit. »
Les négociations se dérouleront du 15 au 29 septembre. Le contrat précédent avait été signé pour deux ans, de septembre 2023 à septembre 2025.