Le budget 2023 aurait dû prendre position contre l’avarice des entreprises en imposant les profits excessifs des géants comme Loblaws, qui a réalisé des bénéfices de 529 000 000 $ au quatrième trimestre de 2022, alors que 5,8 millions de Canadien(ne)s, dont 1,4 million d’enfants, se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire.

En imposant les profits excessifs des entreprises, on freinerait cette course aux profits, on permettrait aux gens d’économiser de l’argent sur le coût du logement et des biens de consommation courante, et on encaisserait des revenus à réinvestir dans des services comme la santé et les services éducatifs à la petite enfance.

Bien que de bons services promis depuis longtemps et très attendus, comme les soins dentaires, ont finalement été annoncés, d’autres, comme l’assurance médicaments, étaient totalement absents. Brillaient aussi par leur absence : une stratégie globale de main-d’œuvre, des régimes de rémunération plus solides ou des salaires plus élevés pour la main-d’œuvre des services éducatifs à l’enfance et les préposé(e)s aux bénéficiaires (une promesse libérale de 2021). Le gouvernement avait la possibilité d’accroître la portée du secteur public en lui confiant la gestion du régime de soins dentaires et du plan pour une énergie propre, mais il a préféré refiler ces responsabilités à de tierces parties.

Les travailleuses et les travailleurs ont besoin d’aide. Avec la hausse du coût de l’inflation, l’augmentation des loyers et des versements hypothécaires et la fin des programmes d’aide en période de pandémie comme les bourses d’études postsecondaires, la classe ouvrière prend encore plus de retard. Après des années à travailler en sous-effectif pendant une pandémie, beaucoup de gens sont confrontés à une crise de santé mentale. L’augmentation du loyer, de l’épicerie et des médicaments aggravent le problème, mais le budget fédéral offre peu d’espoir de soulagement.

Nous applaudissons les gains comme les soins dentaires, un remboursement pour l’épicerie et l’ajout de bons emplois verts, mais il y a tout simplement trop d’autres priorités auxquelles le budget ne répond.

Loi antibriseurs de grève

Le budget fédéral confirme que le gouvernement ira de l’avant avec une modification au Code canadien du travail d’ici la fin de 2023 « pour interdire le recours à des travailleurs de remplacement pendant une grève ou un lock-out et pour améliorer le processus d’examen des activités qui doivent être maintenues pour assurer la santé et la sécurité du public pendant un arrêt de travail. »

Le SCFP est heureux de voir cet engagement dans le budget 2023, mais estime que le gouvernement ne devrait pas attendre la toute fin de l’année pour présenter un projet de loi sur cette question. Il est urgent d’interdire l’utilisation de briseurs de grève dans le Code canadien du travail ! Après tout, les consultations d’EDSC sont déjà terminées depuis deux mois (31 janvier 2023). Le gouvernement a déjà tout ce qu’il faut pour aller de l’avant.

De plus, il y a des conflits de travail qui traînent à cause de l’utilisation de travailleurs et travailleuses de remplacement par les employeurs. L’un d’entre eux se déroule au Port de Québec, où la Société des arrimeurs de Québec a mis en lock-out ses débardeurs du SCFP il y a plus de six mois. Il est grand temps d’adopter une loi antibriseurs de grève !

Cela dit, il n’est pas question pour le SCFP d’accepter des modifications au cadre juridique du maintien de certaines activités lors d’un conflit de travail qui ajouteraient plus d’étapes, plus d’acteurs ou plus de délais au processus. Le CCRI doit simplement disposer des ressources suffisantes pour faire le travail qui lui est confié.

Services éducatifs à l’enfance

Le gouvernement fédéral avait fait de grandes annonces concernant les services éducatifs à l’enfance dans le budget fédéral de 2022. Cette année, le SCFP est déçu de ne voir aucun engagement envers des améliorations. Après tout, ce secteur vacille en raison du manque d’investissements dans la rémunération de sa main-d’œuvre. Celle-ci est sous-rémunérée et n’a souvent ni avantages sociaux, ni de régime de retraite. En conséquence, ce secteur manque de personnel et est incapable de recruter et retenir de la main-d’œuvre pour tenir la promesse de places dans les services éducatifs à la petite enfance à dix dollars par jour pour tout le monde. 

Il n’y a pas non plus de précisions sur l’objectif fédéral de financement et d’expansion des services éducatifs à la petite enfance publics et sans but lucratif. Nous avons déjà vu des provinces s’éloigner de leur plan initial de fournir des fonds publics uniquement aux prestataires publics et à but non lucratif. Sans cet incitatif financier, les deniers publics vont continuer à subventionner les profits privés au détriment d’une programmation de qualité et d’une meilleure rémunération de la main-d’œuvre.

Communications

Le SCFP a demandé au gouvernement fédéral d’augmenter les crédits parlementaires de l’Office national du film (ONF) (65,6 millions de dollars en 2021-2022) d’au moins dix millions de dollars par année pendant cinq ans en indexant cette somme au coût de la vie. Cela offrirait plus de stabilité et de prévisibilité à notre producteur public et ses artisan(e)s, créatrices et créateurs.

Nous avions aussi demandé au gouvernement fédéral d’assumer la responsabilité des futurs remboursements à l’Office national du film pour le déménagement de son siège social.

Le budget fédéral de 2023 ajoute un investissement ponctuel de neuf millions de dollars sur deux ans aux crédits parlementaires de l’ONF. Bien que cela représente un progrès, le SCFP continue de croire que le budget de l’ONF devrait être augmenté substantiellement et indexé au coût de la vie. Le budget 2023 a également raté l’occasion de rembourser les frais de déménagement du siège social de l’ONF.

Les sociétés multinationales de services numériques évitent de payer des impôts proportionnels au Canada depuis des années, ce qui désavantage les médias et les entités culturelles nationales. De nombreuses multinationales utilisent des tours de passe-passe comptables pour transférer leurs bénéfices dans des juridictions où le taux d’imposition des sociétés est moins élevé, mais cela est particulièrement facile pour les fournisseurs de services numériques. En tant que membre de l’OCDE, le Canada travaille avec d’autres pays pour s’assurer que toutes les multinationales paient leur juste part d’impôts, mais ces travaux sont lents et leur issue est incertaine. Le budget 2021 avait commencé à travailler sur une taxe sur les services numériques qui entrerait en vigueur en l’absence de progrès sur une réforme fiscale plus large à l’OCDE. Le budget 2023 s’engage à publier un projet révisé de propositions législatives pour consultation publique avant le dépôt d’un projet de loi pour une taxe sur les services numériques. Cette taxe pourrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2024, si la réforme fiscale de l’OCDE n’est pas entrée en vigueur à cette date.

Il y a aussi quatre millions de dollars sur deux ans, à compter de 2024-2025, pour le « financement proposé pour PCH afin d’acheter du contenu canadien destiné à la plateforme TV5MONDEplus ».

Le Fonds des médias du Canada recevra 40 millions de dollars sur deux ans, à compter de 2023-2024, pour « rendre le financement plus accessible aux voix traditionnellement sous-représentées et accroître le financement accordé au contenu d’écran de langue française ».

Énergie

Le budget fédéral de 2023 vise à poursuivre les progrès du Canada vers un avenir carboneutre. Le gouvernement reconnaît que la formation et des emplois bien rémunérés sont essentiels au succès de ce plan, mais le crédit d’impôt supplémentaire offert pour se conformer à des normes de travail plus élevées pourrait être trop faible pour être efficace. De plus, le budget propose que la norme salariale en vigueur ne s’applique qu’au travail manuel ; il ne garantit pas que les autres emplois liés au projet, notamment les emplois de bureau à prédominance féminine, soient également bien rémunérés. Le « salaire en vigueur » auquel fait allusion le budget fédéral de 2023 devrait être le salaire négocié. Le Canada a besoin d’une législation sur la transition juste pour s’assurer que les travailleuses et travailleurs touchés négativement par le passage à une économie carboneutre soient consultés et qu’ils aient tous et toutes accès à l’éducation, au recyclage, à la requalification et à des possibilités de nouveaux emplois. Cette législation devrait aussi créer des systèmes et des stratégies pour aider les communautés touchées négativement par ce changement. 

Le budget injecte de nouvelles ressources substantielles dans l’économie propre, 18,5 milliards de dollars sur cinq ans. La majeure partie de cette somme provient de divers crédits d’impôt qui offrent en tout 17 milliards de dollars d’allégements fiscaux pour encourager les investissements dans l’économie propre. Ces crédits d’impôt comprennent des mesures incitatives prometteuses pour l’énergie propre, mais ils ajoutent ou maintiennent aussi des crédits d’impôt substantiels pour la production d’hydrogène, une option douteuse et non démontrée, et la capture, l’utilisation et le stockage du carbone. Ces crédits d’impôt ont le potentiel d’agir comme des subventions aux producteurs de combustibles fossiles et de retarder l’action climatique au lieu de l’accélérer.

Le nouveau crédit d’impôt à l’investissement de 15 % pour l’électricité propre est structuré de manière à ce que les entités publiques et les communautés autochtones y aient droit, et il s’applique aux nouveaux projets ainsi qu’aux rénovations. Il sera disponible après le budget 2024 pour les projets dont la construction n’avait pas encore débuté la veille du dépôt du budget 2023. Le crédit d’impôt tombe à 5 % si le projet ne répond pas aux exigences en matière de main-d’œuvre. Ce crédit devrait coûter 6,3 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années, et 19 milliards de plus jusqu’à son élimination progressive en 2034-2035.

En comparaison, le gouvernement fédéral n’investit qu’un milliard de dollars supplémentaires au cours des quatre prochaines années pour soutenir directement le développement de projets d’énergie propre par le biais du populaire et efficace Programme des énergies renouvelables intelligentes et de trajectoires d’électrification.

Le nouveau crédit de 30 % pour la fabrication de technologies propres s’appliquera, par exemple, à la fabrication d’équipements pour des projets d’énergie renouvelable ou nucléaire, mais aussi à l’extraction, au traitement et au recyclage de minéraux critiques. Encore une fois, si les exigences en matière de main-d’œuvre ne sont pas respectées, la taille du crédit d’impôt est réduite à 20 %. Ce crédit devrait coûter 4,5 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années.

Le crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres de 30 % annoncé dans le budget de 2022 a été élargi pour inclure l’énergie géothermique, mais seulement si son objectif principal est la production d’énergie, et non pour des projets qui produiront aussi des combustibles fossiles.

Enfin, le budget fournit plus de détails sur le crédit d’impôt à l’investissement proposé pour l’hydrogène propre qui a été annoncé dans l’Énoncé économique de l’automne 2022. La taille de ce crédit d’impôt varie en fonction de l’intensité carbonique de la production, telle que mesurée par le Modèle d’analyse du cycle de vie (ACV) des combustibles du gouvernement. Les processus de production d’hydrogène les plus « propres » recevraient un crédit d’impôt de 40 %. Celui-ci tomberait à 25 % ou 15 % à mesure que les processus deviennent plus intensifs en carbone. Les équipements de production d’hydrogène à partir de gaz naturel sont admissibles au crédit d’impôt, à condition que la technologie de captage du carbone soit utilisée pour limiter les émissions.

La Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) se positionne comme le principal outil de financement du gouvernement pour soutenir les projets de production, de transport et de stockage d’électricité propre avec des investissements de dix milliards de dollars dans son domaine prioritaire Énergie propre et de dix milliards de dollars dans son domaine prioritaire Infrastructure verte. Il n’y a plus d’argent pour ces investissements. Le budget rappelle également que la BIC se concentrera sur les projets menés par le secteur privé, plutôt que de se réorienter vers un objectif public.

Le gouvernement a également donné plus de détails sur les 15 milliards de dollars annoncés précédemment pour le Fonds de croissance du Canada. L’objectif du Fonds est d’encourager les investissements privés dans l’économie propre, exactement comme la Banque de l’infrastructure du Canada. Le gouvernement présentera des modifications législatives pour permettre à l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public de gérer les actifs du Fonds de croissance du Canada afin que « le Fonds puisse remplir son mandat consistant à attirer des capitaux privés pour investir dans l’économie propre du Canada ». Le gouvernement consultera les syndicats ce printemps sur l’ajout de deux sièges au conseil d’administration de l’Office pour les représenter.

Le recours à l’expertise d’Investissements PSP semble viser à pallier l’incapacité de la BIC à attirer des investissements privés. Malgré cela, des questions subsistent quant au bien-fondé du principe fondamental qui sous-tend les deux institutions, à savoir s’il faut utiliser l’argent public pour attirer des investissements publics. Il y a peu de détails sur la gamme d’outils d’investissement que le Fonds de croissance utilisera, ou sur la manière dont il prendra des décisions d’investissement, même si le Fonds devrait commencer à investir au premier semestre 2023. Un outil proposé, les « contrats sur différence », qui sert à garantir les tarifs d’électricité aux investisseurs privés au Royaume-Uni, soulève des inquiétudes concernant les subventions inutiles aux entreprises privées, en particulier lorsque le secteur de l’électricité au Canada est largement détenu par le secteur public. Il n’y a aucune raison pour que le gouvernement fédéral n’investisse pas dans l’électricité propre détenue et exploitée par l’État.

Santé

Assurance médicaments

Le SCFP est très déçu de constater que le budget ne contient aucun nouveau financement pour un régime d’assurance médicaments ni aucune mention d’un tel régime. Les libéraux ont promis l’assurance médicaments pour la première fois en 1997, ils en ont fait une promesse phare de leur plateforme électorale en 2019, et ce régime fait partie de l’entente de soutien et de confiance qu’ils ont signé avec le NPD en 2022. Ils se sont engagés à adopter une Loi canadienne sur l’assurance médicaments d’ici la fin de l’année, chose que le SCFP est impatient de voir se produire.

Soins de longue durée

Malgré les horreurs qui se sont produites dans les établissements de soins de longue durée à but lucratif au début de la pandémie de COVID, ce budget ne mentionne pas la Loi sur la sécurité des soins de longue durée.

Soins dentaires

Le SCFP est ravi de voir que les libéraux ont donné suite à leur engagement envers le NPD d’offrir un programme de soins dentaires. Le budget annonce un investissement de 13 milliards de dollars sur cinq ans, puis de 4,4 milliards de dollars par la suite. Le régime de soins dentaires couvrira les personnes non assurées dont le revenu familial annuel est inférieur à 90 000 $; celles dont le revenu familial est inférieur à 70 000 $ n’auront pas à payer de quote-part.

Toutefois, le programme sera géré par Santé Canada avec « l’appui d’un administrateur de prestations tiers » chargé de gérer concrètement les prestations du programme, une structure qui exclut essentiellement les provinces et les territoires et qui ajoute un administrateur privé. Cela pourrait être fait publiquement. Le SCFP craint que cela n’augmente inutilement les coûts pour le gouvernement.

Le budget de 2023 a également engagé 250 millions de dollars sur trois ans (à compter de 2025) et 75 millions de dollars par année par la suite pour un fonds d’accès à la santé buccodentaire pour les personnes vivant dans des communautés rurales et éloignées, et les populations vulnérables qui ont d’autres obstacles à l’accès aux soins (comme les personnes ayant un handicap).

Il ne s’agit pas entièrement d’argent frais. Dans le budget de 2022, le gouvernement avait annoncé 5,3 milliards de dollars sur cinq ans et 1,7 milliard de dollars en financement récurrent. Cet engagement est inclus dans le budget 2023.

Main-d’œuvre de la santé

Le gouvernement fédéral a annoncé plusieurs améliorations à la main-d’œuvre du secteur de la santé, notamment :

  • « Simplifier la reconnaissance des titres de compétences étrangers », qui devient une exigence du financement bilatéral ;
  • Élargir le programme d’exonération de remboursement du prêt d’études pour les médecins et le personnel infirmier qui travaillent dans des communautés rurales ou éloignées mal desservies en fournissant 45,9 millions de dollars sur quatre ans, à compter de 2024-2025, dont 11,7 millions de dollars récurrents à EDSC pour inclure toutes les communautés de 30 000 habitants ou moins. Les communautés déjà admissibles qui comptent actuellement plus de 30 000 habitants demeureront admissibles jusqu’au recensement de 2026.

Le gouvernement fédéral s’est engagé à renforcer l’épargne-retraite des préposé(e)s aux bénéficiaires en versant 50 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2023-2024, à EDSC pour « élaborer et mettre à l’essai des solutions novatrices pour renforcer l’épargne-retraite des préposé(e)s aux services de soutien à la personne qui n’ont aucune couverture de sécurité de retraite au travail ». Les solutions novatrices dont les préposé(e)s (et l’ensemble de la main-d’œuvre de la santé) ont grandement besoin, sont un salaire décent, 18 jours de congé de maladie, plus de postes à temps plein et l’accès à un régime de retraite.

Soins de santé mentale et dépendances

Nous savons qu’il y a une grave crise de santé mentale dans tout le pays. Les travailleuses et travailleurs ressentent particulièrement le poids d’avoir travaillé à travers une pandémie pendant trois ans. Les soins de santé mentale sont difficiles à trouver et à payer. Alors que bon nombre de nos allié(e)s demandaient au gouvernement fédéral de mettre en œuvre un régime universel de soins de santé mentale, celui-ci n’a annoncé que 158,4 millions de dollars sur les trois prochaines années pour le lancement de la ligne de prévention du suicide 988 le 30 novembre 2023.

La santé mentale est l’un des quatre domaines prioritaires fixés dans les ententes bilatérales avec les provinces et les territoires. En 2021, le gouvernement fédéral a annoncé 45 millions de dollars pour l’élaboration de normes nationales sur la santé mentale et les dépendances, mais il a pris un an de retard sur l’élaboration d’une « feuille de route ». On attend maintenant celle-ci en mars 2024. Il n’y a pas d’argent pour un transfert en santé mentale ou pour la présentation d’une loi sur la santé mentale. Il y a 359,2 millions de dollars sur cinq ans pour lutter contre la crise des opioïdes par le biais d’investissements dans des programmes sur l’usage et les dépendances aux substances, des sites de consommation supervisée, la collecte de données, une application de surveillance des surdoses, etc. Le SCFP encourage l’élaboration de ces programmes en consultation avec les personnes qui utilisent des drogues.

Logement

Avec 1,5 million de personnes au Canada vivant sans logement adéquat, sûr ou abordable, le SCFP espérait que le gouvernement agirait de toute urgence pour corriger les erreurs du passé. Nous espérions qu’il priorise le logement social, coopératif et sans but lucratif afin d’éviter que le profit vienne gonfler les coûts de location et de propriété.

Le SCFP et ses allié(e)s préconisent l’harmonisation de la Stratégie nationale sur le logement avec la Loi sur le droit au logement, ce qui encouragerait un abandon de l’accent mis sur le logement à but lucratif. Afin d’assurer de meilleurs droits et protections aux personnes les plus susceptibles d’être logées de manière précaire, le Canada a besoin de normes nationales pour la protection des locataires. Aucune de ces décisions politiques importantes n’a été incluse dans le budget de 2023.

En lieu et place, le gouvernement fédéral a annoncé quatre milliards de dollars sur sept ans pour mettre en œuvre une stratégie de logement en milieu urbain, rural et nordique (en cours d’élaboration avec des partenaires autochtones), 55 millions de dollars pour la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) pour la mise en œuvre de la Stratégie nationale sur le logement, et une consolidation des obligations hypothécaires du Canada avec les obligations du gouvernement du Canada.

Bien que le SCFP approuve le financement supplémentaire accordé à une stratégie du logement dans les régions urbaines, rurales et nordiques, nous craignons que la SCHL soit prédisposée à soutenir l’industrie à but lucratif plutôt qu’une approche du logement fondée sur les droits.

Une fois de plus, le gouvernement fédéral a annoncé le Fonds pour accélérer la construction de logements, sans donner de détails. On ne sait pas vraiment comment celui-ci s’articulera à l’Initiative pour la création rapide de logements. Le SCFP continuera de porter une attention particulière à ce dossier.

Il y aura réaffectation du financement du volet de réparation du Fonds national de co-investissement pour le logement à son volet de construction, au besoin, afin d’encourager la construction de nouveaux logements abordables pour les gens qui en ont le plus besoin.

Le budget de 2023 annonce que le gouvernement mènera des consultations sur les changements à apporter pour éliminer les obstacles réglementaires que doivent surmonter les acheteuses et acheteurs de maisons issus de communautés diverses et qui cherchent à accéder à des sources de financement de rechange.

Éducation postsecondaire

Le SCFP espérait voir dans le budget 2023 un engagement à accroître le financement des collèges et des universités, un plus grand soutien financier aux chercheuses et chercheurs diplômés par l’intermédiaire d’ententes tripartites, un plus grand soutien financier aux bourses et prêts d’études, de l’argent pour les améliorations écologiques et la rénovation des propriétés universitaires, ainsi que des mesures spécifiques pour les étudiant(e)s internationaux.

Ce qu’on y trouve, c’est une augmentation du montant pouvant être retiré d’un REEE, qui passe de 5 000 $ à 8 000 $ pour les étudiant(e)s à temps plein et de 2 500 $ à 4 000 $ pour ceux à temps partiel. Le gouvernement fédéral fournira 813,6 millions de dollars en 2023-2024 afin de bonifier l’aide financière aux étudiant(e)s pour l’année scolaire débutant le 1er août. La Bourse d’études canadiennes passe de 3 000 $ à 4 200 $ pour les étudiant(e)s à temps plein. Soulignons, par contre, que bien qu’il s’agisse d’une augmentation par rapport au montant précédent de 3 000 $, la subvention avait été doublée, à 6 000 $, au début de la pandémie. Donc, cette augmentation par rapport au montant de base est en fait une diminution significative par rapport à la bourse offerte pendant la pandémie, ce qui aura un impact sur la population étudiante. Le gouvernement rehausse le plafond des prêts d’études canadiens non imposables de 210 $ à 300 $ par semaine d’études et il supprime l’examen de crédit pour les personnes de 22 ans ou plus qui demandent des prêts et bourses.

Le SCFP est heureux de voir que de nouveaux prêts sont offerts aux étudiant(e)s, bien que nous craignons que l’éducation postsecondaire continue d’être financièrement inabordable pour beaucoup. Nous sommes déçus qu’il n’y ait pas de financement de base pour l’éducation postsecondaire et que l’on diminue les bourses offertes pendant la pandémie.

Services sociaux

Le SCFP espérait une accélération de l’élaboration et de la mise en œuvre de la nouvelle Prestation canadienne pour les personnes handicapées. Le projet de loi C-22 sur la Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées est l’un des quatre piliers du Plan d’action pour l’inclusion des personnes en situation de handicap. Bien qu’il manque encore des détails, cette prestation visera à fournir à cette population un supplément semblable au SRG pour les personnes âgées afin d’améliorer la sécurité financière des personnes ayant un handicap.

Le budget de 2023 s’engage à verser dix millions de dollars sur deux ans à compter de 2023-2024 à Emploi et Développement social Canada (ESCD) pour soutenir les personnes en situation de handicap « en investissant dans le renforcement des capacités et le travail communautaire des organisations d’aide aux personnes en situation de handicap du Canada ».

Il s’est également engagé à verser 21,5 millions de dollars en 2023-2024 à EDSC « pour poursuivre les travaux sur la mise en place de la future Prestation canadienne pour personnes handicapées », ce qui comprend une concertation avec la communauté au sujet du processus de réglementation.

Le SCFP et ses allié(e)s espèrent voir le projet de loi C-22 adopté avant la fin de la session parlementaire et son cadre réglementaire prêt dans un délai raisonnable une fois qu’il aura reçu la sanction royale.

Transports

Le SCFP espérait que le budget de 2023 augmente le financement du gouvernement fédéral pour les projets d’infrastructure publique, en donnant la priorité aux investissements verts détenus et exploités par l’État dans les transports collectifs, et pour doter Transports Canada de ressources adéquates afin qu’il puisse s’acquitter de ses fonctions d’organisme de réglementation. Nous nous attendons à ce que le gouvernement fédéral inclue les municipalités en tant que partenaires gouvernementaux directs dans ses accords trilatéraux de financement des infrastructures avec les provinces et les territoires.

Le SCFP est déçu que les collectivités doivent continuer d’attendre avant d’obtenir le soutien fédéral dont elles ont grandement besoin pour leurs transports en commun. Nous continuerons de surveiller l’évolution de ce dossier et de faire pression pour un solide soutien fédéral au transport en commun.

Le budget de 2023 propose d’accorder 210 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2023-2024, avec un amortissement restant de 117,4 millions de dollars, à VIA Rail pour effectuer l’entretien des trains faisant des trajets autres que sur le corridor Québec-Windsor et maintenir les niveaux de service dans son réseau.

Il fournira 27,2 millions de dollars sur cinq ans à Transports Canada pour mieux coordonner la chaîne d’approvisionnement du Canada.

Le budget de 2023 investit dans le contrôle des voyageuses et voyageurs, l’amélioration des temps d’attente dans les aéroports et la collecte de données sur le rendement des services aériens. Il offre des fonds supplémentaires pour les services de traversier dans les ports de l’Est. Mais cela ne répond pas à bon nombre des préoccupations du SCFP concernant la nécessité d’améliorer la santé et la sécurité et les défis auxquels est confrontée la main-d’œuvre dans ces secteurs.

Législation fédérale du travail

Le budget de 2023 propose de renforcer les interdictions contre la classification erronée des employés, une mesure visant à améliorer la protection de la main-d’œuvre à la demande dans le secteur sous réglementation fédérale. Les groupes syndicaux critiquaient les normes actuelles parce que le fardeau de la preuve incombe à la travailleuse ou au travailleur mal classé et que la plainte doit démontrer que l’erreur de classification de l’employeur était volontaire. Une décision visant à interdire la classification erronée des salarié(e)s imposerait à l’employeur la responsabilité de démontrer que la travailleuse ou le travailleur ne devrait pas être considéré comme un(e) employé(e). Ce changement nous réjouit. Cela élargirait l’accès à des prestations comme l’assurance-emploi et le Régime de pensions du Canada. Le gouvernement fédéral estime à 41 000 le nombre de personnes qui travaillent à la demande dans le secteur sous réglementation fédérale.

Équité fiscale

Le budget de 2023 fait un bon travail pour donner suite aux engagements antérieurs en matière d’équité fiscale, même s’il n’introduit aucun nouveau changement structurel pour lutter contre l’avarice des entreprises ou les inégalités de revenu et de richesse.

Le remboursement de la TPS sera encore doublé cette année, offrant un certain soulagement aux personnes et aux familles à faible revenu aux prises avec la hausse des prix de la nourriture et du logement.

De nombreuses personnes à faible revenu ne produisent pas leur déclaration de revenus et, pour cette raison, ne profitent pas des avantages offerts par le système fiscal, comme le remboursement de la TPS. Le budget de 2023 élargit un programme de l’ARC lancé en 2018. « Produire ma déclaration » simplifie la production de déclarations de revenus pour les personnes à faible revenu, car il permet à l’ARC de produire la déclaration de quelqu’un après lui avoir posé quelques questions au téléphone. On s’attend à ce que les inscriptions à ce service passent de 53 000 en 2022 à deux millions d’ici 2025. L’ARC mènera des consultations et pilotera un nouveau service de déclaration de revenus automatique pour s’assurer que les personnes vulnérables reçoivent les prestations auxquelles elles ont droit.

Le budget de 2023 va de l’avant avec des améliorations à la « règle générale anti-évitement » (RGAE), qui a été mise en œuvre en 1988 pour réprimer l’évitement fiscal abusif. Le gouvernement fédéral a perdu plusieurs procès à ce sujet, ce qui souligne la nécessité d’améliorer la législation pour qu’elle soit efficace. Les modifications comprennent une « règle sur la substance économique », présentée pour la première fois sous la forme d’un projet de loi d’initiative parlementaire du NPD en 2014 et réintroduit plusieurs fois depuis lors. La règle consiste en un test simple pour montrer s’il y a une « substance économique » à une transaction donnée ou si elle a été effectuée uniquement à des fins fiscales. Ceci est souvent pertinent pour les transactions impliquant des paradis fiscaux. Le budget de 2023 propose aussi une pénalité égale à 25 % du montant de l’avantage fiscal.

Le budget de 2022 avait signalé l’intention du gouvernement fédéral de donner suite à une promesse électorale de 2021, une mise à jour de « l’impôt minimum de remplacement » (IMR), introduit pour la première fois en 1986. Certaines personnes à très haut revenu (les 0,05 % les plus riches) sont actuellement en mesure de payer moins de 15 % d’impôt sur le revenu des particuliers en utilisant une combinaison de déductions, de crédits et d’autres avantages fiscaux. Le budget 2023 propose d’améliorer considérablement l’IMR en augmentant le taux d’imposition appliqué de 15 % à 20,5 %, en augmentant le seuil auquel il s’applique de 40 000 $ à 173 000 $ et en élargissant les types de revenus qui sont inclus dans le calcul de l’IMR. Cela devrait rapporter trois milliards de dollars sur cinq ans.

À l’heure actuelle, les institutions financières ne paient pas d’impôt sur les dividendes qu’elles reçoivent sur les actions qu’elles détiennent d’autres sociétés canadiennes. Cela est incompatible avec le traitement fiscal des autres types de revenus que reçoivent les institutions financières. Par exemple, si une institution financière vend ces actions, les gains sont considérés comme un revenu ordinaire et non comme un gain en capital. Le budget 2023 propose de modifier le traitement des dividendes afin que les institutions financières paient désormais de l’impôt sur ceux-ci. Cela devrait rapporter 3,15 milliards de dollars sur cinq ans.

Enfin, le budget propose un impôt sur la valeur nette des rachats d’actions de plus d’un million de dollars. Les sociétés cotées en bourse se concentrent parfois trop sur les variations à court terme du cours de leurs actions, au lieu de se concentrer sur la croissance à long terme. Les rachats d’actions excessifs sont un symptôme de ce comportement, les sociétés cotées en bourse investissant parfois des ressources dans le rachat d’actions afin d’augmenter le cours de leur action au lieu de faire des investissements qui soutiendraient leur croissance à long terme. Ces changements devraient rapporter 2,5 milliards de dollars sur cinq ans.

Ensemble, l’IMR, le changement aux dividendes des institutions financières et l’impôt sur le rachat d’actions devraient rapporter un peu plus de deux milliards de dollars en 2024-2025. En comparaison, si le budget faisait simplement passer la part des gains en capital incluse dans l’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés de 50 % à 75 %, cela rapporterait 9,5 milliards de dollars par année. Le budget fédéral alternatif de 2023 a estimé qu’un impôt sur la fortune pourrait rapporter 20 milliards de dollars chaque année, et qu’un impôt minimum de remplacement pour les sociétés pourrait en rapporter quatre milliards.

Situation économique globale

Le budget de 2023 concentre les nouvelles dépenses sur des mesures incitatives axées sur le marché pour réduire les émissions de carbone du Canada. Il y a 54 milliards de dollars en nouveaux crédits d’impôt au cours des dix prochaines années, un moyen très coûteux et inefficace d’accélérer l’atteinte de nos objectifs climatiques. Si les soins dentaires deviennent rapidement une partie importante du système de santé du Canada, ce budget rate la cible en matière de logement, d’assurance médicaments et d’autres investissements dans le secteur public qui rendent la vie plus abordable pour nous tous et toutes. Ce budget fait des progrès dans les travaux en cours concernant l’équité fiscale, mais il manque l’occasion de s’attaquer à l’avarice des entreprises qui a exacerbé l’inflation, ou de prendre des mesures concrètes pour imposer les ultrariches.

Le budget fédéral de 2023 prévoit une faible récession cette année, suivie d’un redressement d’ici la fin de l’année. Malgré cela, aucune amélioration n’est apportée à l’assurance-emploi pour qu’elle puisse soutenir les gens qui perdraient leur emploi en période de récession.

Le budget prévoit des déficits pour chacune des cinq prochaines années, mais ils sont si faibles que la dette fédérale en pourcentage du PIB devrait encore diminuer au cours de la même période, passant de 43,5 % en 2023-24 à 39,9 % en 2027-28. Les coûts d’emprunt fédéraux sont plus élevés qu’ils ne l’étaient avant la pandémie, mais ils sont toujours historiquement bas.

Cette responsabilité financière se fait en partie aux dépens des travailleuses et des travailleurs du secteur public fédéral. Le budget réduit les dépenses des ministères fédéraux et des sociétés d’État de 8,1 milliards de dollars sur quatre ans et prévoit des réductions de dépenses supplémentaires de 6,4 milliards de dollars sur six ans en éliminant les dépenses non affectées des engagements antérieurs. Il n’y a pas de détails sur l’origine de ces réductions de dépenses, mais le budget indique que cela ne se fera pas au détriment des services, des niveaux de prestations, des transferts à d’autres ordres de gouvernement ou des Forces armées canadiennes, laissant la main-d’œuvre supporter le poids des compressions.