Message d'avertissement

Attention : cette page est tirée de nos archives. Il se pourrait que notre site Internet contienne des informations plus récentes sur ce sujet. Pour le savoir, utilisez notre moteur de recherche.

Texte d’opinion de Paul Moist, président national du SCFP, paru dans le National Post du jeudi 25 février.

Au sortir de la récession, le gouvernement fédéral devra prendre des décisions dont les effets se feront sentir pendant de nombreuses années. Les dépenses que le gouvernement choisira de faire – ou de ne pas faire – dans le prochain budget fédéral nous définiront en tant que pays et auront des répercussions certaines sur la qualité de vie de tous les Canadiens. Si l’on tient compte des déficits en infrastructure, en éducation et en services sociaux, l’équilibre budgétaire ne devrait pas être notre seul objectif.

Le gouvernement fédéral dit vouloir réduire le déficit à moins d’un dixième de sa taille actuelle d’ici cinq ans – tout cela, apparemment, sans hausses de taxes ni d’impôts.

Notre déficit financier, comparé à ceux des autres pays, est sous contrôle; les pénuries d’emplois et le déficit d’infrastructure et de services sociaux, eux, ne le sont pas. Dans ce domaine, nous avons besoin d’un financement public renouvelé pour demeurer concurrentiels. Avant tout, le budget doit porter sur des investissements publics qui stimuleront l’économie, appuieront les plus vulnérables en période de reprise lente et assureront un avenir durable à la prochaine génération.

La course à l’élimination du déficit après une récession peut, en fait, entraîner une stagnation prolongée. C’est ce qui est arrivé en 1937 aux États-Unis, où l’emploi a fléchi lorsque les mesures de relance qui ont suivi la dépression ont été remplacées par des mesures d’austérité. Heureusement, aujourd’hui, il n’y a pas péril en la demeure. La situation financière du Canada est la meilleure de tous les pays du G7. Les taux d’intérêt sont bas et le ratio dette fédérale-PIB – une mesure clé de la santé financière d’un pays – est deux fois moins élevé que pendant la récession du début des années 90.

Par contre, l’avenir du marché du travail est moins rose. La reprise économique s’annonce lente et longue. Et malgré les mesures de relance fédérales, le taux de chômage reste inhabituellement élevé. À 8,5 pour cent, il dépasse d’un point ce qu’avait prédit le gouvernement dans le budget de l’année dernière. Parmi les nouveaux emplois créés, beaucoup sont à temps partiel et offrent moins d’heures de travail et peu ou pas d’avantages sociaux.

En plus de nous attaquer au manque d’emplois, nous devons faire en sorte que ceux que nous créerons pour la prochaine génération soient de qualité. Sans planification adéquate, ce sera difficile. Le départ à la retraite des baby-boomers du Canada créera une pénurie de travailleurs qualifiés et, sans engagement national ni plan immédiat de formation et d’éducation pour les futurs travailleurs, nos taux de chômage resteront élevés et même les emplois spécialisés ne seront pas pourvus.

Dans le prochain budget, le gouvernement aura l’occasion d’engager des investissements publics qui créeront de nouveaux emplois et assureront un avenir durable à la prochaine génération de Canadiens.

Pour atténuer le déficit de compétences et la pénurie d’emplois qui en découlera, le Canada doit investir dans l’éducation et la formation. Il devra pour cela augmenter les transferts aux provinces afin d’assurer une éducation postsecondaire plus accessible et abordable dans les universités, collèges et programmes d’apprentissage.

En cette période qui réclame la poursuite d’investissements dans l’infrastructure, le Canada a une occasion en or d’investir dans une infrastructure nationale « verte ». Cela favoriserait la croissance d’industries vertes et pourrait faire du pays un leader en technologies et en innovation environnementales, une avenue potentiellement lucrative. En plus des retombées positives à court terme de la création d’emplois, les investissements verts protègent l’environnement et assurent des économies d’énergie et de coût constantes.

Enfin, on peut créer plus d’emplois en investissant dans les services publics qu’en baissant les impôts, en plus d’améliorer le niveau de vie de tous les Canadiens. Avec le vieillissement de la génération des baby-boomers, les soins aux aînés – déjà débordés – subiront des pressions additionnelles. Il faut de toute urgence élaborer une stratégie nationale et hausser le financement destiné aux soins publics de longue durée. De plus, un programme national d’éducation de la petite enfance et de garde à l’enfance permettrait à un plus grand nombre de parents de jeunes enfants d’entrer dans le marché du travail. Des programmes de logement abordable et d’aide sociale assurent un soutien essentiel aux plus vulnérables. Les programmes de loisirs, les bibliothèques et le transport en commun viennent aussi en aide aux nombreuses familles qui ont dû réduire leurs dépenses à cause du ralentissement économique.

En période de déficit, les dépenses publiques favorisent l’emploi tout en créant des actifs durables pour les générations futures. Investir aujourd’hui dans l’amélioration du bien-être économique et social de demain ne doit pas être perçu comme un fardeau financier. Si nous ne nous intéressons qu’à l’élimination d’un déficit gérable et que nous oublions d’investir dans l’avenir, nous laisserons à la prochaine génération un héritage de déséquilibre social dont les effets pourraient se faire sentir pendant des décennies.