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Terence Corcoran semble déterminé à différencier les membres du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) des autres citoyens –comme s’il s’agissait de deux groupes de personnes différents. À la lumière du fait qu’un Canadien sur 60 est membre du SCFP, sa tentative de différencier nos membres des Canadiens ordinaires relève de l’absurde.

Dans son récent article publié à la une du National Post (Guess who’s running your city; CUPE’s power handcuffs mayors) le 28 juillet, M. Corcoran tente de peindre un portrait de travailleurs qui font la grève sans relâche et de villes continuellement perturbées par des conflits de travail. Pourtant, l’année dernière, 955 conventions collectives ont été négociées et seulement six sections locales du SCFP ont eu recours à la grève. Nos membres n’ont aucune envie de faire la grève puisqu’ils connaissent bien les conséquences de ces arrêts de travail. Ils habitent, travaillent et magasinent dans les collectivités qui en sont perturbées.

Dans sa chronique, M. Corcoran fait la prétention risible que les emplois municipaux sont des emplois à vie. En réalité, les travailleurs municipaux sont régulièrement victimes de décisions de sous-traitance. De plus, les employés mis à pied de façon saisonnière ne sont pas systématiquement réembauchés. Dans nombre de municipalités, il peut prendre jusqu’à 15 ans à des travailleurs d’extérieur pour obtenir leur permanence. Si les travailleurs réussissent à conserver leur emploi, ils doivent alors se battre pour obtenir des augmentations de salaire qui suivent la hausse du coût de la vie.

Concernant la situation dans Montréal-Ouest, il appert que M. Corcoran n’ait pas fait ses devoirs. Les employés de cette municipalité, qu’il qualifie de nouveaux ajouts à la machine du SCFP, sont en fait représentés par le SCFP depuis au moins 15 ans. Et l’allégation que des membres du SCFP refusent d’effectuer du travail de jardinage est carrément fausse. Cette fausseté a été médiatisée par l’administration municipale avant même que les fleurs en question n’aient été livrées à la municipalité. La section locale 301 n’a jamais refusé de les planter.

M. Corcoran a raison sur un point. Le Syndicat canadien de la fonction publique mène la lutte contre la privatisation des services publics. Il a toutefois tort de m’attribuer tout le mérite de cette lutte, en ma qualité de président national du SCFP. En réalité, nos 560 000 membres d’un bout à l’autre du pays travaillent quotidiennement pour s’assurer que la population canadienne a accès à des services publics sécuritaires et fiables, et veillent à ce que ces services continuent de relever d’une propriété et d’une gestion publiques.

C’est une lutte difficile, car on s’attend constamment à ce que les municipalités en fassent plus avec des ressources de plus en plus rares. Il est vrai que nos villes doivent composer avec des crises budgétaires. Toutefois, il est faux de prétendre que ces crises découlent de la négociation par le SCFP de contrats de travail équitables pour les membres qu’il représente. Elles sont plutôt le résultat du transfert de coûts jadis assumés par les gouvernements fédéral et provinciaux vers les municipalités. M. Corcoran invoque l’exemple de Toronto, alors je ferai de même. L’insuffisance budgétaire actuelle de la Ville de Toronto totalise un montant égal au coût de la prestation des services sociaux dont la municipalité vient tout juste d’hériter la responsabilité.

Des années de réductions et de sous-financement ont créé un déficit d’infrastructure au Canada estimé à 100 milliards, déficit qui se creuse d’au moins 2 milliards annuellement. Les populations urbaines croissent et, en conséquence, les besoins de services publics se font de plus en plus criants. Seuls les fonds mis à la disposition des maires et des conseillers municipaux pour satisfaire les besoins de leurs concitoyens ne suivent pas.

Le gouvernement conservateur de Stephen Harper soutient que la solution à cette situation est simple. Il encourage la privatisation des services et va jusqu’à affirmer que les villes ne seront plus admissibles au financement fédéral à moins de pouvoir démontrer qu’elles ont entrepris le processus coûteux de préparation de propositions de partenariats public-privé « PPP ».

Cette tendance politique se maintient, en dépit du fait que les projets de PPP ne s’avèrent pas moins coûteux pour les contribuables. Au contraire, partout au Canada, des PPP ont causé des délais, des dépassements de coûts, des faillites, un manque de contrôle public et, au bout du compte, une augmentation des coûts pour le public et le secteur public. Malgré toutes les projections financières exagérément optimistes et les dispositions de transfert des risques, lorsque ces projets échouent, ce sont les gouvernements et les contribuables qui doivent en assumer la responsabilité et les hausses de coûts.

Les Canadiens – y compris les membres du SCFP – sont en faveur des services publics et en ont besoin. Et le SCFP fera tout en son pouvoir pour que les Canadiens y aient accès.

Paul Moist est président national du Syndicat canadien de la fonction publique.