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La multinationale des services de garde qui tentait de s’implanter au Canada s’est effondrée. Mais la lutte pour mettre les services de garde et d’éducation des jeunes enfants du Canada à l’abri de la privatisation n’est pas terminée.

« ABC Learning » s’est effondrée en novembre et est maintenant sous séquestre. L’entreprise était le plus important fournisseur de services de garde au monde.

Le chaos qui s’en est suivi – aide financière d’urgence et révélations à propos d’accords financiers bâclés – est un nouvel avertissement à l’effet que les gouvernements canadiens ne doivent se fier au marché pour assurer les services de garde et d’éducation des jeunes enfants. Un programme de services de garde adéquatement financé doit faire partie de l’énoncé économique qui est attendu pour relancer l’économie canadienne dès que le gouvernement Harper aura rappelé le Parlement.

ABC, qui exploitait plus de 23 000 garderies dans quatre pays avait une dette de 1,6 milliard de dollars et était en difficulté depuis le début de l’année. Des juricomptables et des avocats sont maintenant à passer l’épave de la compagnie au peigne fin afin de se faire un portrait exact des livres et des filiales de l’entreprise.

En Australie, 120 000 enfants fréquentent des garderies ABC. La crise touche les familles, mais aussi les 16 000 travailleuses de ces garderies. Au moins 55 garderies fermeront leurs portes dès janvier 2009 et l’avenir de 241 autres, qui sont déficitaires, est incertain.

Un communiqué de presse publié par le gouvernement nous informe sur la façon dont les décisions sont prises lorsque les services de garde sont vus comme une source de profit et non comme un service public. « Selon la Loi sur les compagnies de 2001 … le syndic a l’obligation de maximiser la valeur des actifs. Normalement, les 241 garderies qui ne sont pas rentables devraient donc être fermées ».

Mais le gouvernement a plutôt choisi d’intervenir à court terme avec une nouvelle injection de fonds. Cette bouée financière permettra de maintenir les garderies ouvertes jusqu’en mars 2009. Il faudra ajouter 22 millions aux 300 millions de dollars de fonds publics qui ont déjà été versés à ABC par le biais de subventions aux parents qui doivent faire face à une explosion des frais.

Depuis de nombreuses années, des universitaires et des experts – dont plusieurs sont des femmes – lancent des mises en garde à propos de la structure fragile et de la piètre qualité des services offerts par ABC. Mais personne n’a voulu écouter.

Un commentateur dénonce des livres qui contribuent à cacher la vérité à propos de la structure très complexe et des pratiques financières douteuses de cette compagnie.

Le fondateur et chef de la direction de ABC, Eddy Groves, a démissionné devant la pression des actionnaires à la fin septembre. Les autres dirigeants de l’entreprise l’accusent maintenant d’avoir manqué de transparence sur les finances de l’entreprise.

Une experte australienne en matière de services de garde, Deb Brennan, qui est venue au Canada l’an dernier afin de nous mettre en garde contre les services de garde privés, identifie les racines de la crise : des politiques que le SCFP et d’autres doivent empêcher d’être mises en œuvre au Canada. Elle affirme que ABC a réussi à dominer le marché australien grâce à une décision prise par le gouvernement en 1990. Il s’agissait d’augmenter les subventions accordées aux utilisateurs des garderies privées à but lucratif plutôt que de financer la croissance des garderies sans but lucratif. Le gouvernement avait promis que sa décision mènerait à un accroissement du choix et à une baisse des frais, ce qui s’est évidemment avéré faux dans les deux cas.

L’automne dernier, le SCFP a contribué à rendre publique une nouvelle à l’effet que « 123 Busy Beavers », une entreprise étroitement liée à ABC tentait de s’implanter au Canada. Les premières cibles étaient la Colombie-Britannique, l’Ontario et l’Alberta. Le SCFP et d’autres défenseurs des services de garde ont émis une mise en garde à propos de la piètre qualité des services offerts par ABC, mais aussi des dangers qui ne manqueraient pas de surgir du côté des ententes commerciales si une multinationale commençait à exploiter des établissements de garde et d’éducation des jeunes enfants.

La vague d’achats d’entreprises canadiennes ne s’est jamais concrétisée, malgré le fait que 123/ABC a acheté 11 garderies en Alberta. Mais voilà qu’une nouvelle facette de l’approche du secteur privée en matière de services de garde fait surface au Canada. Une entreprise liée à 123/ABC tente en effet de tirer profit des biens immobiliers du secteur des garderies. Au moins une dirigeante d’Educare, Leslie Wulf, a déjà travaillé pour
« 123 Busy Beavers ».

Le SCFP appuie une recherche en profondeur portant sur les problèmes des services privés de garde et il entend continuer à surveiller tous les développements dans ce dossier, tout en travaillant avec ses alliés à faire la promotion d’un programme national de services de garde publics.

Selon l’Association canadienne pour la promotion des services de garde à l’enfance, ce qui n’a pas fonctionné au Canada est tout à fait clair. Son analyse souligne que partout sauf au Québec, l’approche de marché du Canada est fondée sur la capacité de groupes et d’individus de créer des places en garderies et sur celle des parents de payer la plus grande part des frais d’exploitation. Les gouvernements canadiens n’ont pas réussi à donner aux familles canadiennes l’accès à des services de garde abordables et de qualité.

De fait, de nombreuses études internationales confirment que le Canada est, parmi les pays développés, l’un de ceux qui investit le moins dans ses services de garde publics.

L’approche de marché dans le domaine des services de garde ne fonctionne tout simplement pas. En cette période de crise économique mondiale, les gouvernements canadiens doivent développer un programme public de garde et d’éducation des jeunes enfants capable de soutenir les enfants, les familles et la reprise économique du pays.