Selon le SCFP, le récent plan d’action fédéral pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe ne va pas assez loin pour contrer la violence au travail et mesurer les résultats.
Le 9 novembre, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont approuvé le nouveau plan national du gouvernement du Canada. Le SCFP et les organisations féministes réclament depuis longtemps un plan solide, à long terme et entièrement financé. Nous avons plaidé pour un plan qui investit dans les services publics qui assurent la sécurité des victimes et des personnes survivantes, un plan qui s’attaque de manière significative à la violence et au harcèlement au travail et qui dispose de solides mécanismes de surveillance et d’application. Le plan présenté par le gouvernement fédéral est insuffisant sur ces trois fronts.
Une série de suggestions et d’options, pas un vrai plan
Premièrement, ce plan n’en est pas un. Il suggère des mesures aux provinces et aux territoires dans cinq domaines : le soutien aux personnes survivantes et à leurs proches, la prévention de la violence, le système judiciaire, les initiatives menées par les Autochtones pour mettre fin à la violence et la prestation de services.
Bon nombre des mesures suggérées sont positives, mais le plan n’inclut aucun mécanisme pour obliger les gouvernements à les mettre en œuvre ni aucune indication concernant l’échéancier ou les priorités. Les mesures suggérées ne sont qu’un menu d’options que les gouvernements doivent envisager.
Le SCFP appuie les appels d’Hébergement femmes Canada et d’autres organismes à élaborer des exigences claires pour les provinces et les territoires, ainsi qu’un échéancier pour les respecter. Ces appels sont décrits dans la feuille de route des organismes pour un plan d’action national.
Pire encore, aucune des mesures recommandées dans le plan n’est accompagnée d’un nouveau financement. Le gouvernement fédéral dit qu’il négociera des ententes bilatérales avec les provinces et les territoires au cours des prochains mois, et c’est à ce moment-là que les détails du financement seront dévoilés. On peut difficilement qualifiée l’annonce fédéral de plan d’action si on ne connait pas le montant alloué à sa réalisation et les conditions assorties à cette somme.
Le SCFP exhorte les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à augmenter considérablement le financement des services sociaux s’adressant aux personnes touchées par la violence et à veiller à ce que le personnel des maisons de transition et les autres prestataires de services aient un salaire équitable et de bonnes conditions de travail.
Un important traité mondial passé sous silence
Deuxièmement, le plan reconnaît que la violence et le harcèlement fondés sur le sexe se produisent souvent au travail. Le SCFP accueille favorablement les mesures recommandées pour lutter contre la violence et le harcèlement au travail. On parle notamment de lancer des campagnes de sensibilisation sur la violence fondée sur le sexe au travail et de promouvoir des soins qui répondent aux besoins des personnes exposées à cette violence.
Par contre, le plan ne fait aucune mention de la convention no 190 de l’Organisation internationale du travail, le premier traité mondial sur la violence et le harcèlement dans le monde du travail. Ce document définit des politiques claires et respectueuses des genres que les gouvernements et les employeurs doivent mettre en œuvre. Il oblige aussi les pays signataires à adopter de solides mécanismes d’application.
Vingt pays ont ratifié la convention no 190. Il est honteux que le Canada n’en fasse pas partie. Si le gouvernement fédéral voulait vraiment s’attaquer à la violence au travail, il ratifierait la convention immédiatement dans le cadre de son plan d’action national.
Suivi et reddition de compte faméliques
Enfin, le plan ne définit pas de cadre de suivi, d’évaluation, de reddition de comptes et d’apprentissage (SERA) digne de ce nom, comme le réclame la feuille de route. Il se contente de mentionner l’importance des rapports et du suivi, ainsi que la nécessité d’adopter une approche coordonnée entre les gouvernements pour la collecte de données et l’élaboration d’indicateurs de progrès.
L’organisation des Nations Unies ONU Femmes affirme qu’un investissement précoce dans le suivi et l’évaluation est essentiel à la réussite de la mise en œuvre des plans d’action nationaux pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe. Trop d’initiatives destinées à lutter contre cette violence dans d’autres pays n’ont pas réussi à mesurer les progrès ou à exiger des comptes aux gouvernements, aux employeurs et aux institutions qui ne respectaient pas leurs engagements. Par exemple, l’Australie a eu plusieurs plans d’action nationaux triennaux. Les premiers semblaient avoir peu d’effet, les spécialistes ayant identifié le manque de suivi, d’évaluation, de reddition de comptes et d’apprentissage comme l’une des principales raisons de cet échec.
La violence fondée sur le sexe est une crise au Canada. Nous avons désespérément besoin d’une action gouvernementale musclée pour prévenir la violence et assurer la sécurité des femmes, des filles, des personnes non binaires et des personnes bispirituelles. Ce que le gouvernement fédéral vient d’annoncer est une première étape, pas un plan.