Survol

La quasi-totalité des membres du secteur des communications du SCFP travaillent pour des employeurs du secteur privé de compétence fédérale. Les entreprises de télécommunication et de radiodiffusion sont de plus réglementées par le CRTC. Le secteur compte approximativement 7000 membres, dont l’immense majorité est au Québec (plus de 98 %).

On peut regrouper les sections locales du secteur des communications en trois sous-secteurs. Celui des télécommunications, le plus grand d’entre eux avec plus de 80 % des membres, inclut la câblodistribution, la téléphonie et les fournisseurs de service Internet (Cogeco, Telus, Vidéotron, Acronym Solutions, Bruce Telecom, Cochrane Telecom Services). La radio, la télévision et la presse écrite (Groupe TVA, Global, RNC Media, Cogeco Média, Bell Média, CTV, Rogers, Vista Radio, Journal de Québec) comptent pour quelque 15 % des membres. La cinématographie et la postproduction (SETTE, ONF, Difuze) comptent environ 4 % des membres.

Parmi les principaux types d’emplois représentés par le SCFP dans le secteur des communications, on retrouve : des technicien(ne)s et spécialistes des technologies de l’information, des préposé(e)s de centres d’appels, le personnel de bureau, des journalistes, des techniciennes et techniciens créatifs (caméra, aiguillage, montage, intégration et mixage sonore), des réalisatrices et réalisateurs et des représentant(e)s en publicité.

Enjeux

Les changements technologiques

Le secteur des communications est en transformation constante à cause de son recours important à la technologie qui évolue sans cesse. Ce phénomène entraîne des modifications dans les habitudes de consommation, dans les pratiques commerciales des entreprises, ainsi que dans les lois et règlements qui les encadrent. Des changements importants à l’organisation du travail, des délocalisations et des pertes d’emplois en découlent malheureusement souvent.

Alors qu’il avait été plutôt épargné au cours des dernières années, le sous-secteur des télécommunications voit le nombre de ses membres décliner.

Avec l’intégration de nouvelles technologies, les employeurs préfèrent embaucher des jeunes fraîchement sortis de l’école, plutôt que de former leurs employé(e)s de longue date. Les postes qui se libèrent ne sont donc pas affichés. Le recours à la sous-traitance à l’étranger, facilitée par l’utilisation d’Internet, est toujours important.

Les employeurs des télécommunications font aussi de plus en plus souvent l’acquisition de jeunes entreprises (start-ups), ou encore, concluent des contrats clé-en-main avec d’autres entreprises pour intégrer de nouvelles façons de faire ou de nouveaux services à leurs activités. Ce faisant, ils n’hésitent pas à bafouer les articles sur les changements technologiques des conventions collectives, affirmant qu’il s’agit de nouveaux services, plutôt que d’une évolution de la technologie utilisée par l’entreprise. Ils refusent aussi d’offrir la formation et le perfectionnement nécessaires, soutenant qu’il est de la responsabilité des employé(es) de s’assurer que leurs compétences sont à jour.

Les structures corporatives et les accréditations

Les employeurs du secteur sont devenus les champions des structures corporatives créatives visant à contourner les accréditations syndicales. Chez Telus, les travailleuses et les travailleurs syndiqués ont ainsi été éparpillés dans de multiples filiales non-syndiquées de l’entreprise où plus de 200 postes seraient syndicables. Québecor (Groupe TVA, Vidéotron, Journal de Québec) a aussi déplacé son personnel syndiqué dans des unités non-syndiquées au cours des dernières années, mais en exigeant qu’il renonce à leur convention collective pour conserver leur emploi.

Un environnement légal en transformation

Après un premier projet de loi mort au feuilleton à la veille des élections de septembre 2021 (C-10), le gouvernement fédéral tente à nouveau de moderniser la Loi sur la radiodiffusion pour y inclure les entreprises en ligne, comme Netflix et Disney +. Le projet de loi C-11 vise à établir un environnement concurrentiel équitable pour les entreprises de radiodiffusion canadiennes et étrangères en imposant à ces dernières des conditions d’exploitation pour soutenir la production d’émissions canadiennes. L’inaction du gouvernement sur cette question, depuis 2012, a laissé entre les mains de la concurrence des millions, voir des milliards de dollars, pour innover et couper l’herbe sous le pied des entreprises de câblodistribution et de distribution IP.

Pour la première fois au Québec, en 2021, le taux d’abonnés au câble était inférieur (66 %) à celui des abonnements aux services de visionnement payants en ligne (71 %). Cela a contribué à l’appauvrissement des canaux de télévision communautaire – financés par un pourcentage des revenus de la câblodistribution –, de la télévision traditionnelle et de la radio qui ont vu leurs cotes d’écoute diminuer et, par conséquent, leurs revenus publicitaires. Entre 2016 et 2020, plus de 1600 emplois ont ainsi été perdus en télévision traditionnelle et facultative au Canada, ainsi que plus de 1100 autres en radio.

Le SCFP est intervenu dans le cadre des travaux parlementaires pour appuyer le projet de loi C-11, mais également pour demander qu’il soit amendé afin de mieux protéger les emplois dans les médias électroniques et chez les câblodistributeurs. Une fois adoptée, il faudra attendre jusqu’à 2025 ou même plus pour adapter la réglementation du CRTC à la nouvelle loi.

Un autre projet de loi déposé par le gouvernement fédéral a pour objectif d’équilibrer les règles du jeu entre les médias canadiens produisant des nouvelles en ligne et les grandes entreprises propriétaires de médias sociaux et de moteurs de recherche. Le projet de loi C-18 a en effet pour objectif d’instaurer au Canada un régime similaire à celui de l’Australie pour forcer ces géants du Web à négocier avec les médias canadiens des accords de rétribution pour l’utilisation de leur contenu journalistique. À défaut de parvenir à une entente, les parties pourront se soumettre à l’arbitrage de l’offre finale par le CRTC. Les médias seront aussi autorisés à négocier collectivement avec les intermédiaires en ligne. Il est estimé que Facebook et Google à eux seuls accaparent plus de 80 % des revenus de publicité numérique au Canada.

Les fusions et les acquisitions

Le secteur a continué sur la voie de la consolidation avec l’annonce d’une fusion entre deux géants canadiens des télécommunications, Rogers et Shaw, en 2021.

Cette transaction amènera une reconfiguration de l’industrie puisque, le Bureau de la concurrence ayant rejeté la transaction initiale, des actifs de télécommunication seront mis en vente. Côté radiodiffusion, l’approbation de l’achat de Shaw par le CRTC pourrait avoir un impact négatif sur les finances de Global ainsi que sur le Fonds pour les nouvelles locales indépendantes (FNLI).

Au cours des deux dernières années, Cogeco s’est aussi porté acquéreur de Déry Télécom, tandis que Bell a acheté Ebox, un revendeur à bas prix.

Le sous-financement de l’Office national du film

L’Office national du film vit une situation grave de sous-financement. Le financement fédéral versé stagne entre 65 et 70 millions de dollars par an depuis le début des années 2000.

Sous cette apparente stabilité se cache en fait une importante baisse du pouvoir d’achat de l’ONF en raison de l’inflation, ce qui menace les emplois de nos membres. Ainsi, le producteur public national a vu la valeur réelle des fonds publics qui lui sont consentis diminuer de 20 millions en 20 ans (en dollars constants). Alors que l’ONF bénéficiait de l’équivalent de 77 millions de dollars pour remplir sa mission en 2001-2002, il ne disposait plus que de 57 millions de dollars en 2021-2022. Le SCFP a profité des consultations prébudgétaires à Ottawa pour demander un financement accru pour l’ONF.

Négociations

Les salaires, les conditions de travail et les pertes d’emplois

Pour les travailleuses et travailleurs syndiqués du secteur, les salaires sont plutôt bons, mais la rétention de talents se fait plus difficile dans certains corps de métier. C’est notamment le cas en informatique et dans des postes de gestion intermédiaires où un écart de plusieurs milliers de dollars s’est creusé entre les salaires de nos membres et ceux offerts par d’autres entreprises. Cela entraîne de nombreuses démissions dans nos rangs, malgré des avantages sociaux supérieurs à ce qui est octroyé ailleurs.

Les augmentations salariales négociées, minimes au cours des dernières années (entre 0 et 1,5 % dans les médias et jusqu’à 2,5 % dans les télécommunications) commencent à être plus élevées en raison de l’inflation et de la pénurie de main-d’œuvre. Une section locale a ainsi été en mesure de négocier des hausses salariales atteignant 3 %, malgré la décroissance du sous-secteur des médias.

Chez Bell Média, nos membres qui se sont syndiqués à la fin de 2019, ont obtenu leur première convention collective en début d’année.

La sous-traitance, le travail précaire et les changements technologiques

Le secteur des communications étant presque entièrement privé, la recherche du profit est prédominante. On constate depuis quelques années l’usage plus fréquent de sous-traitants, de personnes occupant des postes temporaires et de pigistes, de même que l’utilisation de stratégies par les employeurs pour déplacer le travail dans des filiales non syndiquées où les postes sont plus précaires, ou carrément à l’étranger où les salaires et les conditions de travail sont plus faibles.

Les changements technologiques sont au cœur de la sous-traitance dans le secteur et facilitent le télétravail. Cela complique le travail des syndicats pour faire respecter les conventions collectives et soulève des inquiétudes.

Recrutement et syndicalisation

En excluant les pertes d’emplois reliées à la pandémie, le secteur a perdu plus de 800 membres au cours des quatre dernières années, ce qui ramène à l’avant-plan la question du recrutement de nouveaux syndiqués.

Le taux de syndicalisation est assez élevé chez les grands joueurs du secteur, mais il reste des groupes à syndiquer dans ces entreprises. Par contre, les travailleuses et travailleurs sont moins souvent syndiqués dans les plus petites compagnies et chez les nouveaux acteurs du marché. Un élargissement du secteur à des activités connexes, comme le jeu vidéo, serait également une option.

Formation

Dans le contexte des changements technologiques rapides, la formation et le perfectionnement des travailleuses et travailleurs du secteur prennent une importance grandissante. C’est particulièrement le cas dans le sous-secteur des télécommunications où les entreprises auront éventuellement besoin de moins d’emplois en technologies de l’information et de plus de spécialistes de l’intelligence artificielle.

Régimes de retraite

La presque totalité des milieux de travail du secteur offrent des régimes de retraite. On y retrouve un mélange de régimes à contributions déterminées, de régimes à prestations déterminées et de RÉER collectifs. Dans le cas des entreprises privées qui offrent encore un régime à prestations déterminées, les employeurs veulent cependant réduire les bénéfices pour diminuer leurs propres risques.

Campagnes

Découlant d’une résolution adoptée au congrès du Conseil provincial du secteur des communications de 2017, la campagne contre la sous-traitance outremer des emplois en télécommunications lancée à l’été 2020 s’est transformée au printemps 2021. Intitulée Nos télécoms, nos emplois, cette campagne réclame que les entreprises de télécommunications bénéficiant d’importantes subventions des gouvernements fédéral et provinciaux pour le déploiement de la large bande cessent la sous-traitance outremer pour créer de bons emplois au Canada. Maintenant menée conjointement avec Unifor, la campagne réclame également la mise en place de dispositions anti-briseurs de grève au fédéral. Elle fait appel à l’implication des membres et des citoyen(ne)s en invoquant la nécessité de bien gérer les fonds publics et de protéger nos renseignements personnels en les conservant au Canada.

À l’initiative de la section locale 2815, un Comité ad hoc sur les changements technologiques a été mis sur pied par le SCFP‑Québec en 2019. Sous la responsabilité politique du président du secteur des communications, il a réalisé un sondage auprès des exécutifs des sections locales du Québec montrant qu’environ le quart des syndicats se préoccupent de cet enjeu. Ce comité a pour mandat de conseiller la direction de la division du Québec sur les positions à prendre face à des technologies perturbatrices comme la 5G, l’intelligence artificielle, l’utilisation d’Internet pour le télétravail et l’automatisation.