Les jeunes travailleurs sont nombreux à se sentir marginalisés. Leurs attentes sont-elles trop élevées? Leurs difficultés sont-elles l’apanage de la jeunesse, période qu’il faut nécessairement traverser avant d’avoir droit à un emploi à plein temps, bien rémunéré, sécuritaire, avec des avantages sociaux décents ?

Certes, on ne trouve pas un bon emploi du premier coup, mais la situation s’est empirée. L’an dernier, le travail temporaire et à temps partiel a atteint un niveau record chez les jeunes. Cette génération est d’ailleurs la première à ne pas s’attendre à avoir un meilleur niveau de vie que ses parents.

Les mesures d’austérité ralentissent la croissance et font que le taux de chômage reste élevé. Nous vivons une reprise économique sans croissance. Il y a bien une pénurie imminente de main-d’œuvre, mais elle ne se traduit pas en hausse des salaires. Les employeurs et les gouvernements préfèrent plutôt recourir à la sous-traitance, à l’exploitation des travailleurs étrangers temporaires et au report de l’âge de la retraite.

Le monde du travail change de paradigme. Des entreprises comme Uber, Task Rabbit et le Turc mécanique d’Amazon encouragent une sous-traitance à portée de clic. Cette nouvelle culture détruit la sécurité d’emploi et impose à tous les contraintes peu enviables d’un pigiste. Nombre de jeunes travailleurs se retrouvent ainsi sans la protection, la sécurité et les avantages sociaux que confère un contrat de travail. Ils n’osent même pas espérer joindre, un jour, un syndicat. Devant ces bouleversements, ce que vivent ces jeunes travailleurs représente-t-il vraiment l’avenir du travail ?

Ce scénario-catastrophe est-il réellement inévitable? Nous oublions trop souvent que nous sommes à l’origine de ces relations économiques. Les droits des entreprises et le droit de propriété sont des constructions sociales, au même titre que les syndicats, les lois sur l’emploi et le salaire minimum.

On constate, en réaction, une nouvelle vigueur dans la défense de la hausse du salaire minimum, de la création d’un salaire de subsistance et d’un revenu de base, de la gratuité scolaire et d’un financement adéquat de l’éducation postsecondaire. On constate aussi un intérêt renouvelé pour les syndicats. À preuve, des pigistes et des employés de médias numériques d’avant-garde comme Gawker ont réussi à se syndiquer.

L’opinion des jeunes travailleurs envers les syndicats est meilleure que celle de leurs collègues plus âgés. Ils espèrent en être membre. Devant la nature des tâches demandées et des relations de travail qui sont en pleine mutation, les syndicats doivent adapter leurs stratégies de syndicalisation pour arriver à rejoindre les jeunes et les futurs travailleurs. Sans cela, le déclin des conditions de travail des jeunes travailleurs d’aujourd’hui risque de s’étendre à l’ensemble de la main-d’œuvre.