Sara NelsonSara Nelson est une dure à cuire.

C’est la meilleure description possible de la présidente internationale de l’Association des agents de bord (AFA). Le New York Times a même écrit, en première page de son cahier Affaires, qu’elle est « l’agente de bord la plus puissante aux États-Unis ». Elle se souvient, sourire en coin, qu’en page quatre du même numéro, on avait publié un portrait du PDG de Delta.

Cette militante syndicale a fait la une des journaux pour sa défense intelligente et féroce des membres de l’AFA et de l’ensemble des travailleurs. Après avoir menacé de déclencher une grève générale, elle a contribué à mettre fin à la fermeture du gouvernement américain, ainsi qu’à l’obtention de gains importants pour les membres qu’elle représente.

Le syndicat de Sara Nelson a développé la stratégie du « CHAOS », soit le déclenchement de grèves sur des vols ciblés sans avertissement, ni au transporteur, ni aux passagers. Après avoir perturbé sept vols d’Alaska Airlines de la sorte, l’employeur a tellement insisté pour régler le différend à toute vitesse, qu’il a proposé par erreur une augmentation salariale de 60 pour cent aux agents de bord.

Le harcèlement sexuel est un grave problème dans le secteur du transport aérien, un problème qui, selon Sara Nelson, remonte aux débuts de l’aviation commerciale.

« On se servait des agentes de bord comme des objets sexuels pour vendre des billets. Comme l’industrie n’a jamais dénoncé cette pratique, nous avons décidé que la première chose à faire était de décrier ce passé sexiste », a-t-elle rappelé.

Bien que le problème existe depuis longtemps, Sara Nelson souligne que le harcèlement et les agressions à l’endroit des agents de bord atteignent encore des niveaux démesurément élevés comparativement à la majorité des milieux de travail. Selon un sondage de l’AFA mené auprès de membres travaillant pour vingt transporteurs aériens, 68 pour cent des agents de bord ont été victimes de harcèlement sexuel et 20 pour cent des répondants ont déclaré avoir été victimes de harcèlement physique au cours de la dernière année.

« J’aurais beaucoup d’histoires à raconter. Je ne vole que depuis 1996, mais une bonne dizaine d’incidents vraiment dégoûtants me viennent spontanément à l’esprit. Ce problème n’est pas de l’histoire ancienne : il est encore répandu », a-t-elle indiqué.

La militante croit profondément à l’avantage, pour les syndicats, d’avoir plus de dirigeantes féminines.

« Les personnes marginalisées ont dû trouver des moyens de faire leur place toute leur vie. Nous devons être plus créatives et nous dirigeons sans égo, en nous concentrant sur les résultats. Cela nous permet de trouver de nouvelles stratégies pour négocier une entente. C’est ça l’avantage que les femmes procurent au mouvement syndical », a expliqué Sara Nelson.

« Il faut s’attaquer au problème du sexisme et faire comprendre aux dirigeantes qu’elles ont du pouvoir », a-t-elle poursuivi.

« Et cela concerne aussi les hommes! En effet, si un certain nombre de membres de votre lieu de travail sont marginalisés, discriminés ou considérés comme étant inférieurs à vous, votre propre pouvoir de négociation s’en trouve affaibli. Il est essentiel que le mouvement syndical recherche des femmes et des personnes de couleur pour s’assurer d’une représentation diversifiée et, ainsi, faire comprendre aux travailleurs que les syndicats représentent tout le monde. C’est la seule façon pour nous de contrer les multinationales qui cherchent à nous presser comme des citrons pour s’en mettre plein les poches », a-t-elle conclu.