En raison de la privatisation de la collecte des ordures à Winnipeg, des travailleurs occupent des emplois précaires, dangereux et mal rémunérés, et ce, sans protection et formation adéquates.

Selon une étude du Centre canadien de politiques alternatives, entre 2012 et 2017, une part importante de la collecte des ordures a été confiée à des travailleurs journaliers embauchés par l’entremise d’agences de placement temporaire. La majorité de ces travailleurs précaires étaient autochtones ou métis.

L’étude intitulée Trashed: How Outsourcing Municipal Solid Waste Collection Kicks Workers to the Curb (À la poubelle, ou comment la sous-traitance de la collecte des ordures met les travailleurs à la rue) s’intéresse aux activités de l’entreprise Emterra qui détenait un contrat pour la collecte de la plupart des ordures de Winnipeg de 2012 au mois d’octobre dernier.

Le document explique que des fonds publics ont été versés à une entreprise qui a exploité et mis en danger des personnes vulnérables. Selon les conclusions de l’étude, la Ville de Winnipeg devrait plutôt offrir de bons emplois directement et offrir de la formation aux travailleurs qui doivent surmonter des obstacles à l’emploi.

De plus, dans le cadre de leurs plans de mise en œuvre des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation, l’administration municipale et le gouvernement provincial devraient aider les travailleurs marginalisés à s’intégrer au marché du travail, notamment en leur fournissant de bons emplois d’éboueurs.

En 2005, la municipalité a confié l’ensemble des opérations de collecte des ordures au privé. Auparavant, un entrepreneur privé et les employés municipaux membres de la section locale 500 du SCFP se partageaient la tâche. En 2013, la section locale 500 a syndiqué les éboueurs et les chauffeurs de benne à ordures d’Emterra.

Pour diminuer ses coûts d’opération, Emterra a par la suite confié la majorité de la collecte des ordures à des sous-traitants qui emploient des travailleurs temporaires.

L’étude souligne la réduction importante des salaires et des conditions de travail des employés survenue à la suite de la privatisation totale et de la sous-traitance. Bon nombre des travailleurs à l’emploi des sous-traitants vivent même sous le seuil de pauvreté. En tant qu’employés temporaires, ils ont peu ou pas de pouvoir sur leur horaire de travail. Ils ne savent même pas s’ils travailleront le lendemain.

L’auteure du rapport, Ellen Smirl, a rencontré 20 travailleurs précaires affectés à la collecte des ordures. Elle a aussi consulté les dossiers de la province en matière de sécurité et de sécurité au travail. Les travailleurs ont fait état de nombreux dangers et plusieurs infractions. Ils ont aussi dit craindre de signaler les accidents et les conditions de travail dangereuses. L’un d’eux a affirmé avoir été sanctionné parce qu’il avait dénoncé la situation.

Malgré les menaces de représailles, l’étude a recensé 22 ordonnances de cessation du travail émises par la Division de la sécurité et de l’hygiène du travail du Manitoba pour des infractions qui posent un risque à la sécurité et à la vie des travailleurs.

En 2017, la municipalité a retenu les services de nouveaux entrepreneurs privés sans envisager sérieusement le rapatriement à l’interne, une solution qui aurait pourtant permis d’améliorer les normes d’emploi et d’optimiser l’usage des fonds publics. Les nouvelles entreprises ont encore la possibilité d’exploiter les travailleurs en recourant à la sous-traitance.

« Un des problèmes avec la sous-traitance, c’est qu’on a très peu de contrôle sur ce que fait l’entrepreneur, car, au bout du compte, il a pour objectif de faire de l’argent, pas de fournir un service de qualité », a expliqué le président de la section locale 500, Gord Delbridge.

La section locale 500 poursuit sa croisade en vue de rapatrier la collecte des ordures à l’interne. Au début du mois, la Ville de Winnipeg a décidé de confier la collecte des ordures des immeubles multifamiliaux, comme les immeubles locatifs et en copropriété, à ses employés municipaux. Ce projet pilote sera lancé en 2020.