covid-webEn 2021, suivre et comprendre les variations de l’inflation sera tout un défi en raison des effets de la pandémie sur l’économie. Mais les hauts et les bas qui s’annoncent ne doivent pas servir de prétextes aux employeurs et aux gouvernements pour ne pas consentir aux augmentations salariales nécessaires et attendues depuis trop longtemps dans le secteur public.

La Banque du Canada et le ministère fédéral des Finances surveillent de près l’inflation. La banque centrale estime que, dans une économie saine, l’inflation doit être faible et stable, autour de 1 à 3 %. Un taux trop faible signale que l’économie a besoin d’un coup de pouce et la Banque du Canada injecte alors plus d’argent dans l’économie. Si l’inflation s’emballe, la banque diminue la masse monétaire en limitant ses achats d’obligations ou en augmentant les taux d’intérêt.

Pour sa part, le ministère fédéral des Finances s’intéresse à l’inflation pour éviter de multiplier les dépenses pour la relance si la Banque du Canada essaie de freiner la croissance. Ce débat n’est pas seulement technique, il est politique. En effet, les forces pro-austérité cherchent toujours des prétextes pour justifier la réduction des dépenses gouvernementales et le maintien des salaires à un faible niveau.

Malheureusement, à cause de la pandémie, il sera difficile d’interpréter les variations des prix cette année. La plupart des données sur l’inflation mentionnées par les médias sont des comparaisons d’une année à l’autre. L’indice des prix à la consommation (IPC) est la mesure de l’inflation la plus courante au Canada, mais il n’est pas parfait. Il ne tient pas compte des changements au coût de la vie qui diffèrent selon les personnes. En avril, l’IPC a chuté de 0,2 %, une première diminution en plus d’une décennie. L’IPC est demeuré inférieur à son niveau d’avant-pandémie jusqu’en octobre 2020. Cela signifie qu’en général, les chiffres de l’inflation seront faussement élevés d’avril à octobre 2021, puisqu’on les comparera à un taux d’inflation temporairement bas. C’est ce qu’on appelle un « glissement ».

Les données d’avril 2021 montrent que les prix ont augmenté de 3,4 % en général par rapport à avril 2020, mais seulement de 0,5 % par rapport à mars 2021. Les prix augmentent, c’est indéniable, mais pas aussi vite que le font croire les manchettes. On peut s’attendre à ce que ce glissement diminue dans les prochains mois, mais il faudra faire preuve de prudence dans l’interprétation des données sur l’inflation d’ici la fin de l’année.

La hausse spectaculaire du prix de certains produits de base, comme le bois d’œuvre, embrouille encore plus le débat public. L’IPC ne tient pas compte des matières premières, puisque ce ne sont pas des biens de consommation finaux. Or, si le prix d’intrants comme l’acier, le bois et les semi-conducteurs reste élevé, le prix des produits de consommation finaux finira par augmenter, nourrissant l’inflation à long terme.

Qu’est-ce que cela signifie pour la classe ouvrière? Attendez-vous à ce que les chantres habituels utilisent le prix élevé des 2x4 pour nous mettre en garde contre les emprunts du secteur public et une augmentation des salaires qui déclencheraient une inflation galopante.

La vérité, c’est que même si les prix augmentent, l’inflation est loin d’être hors de contrôle, tandis que les salaires prennent du retard depuis trop longtemps. Pourtant, augmenter les salaires est l’un des moyens les plus durables et efficaces de soutenir l’économie, puisque ces dollars supplémentaires sont généralement dépensés dans des entreprises locales.