Kelti Cameron | Agente principale, Solidarité internationale
Le gouvernement fédéral fait la promotion d’un stratagème de privatisation qui utilise les fonds publics pour aider des investisseurs privés à tirer profit de la nécessité pour la planète de lutter contre la pauvreté, les inégalités et les changements climatiques.
Ce modèle, connu sous le nom de « financement mixte », utilise l’argent des contribuables affecté à l’aide étrangère pour attirer et subventionner des investissements privés dans des projets qui prétendent promouvoir le développement durable. Or, ce modèle et les investisseurs prédateurs qui en profitent contribuent à la crise climatique et à l’augmentation des inégalités.
Le SCFP fait partie du Projet de financement mixte, une coalition qui s’oppose à la volonté du Canada de privatiser l’aide internationale. Les pays européens encouragent le financement mixte depuis plus d’une décennie. Le gouvernement libéral a sauté dans ce train au nom des objectifs de développement durable (ODD) (en anglais seulement) des Nations Unies. Les ODD sont ambitieux. Ils visent à mettre fin à la pauvreté et à faire progresser le développement économique, social et environnemental. Les pays membres de l’ONU ont promis d’atteindre ces objectifs d’ici 2030.
L’expérience européenne démontre toutefois que le financement mixte ne permet pas de soutenir les pays et les personnes qui en ont le plus besoin. Même s’il existe de nombreuses preuves que la privatisation a échoué au Canada et ailleurs dans le monde, le gouvernement canadien redouble d’efforts pour exporter ce modèle. En 2017, les libéraux ont créé un organisme fédéral appelé FinDev Canada pour favoriser la conclusion d’ententes internationales de privatisation. Le Canada est également l’un des principaux commanditaires de la plateforme Convergence, une organisation mondiale qui facilite ces stratagèmes, dont le siège social est situé à Toronto.
Utiliser le financement mixte pour soi-disant effectuer du développement durable, c’est brasser de grosses affaires. On parle d’importants contrats d’infrastructures « vertes », comme les énergies renouvelables et les infrastructures hydrauliques et énergétiques.
Le secteur privé prétend que l’atteinte des objectifs de développement durable permettra de combler le déficit de financement et de réduire la pauvreté. En fait, une imposition juste et une redistribution plus équitable de la richesse à l’échelle mondiale seraient de meilleurs gages de succès. Cette avenue n’est toutefois d’aucun intérêt pour le secteur privé.
Alors que nous nous tournons vers l’après-pandémie, le Canada doit se joindre à la communauté internationale pour empêcher le secteur privé de tirer profit des besoins mondiaux croissants.
Lors d’un récent webinaire organisé par le Projet de financement mixte, Masaya Llavaneras Blanco du Development Alternatives with Women for a New Era a déclaré que « les organisations de la société civile du Nord doivent tenir leurs gouvernements responsables de ce qui est fait en leur nom dans le Sud. »
Elle a ajouté que « les organisations de la société civile des régions riches, moins riches et en développement doivent tisser des liens et travailler en coalition […] Je crois que nous pouvons nous appuyer sur la longue histoire des mouvements sociaux transnationaux. »
Development Alternatives with Women for a New Era est un réseau d’universitaires, de chercheuses et de militantes féministes du Sud qui prône la justice économique et de genre, ainsi que le développement durable et démocratique.
Le SCFP appuie l’instauration d’une imposition progressive des entreprises et des riches, et l’élimination des allégements fiscaux et autres incitatifs offerts à l’entreprise privée. Ces mesures favoriseraient une reprise équitable et résiliente après la pandémie, ce qui permettrait aux gouvernements de renforcer leurs services publics sans avoir à compter sur l’investissement étranger.