À Toronto, la prestation publique de la collecte des ordures fonctionne bien. La prestation municipale est le meilleur gage de qualité, la garantie que le service répondra aux attentes de la population et qu’il permettra à la ville d’atteindre ses cibles à long terme de détournement des ordures. Le service municipal de collecte des ordures est fiable, efficace, transparent et adaptable. Protégeons et élargissons ce modèle qui a fait ses preuves.
Le secteur public offre un meilleur service
Les employés municipaux s’efforcent d’offrir le meilleur service de collecte des ordures possible… et ça parait. On constate un degré de satisfaction élevé et croissant face au service municipal dans les districts 3 et 4. Dans les districts 1 et 2, où on a privatisé le service, les plaintes sont en hausse.
Les statistiques sur les plaintes dans les premiers trimestres de 2013 et 2014 montrent que les employés municipaux font des progrès dans l’amélioration des services. Dans le district 4, l’amélioration est considérable, le nombre de plaintes ayant chuté de 63 pour cent entre 2013 et 2014. Il a diminué de plus de 7 pour cent dans le district 3 au cours de la même période.
Pendant ce temps, la satisfaction envers les services privatisés a décliné rapidement. Les plaintes contre GLF ont plus que doublé dans le district 2, grimpant de 117 pour cent; elles ont augmenté de près de 56 pour cent dans le district 1.
À l’échelle de la ville, près des deux tiers des plaintes déposées dans les trois premiers mois de 2014, soit 64 pour cent, concernaient le service de GFL dans les districts 1 et 2.
Exemplaire sur le plan environnemental
Toronto peut (et doit) en faire plus pour dépasser son objectif de détourner des sites d’enfouissement 70 pour cent des ordures. En offrant elle-même les services de collecte, la ville s’assure le contrôle et la flexibilité nécessaires pour fixer et respecter des normes élevées, ainsi que pour lancer de nouvelles initiatives.
La ville supervise directement son personnel pour s’assurer que les déchets de construction, les matières dangereuses et les gros rebuts ne se retrouvent pas au dépotoir. Les règles qui encadrent ce qu’on peut et ne peut pas ramasser sur le bord de la rue sont appliquées dans les stations de transbordement municipales. Nous ne pouvons pas exercer la même supervision dans les stations de transbordement privées. Les entrepreneurs privés sont payés à la tonne, peu importe le type d’ordures. C’est dire si ces entrepreneurs sont peu motivés à détourner du dépotoir les matières recyclables et compostables.
La collecte privatisée contraint les municipalités à recourir à une supervision coûteuse en ressources financières et humaines. La Toronto Environmental Alliance a recensé des problèmes dans les contrats de collecte privatisée à Toronto et dans sa région métropolitaine. Ces problèmes font ressortir du laxisme dans la surveillance et l’application des règlements. Son étude de 2011 conclut que « selon des indices probants, les éboueurs privés mettent en péril le détournement des ordures ».
Cette étude soulignait aussi que les coûts pour une surveillance adéquate d’un contrat de collecte des ordures représentent 20 pour cent de la valeur de ce contrat. Voilà qui fait gonfler considérablement le coût réel de la sous-traitance. La ville tait des renseignements importants sur la surveillance du contrat dans le district 1. Et selon la vérificatrice générale de la ville, on dépense 700 000 $ par année pour la surveillance et l’application du contrat du district 2, ce qui est bien en deçà du minimum de 20 pour cent nécessaire selon le rapport de la TEA.
Les éboueurs et leur syndicat, la section locale 416 du SCFP, ont plaidé régulièrement en faveur des programmes écoresponsables de collecte des ordures. Le SCFP a participé à l’instauration du bac bleu à Toronto à la fin des années 1980. En 2000, il a aussi œuvré avec la Toronto Environmental Alliance et le Conseil du travail de Toronto et de la région de York pour préparer l’arrivée du bac vert, qui a été l’un des tout premiers programmes de collecte des matières compostables en Amérique du Nord.
Nous avons atteint un taux de détournement de 67,6 pour cent pour les ordures résidentielles, mais le taux global de la ville stagne autour de 50 pour cent. Le SCFP propose donc d’étendre la collecte municipale des déchets compostables aux immeubles à logements et aux condos, ainsi que d’améliorer le recyclage en milieu industriel, commercial et institutionnel.
Responsable et transparent
Au municipal, la collecte des ordures répond à une chaîne de responsabilité et de reddition de comptes évidente. La privatisation a tendance à brouiller ces chaînes, laissant sans réponse d’importantes questions sur la capacité des entrepreneurs privés à respecter les modalités de leur contrat.
Selon des documents obtenus par le truchement de loi sur l’accès à l’information, GFL manque régulièrement à son devoir de terminer ses rondes avant 18 heures. Cette échéance contractuelle lui accorde déjà une heure de plus que ce que prévoit le Code municipal pour la collecte municipale; il semble que les négociateurs aient admis d’emblée que l’entrepreneur serait incapable d’être aussi efficace que le secteur public.
De mai 2012 à janvier 2013, on a recensé des bennes à ordure de GFL sur la voie publique après 18 heures à 1 419 reprises et à 2 800 reprises après 17 heures, soit l’heure à laquelle les bennes de la ville doivent être de retour à la cour municipale. Ces camions toujours sur les routes à cette heure contribuent aux bouchons de circulation en heure de pointe, en plus de constituer un risque à la sécurité, la collecte se faisant dans l’obscurité.
Ce qu’on ne sait pas, c’est si la ville a sévi. Si GFL avait été mise à l’amende pour chacune de ces 1 419 infractions, elle devrait plus de 200 000 $ à la ville. Ce renseignement devrait être rendu public, comme bien d’autres qui concernent les contrats de collecte. On ne devrait pas avoir à passer par la loi sur l’accès à l’information pour en prendre connaissance.
De bons emplois dont on a besoin
La collecte des ordures, des matières recyclables et des matières compostables est un boulot salissant, dangereux et exténuant. Les éboueurs travaillent dans des conditions météorologiques très difficiles. Ils méritent un salaire équitable et d’excellents avantages sociaux.
En bout de piste, la sous-traitance du reste de la collecte des ordures éliminera 400 bons emplois qui subviennent aux besoins de familles. Les entrepreneurs qui les remplaceront offriront des emplois moins payants et moins sûrs. La ville doit soutenir la création et le maintien de bons emplois au lieu d’encourager une course au moins offrant.
Un engagement envers l’excellence
Les éboueurs affiliés au SCFP 416 sont des experts de terrain. Plusieurs d’entre eux cumulent des dizaines d’années de service. Ils voient tout ce que les citoyens mettent à la rue, semaine après semaine; ils savent pertinemment ce qu’on peut faire pour améliorer les services. Les employés municipaux sont fiers de fournir un service essentiel à la santé publique et au bien-être collectif.
Depuis deux ans, la ville a collaboré avec succès avec le SCFP afin de réorganiser les trajets et les horaires pour simplifier la collecte. Pourquoi ne pas continuer à bâtir sur ce savoir et cette expertise?
Des économies qui disparaissent
On a fait état à maintes reprises d’économies annuelles de l’ordre de 11 millions de dollars pour le district 2, mais ces prétentions ne tiennent pas la route. En février 2014, la vérificatrice générale a dévoilé que la méthode de calcul de la ville est inappropriée et qu’elle exagère la différence de coût entre la collecte municipale et la collecte privatisée. Elle se sert, comme point de référence, du coût de la collecte en 2011. Ce chiffre est plus élevé que le coût maximum du contrat fixé par la ville dans son appel d’offres, un comparateur plus approprié.
Pour se faire une meilleure idée des coûts, le SCFP 416 a obtenu et étudié les factures réelles de la première année de collecte sous-traitée dans le district 2. Le montant total des services sous-traités entre août 2012 et septembre 2013 dépasse d’environ 6,4 millions de dollars le montant maximum prévu dans l’appel d’offres. Par conséquent, non seulement l’économie réelle est à peu près moitié moins importante que ce qu’on nous promettait, mais il reste très peu de marge pour l’inévitable escalade des coûts au fil du temps.
Qui plus est, la vérificatrice générale a identifié des lacunes dans la reddition de comptes et la surveillance; elle a réclamé un renforcement de l’inspection. Si on se base sur la TEA, qui évalue que les coûts de surveillance équivalent à environ 20 pour cent de la valeur du contrat, on se retrouve avec une économie d’à peine 2,5 millions de dollars.
Le comité des travaux publics et des infrastructures a commandé deux rapports : l’un au personnel municipal et l’autre à une tierce partie. Ces rapports se pencheront sur les coûts divers, comme la collecte, les ressources humaines et les dépenses en immobilisations. On s’attend à ce que ces rapports, en tenant compte de ces facteurs, viennent réduire encore plus les économies réalisées.
Le coût élevé du plus bas soumissionnaire
Une soumission basse coûte cher à long terme. Elle peut sembler alléchante sur papier, aussi factice soit-elle, mais les coûts ont tendance à augmenter au fil du temps, que ce soit pour l’application des modalités du contrat ou pour les frais supplémentaires associés à l’expansion ou l’amélioration du service.
Si on sous-traite l’ensemble de la collecte des ordures, la ville se retrouvera démunie si les choses tournent mal et qu’il faut remunicipaliser ces travaux. Une fois la flotte et les autres actifs de la ville vendus, le coût pour ramener ces travaux en interne monte en flèche. Nous dépendrons alors entièrement des entrepreneurs privés. Cela, conjugué à la perte de notre expertise interne, diminuera de beaucoup le pouvoir de négociation de la ville devant un groupe puissant d’entrepreneurs privés.
Nous avons besoin d’études supplémentaires et de temps avant de pouvoir évaluer pleinement les conséquences de la sous-traitance des ordures à l’est de la rue Yonge.