La hausse des taux d’intérêt rend de plus en plus difficile l’accès à la propriété. En juillet 2023, la Banque du Canada a porté son taux directeur à 5 %, le plus élevé depuis 2001.

La hausse des taux d’intérêt vise à conjurer l’inflation : en augmentant le coût des prêts, on veut amener les gens à dépenser moins et les entreprises à freiner leurs investissements, donc à créer moins d’emplois. On compte sur cette baisse des dépenses pour ralentir la hausse des prix.

Or, en dépit de ces intentions, la hausse des taux hypothécaires s’avère un des principaux facteurs de hausse de l’inflation. En effet, le coût des intérêts hypothécaires, qui entre dans le calcul de l’indice des prix à la consommation (IPC), a augmenté de plus de 30 % en juillet par rapport à l’année précédente. Selon Statistique Canada, le coût des intérêts hypothécaires constitue le principal facteur contributif de l’inflation en juillet. Si on faisait abstraction de ce coût, l’inflation serait de 2,4 % plutôt que de 3,3 %.

L’impact de la récente hausse des taux d’intérêt sur l’accès à la propriété ressort clairement quand on examine l’« indice d’accessibilité à la propriété » de la Banque du Canada. Il compare la moyenne des versements hypothécaires et des frais pour les services publics au revenu disponible moyen des ménages. Pour estimer la moyenne des versements hypothécaires, la Banque se base sur le prix de revente moyen de toutes les résidences vendues au Canada, ainsi que sur la moyenne pondérée des taux hypothécaires fixes et variables réduits.

 

À l’automne 2022, l’indice a franchi la barre de 0,5. Autrement dit, plus de la moitié du revenu disponible d’un ménage est consacré au logement. On n’a jamais vu un tel chiffre depuis le pic de 0,54 en 1990, à une époque où le taux d’intérêt de la Banque du Canada dépassait les 13 %.

Comment un taux de 5 % peut avoir le même effet aujourd’hui qu’un taux plus élevé à la fin des années 1980 et au début des années 1990? C’est qu’aujourd’hui, les ménages sont plus endettés. Le prix des propriétés a augmenté pour diverses raisons, dont des taux d’intérêt bas et des gens, ou des entreprises, qui considèrent l’immobilier comme un placement. Mais comme les revenus n’ont pas suivi la hausse des prix, il faut s’endetter de plus en plus pour devenir propriétaire. En 1990, la dette moyenne des ménages ne se chiffrait qu’à 90 % de leur revenu disponible. À l’automne 2022, on en était à 186 %, soit plus du double. 

Après la bulle immobilière qui a atteint son apogée en 1990, le prix des maisons à Toronto a chuté de plus de 30 %. Dans le reste du Canada, le prix moyen des propriétés est resté stable durant toute la décennie. Cette stabilité, combinée à la baisse des taux d’intérêt, a amélioré l’accès à la propriété pendant un certain temps. Les économistes s’attendaient à une correction similaire dans le marché résidentiel canadien dès la crise financière de 2008, mais elle ne s’est pas concrétisée. Qu’en sera-t-il de l’accès à la propriété pour les dix prochaines années? Cela dépend de divers facteurs, dont les taux d’intérêt, la politique sur le logement du gouvernement et la progression des salaires.