La plupart des emplois perdus pendant la pandémie reviendront au fur et à mesure que la vaccination progresse et que la santé publique assouplit ses restrictions. Or, dans chaque crise économique, certains emplois disparaissent à jamais.

Les secteurs durement touchés, comme l’hôtellerie et le transport aérien, auront probablement besoin de plus de temps pour revenir à la « normale ». De plus, certains emplois seront déplacés en raison de changements permanents à nos façons de travailler, comme l’adoption d’outils automatisés sans contact, de la prestation de services en ligne ou de la diminution du nombre de personnes dans les bureaux. Pour mettre en place les bonnes mesures de soutien, celles qui conviennent le mieux aux besoins des gens, il faut d’abord comprendre qui sera laissé pour compte lors la reprise du marché du travail.

Pour cerner les perdantes et perdants de la reprise, il faut d’abord s’intéresser au sort des personnes au chômage ou sous-employées, et savoir depuis combien de temps elles sont dans ces catégories. Si de nombreuses personnes du même secteur sont au chômage depuis plusieurs mois, c’est signe que les emplois sont rares et qu’il sera difficile pour elles de trouver un nouvel emploi. Nous devons aussi savoir qui a décidé de quitter le marché du travail pour de bon. Ensemble, ces trois éléments de mesure nous aident à comprendre les transitions qui se produisent sur le marché du travail et orientent la prise de décision en vue d’offrir les soutiens nécessaires à la recherche d’un meilleur emploi.

Changer les éléments de mesure

En ce qui concerne le chômage et le sous-emploi, l’Enquête sur la population active de Statistique Canada suit la « sous-utilisation de la main-d’œuvre » depuis le début de la pandémie. Statistique Canada a créé cet indicateur parce que les indicateurs habituels auraient raté bon nombre des effets de la pandémie sur la main-d’œuvre touchée.

Cet élément de mesure s’intéresse à quatre catégories :

  • les personnes toujours employées, mais qui travaillent moins de la moitié de leurs heures habituelles.
  • les personnes sans emploi et à la recherche d’un emploi.
  • les personnes sans emploi prêtes à travailler, mais qui ont abandonné leurs recherches.
  • les personnes sans emploi, mais en mise à pied temporaire ou sur le point de recommencer à travailler.

Pour avoir un portrait plus complet de la situation, nous pouvons tenir compte de données connexes compilées par Statistique Canada : les personnes occupant un poste à temps partiel qui souhaiteraient plus d’heures et celles qui travaillent à temps partiel en raison de responsabilités de soins non rémunérées.

Certaines de ces catégories de sous-emploi ont pris du mieux depuis le pic d’avril 2020. En effet, il y a moins de personnes en mise à pied temporaire, dont les heures ont été réduites de plus de la moitié ou si découragées par les perspectives d’emploi qu’elles ne cherchent plus à réintégrer le marché du travail.

C’est une bonne nouvelle, mais il y a encore beaucoup de gens dont les heures ont été considérablement réduites ou qui aimeraient travailler plus d’heures, mais qui ne trouvent pas de poste à temps plein. Ce constat démontre qu’au moins une partie des mesures de soutien à la formation offertes par les gouvernements devrait être accessibles selon un horaire flexible pour accommoder les disponibilités des personnes qui travaillent. De plus, le nombre de personnes qui travaillent à temps partiel en raison de responsabilités de soins non rémunérées traduit l’importance de services de garde abordables pour la pleine participation des parents de jeunes enfants à l’économie.

Soutenir la transition vers un nouvel emploi

Le chômage de longue durée correspond au nombre de personnes sans emploi et en recherche d’emploi depuis plus de 27 semaines. En avril 2021, il y en avait plus d’un demi-million, dont 300 000 depuis plus d’un an. La majeure partie de l’augmentation provient des professions directement touchées par les mesures de santé publique découlant de la COVID-19, comme celles des secteurs de la restauration et de la vente au détail. Ces personnes sont plus susceptibles d’avoir besoin de mesures importantes de soutien au revenu et à la formation pour réussir leur transition vers un nouvel emploi, fort probablement dans une nouvelle profession.

Si le chômage de longue durée a augmenté pour la plupart des groupes démographiques, ce n’est pas le cas pour les jeunes femmes. De nombreuses personnes d’âge moyen (25 à 54 ans) et de nombreux jeunes hommes qui sont sans travail depuis des mois n’ont pas abandonné leurs recherches d’emploi. Par contre, plus de 90 000 femmes âgées de 15 à 24 ans ont complètement abandonné le marché du travail. Beaucoup travaillaient dans la restauration ou la vente au détail. On ne sait pas encore si elles acceptent des tâches de soins non rémunérées, si elles iront suivre une formation complémentaire ou si leur secteur finira par rebondir.

Par contre, il y aura de nouveaux emplois dans plusieurs secteurs, comme l’éducation des jeunes enfants et l’économie verte. Le budget fédéral de 2021 prévoyait de l’argent frais pour des programmes de formation, mais presque tout était axé sur les employeurs. Ce dont nous avons besoin pour une reprise équitable, ce sont des possibilités de formation axées sur la main-d’œuvre et de vastes mesures de soutien pour permettre aux personnes ayant besoin de formation de l’obtenir.