C’est présentement la saison des budgets, le moment où le fédéral et les provinces établissent leurs priorités pour l’année à venir. Ils nous présentent alors leur vision de l’économie, de leurs réalisations et de ce qu’il souhaite accomplir – avec bien sûr des photos de familles radieuses et de nombreux graphiques et tableaux à l’appui.
Un budget présente le plan financier d’un gouvernement, mais reflète aussi des choix politiques. Un budget est habituellement divisé en thèmes. Chaque section expose les nouvelles dépenses ou l’évolution des revenus, ainsi qu’un tableau montrant les chiffres ventilés pour l’année fiscale.
Ce n’est pas toujours évident de comprendre comment les mesures annoncées s’articuleront dans la réalité. Pour y voir plus clair, nous avons préparé une liste de questions cruciales à se poser et d’enjeux clés à surveiller.
S’agit-il d’argent neuf?
Certains budgets incluent du financement qui a déjà été annoncé dans une mise à jour financière ou un budget précédent, ou des sommes que le gouvernement avait promis de dépenser l’année d’avant. Une façon de tirer cela au clair est de comparer les chiffres à ceux des annonces et des budgets précédents.
La mesure comprend-t-elle du financement provenant d’un autre gouvernement?
Il arrive qu’un budget annonce du financement groupé pour des projets qui s’appuient sur une coopération intergouvernementale. Un gouvernement en mal de bonnes nouvelles s’attribuera tout le mérite des sommes investies au lieu d’indiquer clairement la répartition des coûts et le financement injecté par les autres ordres de gouvernement.
À partir de quel moment les fonds seront-ils versés et jusqu’à quand?
Il arrive qu’un budget annonce en grande pompe un investissement de plusieurs milliards de dollars, alors que dans les faits, les dépenses sont réparties sur cinq, dix, voire vingt ans, le financement annuel étant faible au départ et augmentant avec le temps. C’est ce qu’on appelle la « concentration en fin de période ». Cette approche peut s’avérer pertinente pour les grands projets d’infrastructure, mais elle est souvent utilisée pour contrer les critiques de ceux qui exigent des investissements immédiats dans les infrastructures sociales comme un programme national de garderies.
Qui profitera réellement des mesures annoncées?
Les budgets donnent parfois des exemples de l’impact qu’auront certains changements fiscaux ou budgétaires sur monsieur et madame Tout-le-Monde. Les avantages décrits dans ces exemples ne sont toutefois pas nécessairement les plus représentatifs, et il est important de se demander qui est laissé pour compte.
Quelle importance doit-on accorder aux déficits et aux surplus?
Les médias accordent beaucoup d’attention à la question des surplus et des déficits budgétaires. En général, cette information est peu pertinente. En termes économiques, l’impact d’un léger surplus équivaut à celui d’un léger déficit, car les dépenses et les revenus prévus dans un budget sont estimatifs et ils évolueront au cours de l’année. Le solde budgétaire est donc une prédiction un peu arbitraire qui s’inscrit dans un éventail de résultats probables.
Le solde budgétaire réel du gouvernement sera généralement un peu différent, et c’est normal. La différence est habituellement si faible qu’elle n’a pas d’impact économique important. De plus, en se concentrant sur les déficits annuels, on oublie l’impact à long terme du sous-financement des services publics et le fait que le rendement des dépenses publiques peut s’avérer supérieur au coût d’emprunt.
Par transparence, les budgets incluent parfois un fonds de réserve qui met de côté certains revenus attendus afin de donner au gouvernement une marge de manœuvre en cas d’imprévu. Généralement, les hypothèses budgétaires sont assorties d’une analyse de sensibilité, qui indique dans quelle mesure le solde budgétaire serait affecté par l’évolution du produit intérieur brut ou de l’inflation.
Les budgets ne mettent pas toujours en lumière les économies futures qui découleront des investissements dans les services publics ou l’environnement, mais c’est une réalité dont il faut tenir compte pour bien interpréter les choix budgétaires d’un gouvernement. Il est possible de comparer le rendement économique de diverses formes de dépenses gouvernementales (y compris les baisses d’impôts), et, lorsqu’on fait l’exercice, le rendement des investissements dans les services publics est toujours supérieur à celui des baisses d’impôts.
Pour voir un exemple de budget qui priorise les gens et les services publics, consultez le budget fédéral alternatif produit par le Centre canadien de politiques alternatives.