Message d'avertissement

Attention : cette page est tirée de nos archives. Il se pourrait que notre site Internet contienne des informations plus récentes sur ce sujet. Pour le savoir, utilisez notre moteur de recherche.


Un déjeuner de travail du congrès se penche sur les partenariats stratégiques des syndicats et sur les nouvelles normes de l’OIT

Si les nations les plus riches du monde se traînent les pieds pour ce qui est d’adopter une stratégie globale de lutte contre le sida, il en est tout autrement du mouvement syndical international, dont l’engagement dans des partenariats stratégiques de lutte anti-sida a un impact certain dans les milieux de travail.

Quelques-uns de ces partenariats ont été soulignés lors d’un midi-forum en marge du congrès de la CSI (Confédération syndicale internationale), le 24 juin.

Le forum, dont le thème était l’accès universel au traitement et à la prévention du sida en milieu de travail, a mis en relief certains éléments essentiels de la campagne des syndicats, qui a pour but d’inciter les dirigeants du monde à agir sur la question du VIH-sida. Les membres du groupe de discussion, dont Paul Moist, le président national du SCFP, ont aussi abordé la prévention et le traitement du sida, le soutien et la défense des droits des travailleurs; ils ont de plus exploré les possibles impacts des nouvelles directives élaborées par l’Organisation internationale du travail (OIT) sur l’amélioration de l’accès aux services reliés au sida en milieu de travail.

Un défi lancé à Stephen Harper

Au cours de la discussion, Paul Moist a fait l’éloge de groupes internationaux tels que la Campagne mondiale contre le sida (World AIDS Campaign ou WAC) et le Programme syndical mondial de lutte contre le sida (Global Union AIDS Programme ou GUAP), dont les membres ont étroitement collaboré avec le SCFP pour la campagne de pétitions adressées aux leaders du G8.

« Nous devons avant tout miser sur ces nouveaux partenariats et établir des liens avec les organismes de la société civile et les autres syndicats, a soutenu Paul Moist. Nous allons explorer avec la CSI des moyens de consolider nos activités et de susciter la participation d’autres affiliés. Et nous devrions envisager des façons de mieux appuyer les actions du Programme syndical mondial de lutte contre le sida. »

Abordant ensuite l’attitude du gouvernement canadien, M. Moist a fait remarquer que l’inaction de l’administration Harper en matière de VIH-sida n’était qu’un exemple du « décalage politique croissant » du Canada sur de nombreux enjeux fondamentaux. Il a rappelé aux délégués la question embarrassante qu’a posée Stephen Lewis, envoyé spécial de l’ONU pour le VIH-sida, aux leaders du G8 sur leurs promesses trahies du sommet de Gleneagles en 2005 : « Comment les décideurs de ce monde peuvent-ils dépenser des millliards de dollars pour la guerre en Irak, engloutir des billions pour sauver les grandes banques et être incapables de trouver dix millions pour lutter contre la pandémie de sida, un objectif que nous avions fixé il y a cinq ans? »

À la veille des sommets du G8 et du G20, le président du SCFP national a renouvelé le défi lancé à Stephen Harper : implanter une initiative de santé maternelle qui reconnaît les droits reproductifs des femmes, mettre un terme à la protection des brevets des compagnies pharmaceutiques, qui freine l’accès aux médicaments pour les pays qui en ont le plus besoin et fixer une cible d’au moins 0,7 % de la richesse du Canada pour toutes les formes d’aide internationale, y compris la lutte contre le VIH-sida.

Des partenariats qui font une différence en Afrique

Hassan Yussuf, le secrétaire-trésorier du CTC, a décrit l’entente exceptionnelle de partenariat sur le VIH-sida, qui unit son syndicat à la CSI-Afrique et qui a renouvelé les standards pour la mise sur pied de coalitions de lutte contre la pandémie de sida.

« L’épidémie de sida tue les travailleurs et leurs familles », a-t-il souligné en décrivant la situation en Afrique subsaharienne, ou se produisent 65 % des infections au VIH et 72 % des décès reliés au sida dans le monde.

« Le sida freine le développement économique de nombreuses nations et entretient le cycle de la pauvreté qui, à son tour, permet à la maladie de se propager. Des travailleurs ne peuvent contribuer au développement économique de leur pays parce qu’ils sont terrassés par la maladie. La pandémie de sida est aussi dévastatrice pour les femmes, à qui incombe le fardeau des soins à leur famille. »

M. Yussuf a précisé que l’objectif de ce partenariat est d’élaborer des formes d’intervention plus proactives contre les impacts de la crise du sida dans les milieux de travail en Afrique. Le CTC et la CSI se rencontrent chaque année afin de fixer des priorités pour la mise en place d’initiatives efficaces pour les milieux de travail (comme l’éducation par les pairs, les programmes d’assistance-conseil et les échanges de travailleurs); pour délimiter des domaines propices à un militantisme coordonné qui tisse des liens entre syndicats du Canada et d’Afrique; pour revendiquer auprès des gouvernements des pays industrialisés et en développement l’accès universel aux services (et mettre au point des approches communes en ce sens); et pour appuyer le Programme syndical mondial de lutte contre le sida, la CSI et d’autres organismes syndicaux dans leur action contre le VIH-sida.

Selon Kwasi Adu-Amankwah, secrétaire général de la CSI-Afrique, ce partenariat s’est avéré efficace.

« Notre partenariat avec le CTC est le plus étroit que nous ayons jamais eu et son approche militante pourrait influer sur les décisions des gouvernements pour les années à venir », a-t-il mentionné.

« Les nombreuses ambassades canadiennes en Afrique nous ont ouvert plusieurs portes. La campagne nous a donné l’occasion de souligner l’importance de l’accès universel aux soins, au traitement et au soutien. Il est fondamental d’utiliser cette approche pour aborder les enjeux du sida dans les milieux de travail. »

Selon M. Adu-Amankwah, la CSI-Afrique est prête à travailler à l’établissement d’objectifs nationaux d’accès universel qui seraient centrés sur certains employeurs et à consolider ses activités de recherche, de financement et d’organisation.

Des outils appropriés

Dans une présentation captivante, Eric Carlson, représentant de l’OIT-sida, a exhorté les délégués à appuyer les nouvelles normes syndicales internationales sur le VIH-sida, adoptées au congrès de l’OIT à Genève la semaine dernière. Selon M. Carlson, cette recommandation est le premier instrument international de protection des droits de la personne centré spécifiquement sur le monde du travail et haussera considérablement les normes pour les employeurs en matière de respect des droits fondamentaux.

« Cette recommandation va grandement contribuer à faire en sorte que le sida devienne un jour chose du passé, » a-t-il soutenu.

Ces nouvelles normes de l’OIT constituent le premier instrument juridique internationalement sanctionné qui vise à renforcer le rôle des milieux de travail dans l’accès universel au soutien, au traitement, à la prévention et aux soins pour le VIH-sida. Selon le site Web de l’OIT, elles incluent des disposition relatives à « des programmes de prévention qui peuvent sauver des vies et à des mesures anti-discriminatoires au niveau national et au niveau de l’entreprise » et « mettent l’accent sur l’importance de l’emploi et des activités génératrices de revenus pour les travailleurs et les personnes vivant avec le VIH, en particulier en termes d’observance du traitement ».

M. Carlson a précisé que ces normes renforcent les effets du Recueil de directives pratiques du BIT sur le VIH-sida en milieu de travail, adopté en 2001 et dont les lacunes seront comblées au moment de la mise en œuvre. En plus des travailleurs migrants qui y sont expressément mentionnés vu la discrimination dont ils font l’objet, ces normes ciblent des actions en faveur de certains groupes vulnérables de la population.

« Le champ d’application de ces normes est considérable, a ajouté M. Carlson. Il couvre tous les domaines d’emploi et s’applique à tous les employés, dans tous les milieux de travail. Vous êtes couvert par cette entente peu importe de quelle région vous êtes ou dans quel secteur vous travaillez. Voici un document dont nous devrions être fiers. »

M. Carlson a conclu sa présentation en décrivant les étapes subséquentes à l’adoption de la recommandation, qui consisteront, dans une approche secteur par secteur, à solliciter les commentaires de tous les groupes d’employés, à améliorer l’accès pour les travailleurs migrants et à mettre à contribution les syndicats pour élaborer un mécanisme de contrôle de la politique sur le VIH-sida dans les milieux de travail.

« Voici l’outil, a-t-il dit en parlant de la nouvelle recommandation. Sachons le rendre efficace. »

La mise en œuvre, un éternel défi

Tout le monde n’a cependant pas été convaincu du caractère infaillible de la nouvelle recommandation.

Jaap Wienen, le secrétaire général adjoint de la CSI, a reconnu que même si le mouvement syndical international peut s’estimer heureux de l’adoption de cette nouvelle entente issue du congrès de Genève, il se questionnait sur l’étendue réelle de son pouvoir.

« Je ne partage malheureusement pas l’optimisme d’Eric sur la facilité de mise en place de cette recommandation », a-t-il affirmé en signalant que les employeurs récalcitrants constituent toujours un obstacle imposant.

« Je ne me fais pas d’illusion : sans pression de la part des syndicats, les employeurs ne bougeront pas. Même si nous avons une base théorique, seule la pratique mènera à des résultats. »

Une déléguée du Sénégal a convenu que la mise en œuvre de ces normes ne serait pas si simple. Comme son organisation représente un grand nombre de travailleurs informels dont des femmes et des enfants vulnérables, a-t-elle ajouté, une meilleure formation s’imposerait. 

Paul Moist a répliqué qu’il faut d’abord que la société mette un terme aux multiples formes de stigmatisation associées au sida, dont l’homophobie.

« Nous aurons beau négocier les meilleures politiques, elles seront vides de sens si on ne peut pas les réaliser. Et nous ne pouvons pas implanter ces politiques sans venir à bout de la sitgmatisation et de la discrimination. Nous avons besoin de leaders, de champions, de gens qui sortent sur la place publique pour qu’on en finisse avec la discrimination. Alors nous pourrons passer à la réalisation de ces politiques. »

Paul Moist a désigné une personne dans l’assistance – l’ex député fédéral néo-démocrate Svend Robinson, qui travaille maintenant pour le Fonds mondial de lutte contre le sida à Genève – comme un exemple de ce type de leadership. En devenant le premier politicien du Canada à afficher ouvertement son homosexualité, a pavé la voie à d’autres en politique et a ainsi contribué à une meilleure connaissance, à moins de discrimination, a affirmé Paul Moist.